Les députés se sont opposés au projet d'accord commercial avec le Mercosur tel qu'envisagé par la Commission européenne, à l'issue d'un débat organisé à l'Assemblée nationale, ce mardi 26 novembre 2024. Alors que la France s'oppose "en l'état" à la signature cet accord, les députés ont largement approuvé la déclaration du gouvernement, les groupes politiques faisant en outre valoir des sensibilités différentes sur le principe même de ce genre de négociations favorisant le libre-échange.
Le vote n'a pas été unanime mais, au cours des débats, l'opposition au projet d'accord de libre-échange entre l'Union européenne et les Etats du Mercosur (Brésil, Argentine, Uruguay, Paraguay, Bolivie), l'a été. Dans les prises de paroles à la tribune de l'Assemblée nationale, ce mardi 26 novembre, sur fond de relance du mouvement de colère des agriculteurs, des nuances et des différences ont été exprimées, mais personne pour défendre l'accord tel qu'actuellement envisagé par la Commission européenne.
A commencer par le gouvernement : la ministre de l'Agriculture, Annie Genevard, a redit son désaccord face aux conditions prévues par le projet, "en l'état". "Si une norme est nécessaire pour un produit chez nous, elle doit l'être pour tous les produits similaires d'où qu'ils viennent", a-t-elle indiqué, faisant part de sa volonté que soient introduites des "clauses miroirs" de réciprocité.
Le débat a été suivi d'un vote, au cours duquel 484 élus (contre 70) ont approuvé la déclaration du gouvernement. Les députés La France insoumise, qui ont fait part de leur hostilité au traité, ont toutefois voté contre cette déclaration, afin d'exprimer leurs doutes par rapport à la position gouvernementale. "Il serait irresponsable pour la France de s'opposer par anticipation et par principe à tout accord de libre-échange, tant ceux-ci, lorsqu'ils sont équilibrés, peuvent constituer de précieux débouchés pour nos filières", avait indiqué Annie Genevard au cours de son discours.
Cette distinction a divisé l'hémicycle, entre les groupes hostiles à l'idée même d'un accord, et ceux qui jugent que c'est le projet actuel qu'il s'agit de refuser. "Le Mercosur apparaît aussi comme un bouc-émissaire facile dans notre débat national", a ainsi pointé Charles Sitzenstuhl (Ensemble pour la République), inquiet d'une "surenchère anti-Mercosur".
"Nous ne refusons pas l'accord 'en l'état' ; nous refusons l'accord tout court", a pour sa part assumé Arnaud Le Gall (LFI). Une position largement partagée au sein du Nouveau Front populaire. "C'est un accord d'un autre temps, d'un autre siècle, où le mythe néo-libéral faisait encore rêver", a tonné André Chassaigne (Gauche démocrate et républicaine). "Cet accord n'est pas défendable en l'état. Mais pas davantage dans d'hypothétiques améliorations !", a ajouté Benoît Biteau (Ecologiste et social).
Un autre sujet a partagé les participants au débat : la véritable utilité du vote - non contraignant - organisé au Palais-Bourbon. "La France, par le vote que vous allez avoir ce soir, va être regardée particulièrement", a dit Annie Genevard, estimant que le soutien de l'Assemblée au gouvernement donnerait à celui-ci une "grande force politique" au niveau européen.
Et la ministre de se féliciter que la Pologne ait rejoint la position de Paris pour s'opposer à la signature de l'accord en l'état. Ce résultat est "un mandat démocratique renforçant notre légitimité pour défendre la voix du 'non' auprès de la Commission et du Conseil européen", avait anticipé la ministre déléguée chargée du Commerce extérieur, Sophie Primas, vantant les effets de la "diplomatie parlementaire".
La présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, sera-t-elle sensible à ces arguments ? Rien n'est moins sûr, selon plusieurs députés des groupes d'opposition. Vincent Trébuchet (Union des droites pour la République) a fustigé un "vote purement symbolique". Après l'Assemblée nationale, c'est au Sénat que le gouvernement ira chercher du soutien, mercredi 27 novembre, dans sa course contre la montre pour tenter de pousser les instances européennes à renégocier le projet d'accord.