Alors que ses ministres Bruno Retailleau (Intérieur) et Gérald Darmanin (Justice) appellent à la tenue d'un débat public sur le droit du sol, ouvrant la porte à sa remise en question, François Bayrou s'est prononcé, vendredi 7 février, pour se pencher collectivement sur une question "plus large", à savoir "qu'est-ce qu'être Français ?"
Le droit du sol pourrait-il être durci, voire remis en question en France ? C'est en tout cas le débat que souhaitent ouvrir le ministre de l'Intérieur, Bruno Retailleau, et son collègue à la Justice, Gérald Darmanin, alors que jeudi soir, l'Assemblée nationale a renforcé les restrictions au droit du sol à Mayotte. Une proposition de loi en ce sens, portée par la Droite républicaine dans le cadre de sa journée d'initiative parlementaire, a en effet été adoptée en première lecture par les députés à l'issue d'une journée de débats particulièrement houleux.
Au sortir de l'hémicycle, le ministre de la Justice, Gérald Darmanin, qui s'était déjà dit favorable à une réforme constitutionnelle au regard des cas de Mayotte et de la Guyane, n'a pas hésité à se prononcer en faveur de l’ouverture d’un débat national plus global sur la question du droit du sol. "Le droit de la nationalité doit être profondément revu", a aussi estimé le garde des Sceaux. "Le droit du sol ne me paraît pas désormais être quelque chose de suffisant pour s'assurer que l'ensemble des personnes qui demandent la nationalité le font pour de bonnes raisons".
Et le locataire de la place Vendôme d'estimer que le droit du sol "doit être réformé dans la Constitution, et [que] ce doit être au peuple français de trancher", que ce soit via un référendum ou lors de la prochaine élection présidentielle. Quelques minutes plus tard sur le plateau de LCI, son homologue de la place Beauvau s'est dit "favorable à restreindre le droit du sol sur l'ensemble du territoire français", tout comme à l’organisation d’un référendum sur le sujet. "Aucune société ne peut supporter une proportion où il y a une 'submersion'", a renchéri Bruno Retailleau, reprenant les termes du Premier ministre qui avaient suscité la polémique.
Ce vendredi matin, sur l'antenne de RMC, le chef du gouvernement n'a pas fermé la porte à la réflexion. "On peut entrer dans un débat (...), on ne va pas tout repousser", a dit François Bayrou, jugeant cependant "trop étroit" un débat qui porterait sur la seule question de l'acquisition de la nationalité française par le droit du sol. Et de déclarer : "Il faut un débat public approfondi et beaucoup plus large que ça", estimant que "ce qui fermente depuis des années" repose sur la question de "ce qu'est être Français".
Vous voyez bien ce qui fermente depuis des années. Ce qui fermente, c'est 'qu'est-ce que c'est qu'être Français' ? Qu'est-ce que ça donne comme droits ? Qu'est-ce que ça impose comme devoirs ? Qu'est-ce que ça procure comme avantages ? Et en quoi ça vous engage à être membre d'une communauté nationale ? Comment accède-t-on à cette dignité d’être Français ? François Bayrou
Une manière de ne pas s'enferrer dans la seule question du droit du sol, dont la remise en cause constituerait une ligne rouge pour la gauche, et alors que le Rassemblement national préconise cette abrogation de longue date, une ligne réaffirmée à l'occasion des débats sur Mayotte.