Les députés ont adopté jeudi 28 janvier une proposition de loi du groupe Mouvement démocrate sur l'accessibilité des personnes handicapées aux grandes surfaces et aux centres commerciaux. Le texte prévoit une concertation obligatoire entre les acteurs économiques et le secteur associatif qui devra aboutir à des mesures concrètes dans un délai de 18 mois.
Nadia Essayan n'a pas pu retenir son émotion. Après l'adoption en première lecture de sa proposition de loi sur le handicap, la députée du groupe MoDem a remercié les députés présents dans l'hémicycle et a fait part de sa "joie".
Le texte prévoit la mise en place d'une négociation de 18 mois entre les acteurs économiques de la grande distribution et des centres commerciaux, les associations représentant les personnes handicapées et des parlementaires. Cette concertation doit permettre de définir des mesures concrètes facilitant l'accès des personnes handicapées aux grandes surfaces de plus de 1000 mètres carrés. Le gouvernement devra pour sa part présenter aux députés et aux sénateurs les mesures retenues et leur calendrier de mise en œuvre.
"Il s'agit de répondre à la difficulté d'accès de personnes handicapées à de nombreux commerces et centres commerciaux", a résumé la rapporteure lors de la discussion générale, estimant à 12 millions le nombre de Français souffrant d'un handicap. "La moitié des établissements recevant du public ne répond pas à la loi pour l'égalité des droits et des chances du 11 février 2005", a regretté Nadia Essayan.
Quand le handicap avance, c'est toute la société qui progresse. Sophie Cluzel, secrétaire d'État chargée des Personnes handicapées
"L'amélioration du quotidien des personnes handicapées passe nécessairement par la mise en place d'une accessibilité universelle", a affirmé la secrétaire d'État chargée des Personnes handicapées, Sophie Cluzel, qui a largement soutenu le texte. "Nous devons poursuivre les chantiers engagés [...], car ça ne va pas assez vite pour le quotidien des personnes handicapées."
La proposition de loi a été transformée lors de son examen en commission des affaires économiques. Initialement, le texte était centré sur l'instauration obligatoire d'une "heure silencieuse" dans les commerces, chaque semaine, afin que les personnes ayant des troubles du spectre de l'autisme puissent faire leurs courses sans être dérangées par les sons et les lumières, qu'elles perçoivent plus intensément. Un tel dispositif a été expérimenté à Vierzon dans le Cher, dans la circonscription de Nadia Essayan. Cette heure silencieuse devait être rendue obligatoire à compter du 1er janvier 2022.
Un amendement de la rapporteure a finalement abouti à la rédaction du texte adopté, optant pour une négociation étendue au handicap et abandonnant le principe d'une heure tamisée obligatoire par semaine. Une évolution regrettée par plusieurs députés de l'opposition. "Le dispositif proposé me semblait réalisable", a relevé Sylvia Pinel (Libertés et territoires). Sébastien Jumel (Gauche démocrate et républicaine) a déploré "que l'on soit resté au milieu du gué", pour une mesure qui "devrait déjà être en place". "La réécriture a vidé le texte de sa substance, lui a fait perdre de l'énergie", a pointé l'élu communiste.
Le manque d'ambition [de la nouvelle écriture de la proposition de loi] est absolument terrifiant. Adrien Quatennens, député LFI
"Vous aviez proposé un petit pas. Personne ne considérait qu'il était insignifiant", a pour sa part déclaré Dominique Potier (Socialistes), qui s'est étonné qu'il faille légiférer pour ouvrir une concertation. C'est finalement du groupe La France insoumise que la déception a semblé la plus forte, Adrien Quatennens expliquant cette évolution par l'influence des "lobbys" de la grande distribution. "Le manque d'ambition de cette nouvelle écriture est absolument terrifiant."
Nadia Essayan a répondu aux critiques, jugeant que l'heure silencieuse commençait à être déployée dans de nombreux commerces, sans qu'elle ait besoin d'être rendue obligatoire. Selon elle, les acteurs de la grande distribution étaient initialement plus rétifs au principe d'une concertation, qui doit déboucher sur des mesures tangibles. Les députés ont finalement décidé de voter en faveur du texte, à l'exception des élus de La France insoumise qui se sont abstenus. La proposition de loi doit désormais être examinée par le Sénat.