Quatre députés issus de différents bords politiques ont déposé, lundi 13 octobre, deux propositions de loi visant à instaurer la proportionnelle aux élections législatives. Manière selon ces élus de concourir à "débloquer le pays" dans une situation d'instabilité politique qu'ils attribuent à la "crise institutionnelle".
Une réforme qui "ne permettra évidemment pas de résoudre à elle seule la crise actuelle, mais contribuera de manière substantielle à débloquer le pays". C'est ainsi que quatre députés, issus de différents groupes représentés à l'Assemblée nationale, présentent leur volonté d'instaurer le scrutin proportionnel lors des élections législatives.
Erwan Balanant (Les Démocrates), Guillaume Gouffier-Valente (Ensemble pour la République), Jérémie Iordanoff (Écologiste et social) et Marie Récalde (Socialistes), qui sont à l'initiative de deux propositions de loi - l'une ordinaire, l'autre organique -, déposées lundi 13 octobre à l'Assemblée nationale, ont également signé une tribune publiée dans Le Monde, dans laquelle ils appellent à "rejoindre nos voisins européens, qui ont tous recours à la proportionnelle".
Les auteurs des deux propositions de loi se retrouvent sur un constat, la nécessité d'une réforme institutionnelle pour répondre à la situation politique telle qu'elle a évolué au cours des dernières années. "Le fait majoritaire que l'on a connu à partir de 1962, on ne le retrouvera plus", estime aussi Jérémie Iordanoff, qui voit dans l'instauration d'un scrutin proportionnel le prélude à la formation de coalitions politiques. "Dépasser la crise politique que nous traversons aujourd'hui ne peut se faire sans réponse institutionnelle", abonde Guillaume Gouffier-Valente. Tous deux font valoir les exemples étrangers où la proportionnelle a cours, générant "plutôt moins d'instabilité que le scrutin majoritaire". Et en particulier le cas allemand, le pays d'outre-Rhin ayant connu depuis 1958 24 gouvernements et 10 chefs de gouvernements, contre 47 gouvernements et 29 premiers ministres en France.
Il faut changer les pratiques politiques, si l'on veut empêcher que la crise actuelle ne devienne endémique. Erwan Balanant (Les Démocrates)
Les promoteurs des deux textes souhaitent aussi s'inspirer du modèle allemand pour l'instauration d'une proportionnelle dite "mixte", reposant sur le système du double vote. Chaque électeur disposerait ainsi de deux bulletins lors des élections législatives : le premier pour élire un député dans sa circonscription au scrutin uninominal majoritaire à deux tours, le second pour exprimer un choix partisan à l’échelle nationale. Une première série de sièges dite "majoritaire" serait attribuée dans le cadre de circonscriptions locales, quand une seconde dite "compensatoire" serait répartie de manière à rectifier les écarts issus du scrutin uninominal, afin de se rapprocher d’une représentation proportionnelle.
Erwan Balanant, dont la famille politique, le MoDem, a de longue date milité pour l'instauration d'une dose de proportionnelle, fait valoir que ce mode de scrutin "a souvent dicté le mode d'élection de nos députés dans l'histoire de France", et appelle dans le contexte actuel à "changer les pratiques politiques afin que la crise actuelle ne devienne pas endémique". Marie Récalde estime pour sa part que l'Assemblée nationale actuelle est "le reflet de la société", et la preuve tangible que le scrutin majoritaire a vécu. La proportionnelle s'avère aussi le seul moyen selon elle de "passer du 'voter contre', à l'expression d'un vrai choix".
Préparés avec le concours du constitutionnaliste Benjamin Morel, les deux textes de loi sont soutenus par une quinzaine d'autres députés des groupes Ensemble pour la République, Les Démocrates, Socialistes, Écologiste et Social et Gauche Démocrate et Républicaine. Leurs auteurs indiquent que des propositions de loi identiques seront déposées au Sénat "dans les prochains jours". Pour ce qui est de l'examen dans l'hémicycle de l'Assemblée, ils espèrent une inscription à l'ordre du jour sur une semaine dite transpartisane, la prochaine ayant lieu en novembre, ou par le gouvernement lui-même sur le temps législatif qui lui est réservé.