La loi "anti-squat" adoptée par l'Assemblée nationale

Actualité
par Maxence Kagni, le Vendredi 2 décembre 2022 à 09:09, mis à jour le Lundi 5 décembre 2022 à 08:49

Les députés ont approuvé la proposition de loi "visant à protéger les logements contre l’occupation illicite", vendredi 2 décembre. Voté, en première lecture, le texte porté par Guillaume Kasbarian (Renaissance), prévoit notamment de tripler les sanctions encourues par les auteurs du délit de violation de domicile et permettrait d'accélérer les procédures d'expulsion en cas de loyers impayés. 

L'Assemblée nationale a adopté vendredi 2 décembre, en première lecture, la proposition de loi "visant à protéger les logements contre l’occupation illicite" (40 pour, 13 contre). Le texte, rédigé par le président de la commission des affaires économiques, Guillaume Kasbarian (Renaissance), a été soutenu par le gouvernement et la majorité, ainsi que les députés Les Républicains et Rassemblement national.

La proposition de loi "triple les sanctions qui pèsent déjà aujourd'hui sur les squatteurs", a rappelé vendredi Guillaume Kasbarian. Ainsi, si le texte est définitivement adopté, le fait d'occuper illégalement le domicile d'autrui sera puni de 3 ans de prison et de 45 000 euros d'amende.

Le député Renaissance Charles Sitzenstuhl a salué un texte qui "réaffirme et renforce l'inviolabilité du droit de propriété dans notre pays". Un sentiment que ne partage pas William Martinet (La France insoumise) : "Vous avez défendu les 3,5% de ménages qui détiennent la moitié des logements mis en location dans le pays", a regretté l'élu pendant les débats.

La notion de domicile précisée

La proposition de loi précise également la notion de domicile. Le logement vide de meubles, par exemple dans l'attente d'un nouveau locataire, sera bien considéré comme un domicile : en cas de squat l'application de la loi ne donc pourra "pas être écartée au motif que son caractère vide de meubles le rendrait impropre, ou non prêt, à être habité". 

"Vous êtes en train de confondre deux choses : la question du domicile et celle de la propriété privée", a regretté Stéphane Peu (Gauche démocrate et républicaine). Ces dispositions ont également été critiquées par Gérard Leseul (Socialistes) : elles représentent selon lui "une difficulté majeure" en organisant une "absence de distinction entre le domicile et les autres biens". Selon lui, "un garage vide, un entrepôt, un appartement laissé vacant" pourraient désormais être considérés comme un domicile.

L'Assemblée nationale a adopté un amendement précisant que "constitue notamment le domicile d’une personne tout local d’habitation contenant des biens meubles lui appartenant, que cette personne y habite ou non et qu’il s’agisse de sa résidence principale ou non". Une précision insuffisante pour convaincre les élus de gauche en raison de la présence de l'adverbe "notamment" dans la phrase de l'amendement. 

Par ailleurs, les députés ont adopté un amendement du groupe Horizons qui vise à sanctionner de 3750 euros d'amende "la propagande ou la publicité" visant à "faciliter ou à inciter" le squat. Le dispositif a été soutenu par le député Renaissance Paul Midy, qui a lu en séance quelques extraits d'un guide du "squat de A à Z" pour appuyer son propos. Un fascicule dont l'authenticité a été remise en cause quelques minutes plus tard par François Piquemal (La France insoumise).

Accélération des procédures

La proposition de loi sanctionne également les marchands de sommeil en punissant de 3 ans d'emprisonnement et de 45 000 euros d'amende "le fait, pour une personne ne disposant ou n’ayant disposé d’aucun titre pour occuper un bien immobilier, de se dire faussement propriétaire de ce bien aux fins de le louer".

Autre mesure : "​​​​​L'occupation sans droit ni titre d’un bien immobilier libère son propriétaire de l’obligation d’entretien du bien." La responsabilité de ce dernier ne pourra être engagée "en cas de dommage résultant d’un défaut d’entretien du bien pendant cette période d’occupation." Et en cas de dommage causé à un tiers, le responsable sera l’occupant sans droit ni titre du bien. Cette disposition a néanmoins suscité des réserves de la part du ministre de la Justice, Eric Dupond-Moretti, qui souhaite la "retravailler" pendant la navette parlementaire. Le Garde des Sceaux n'est pas favorable à ce que la responsabilité d'un dommage causé à un voisin, un passant ou une commune, repose sur un squatteur "insolvable par définition".

Enfin, d'autres mesures avaient été adoptées plus tôt dans la semaine, comme la pérennisation d'un dispositif organisant la possibilité d'occuper temporairement des locaux vacants, ainsi que l'accélération des procédures en cas d'impayés de loyer. Dans ce but, le texte prévoit d'inclure de manière systématique une "clause de résiliation de plein droit" aux contrats de bail. Ces clauses permettraient aux propriétaires de "provoquer la résiliation automatique du bail lorsqu’un commandement de payer est demeuré infructueux", sans avoir à engager une action en justice. La suspension de cette clause pourra éventuellement être décidée par le juge, à condition que le locataire en fasse la demande. La proposition de loi prévoit également une accélération de la procédure contentieuse des litiges locatifs. Pour continuer son parcours législatif, la proposition de loi doit maintenant être examinée et adoptée par le Sénat.