La proposition de loi portant "création d'un statut de l'élu local" déjà adoptée par le Sénat, est à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale à partir de ce lundi 7 juillet au soir. Le texte, très attendu à l'approche des élections municipales, et alors que de nombreux maires jettent l'éponge en cours de route, propose une panoplie de mesures visant à accompagner les vocations, avant, pendant et à l'issue du mandat
"Lever les freins à l'engagement des élus" et "simplifier leur quotidien", tel a été l'objectif formulé par Didier Le Gac (Ensemble pour la République), co-rapporteur de la proposition de loi "portant création d'un statut de l'élu local", lors de son examen en commission des lois, le 17 juin dernier. Car plus qu'un statut en tant que tel, le député ayant estimé que les détenteurs d'un mandat électif restaient "des citoyens au service des citoyens", le texte vise avant tout à créer des conditions d'exercice qui ne découragent pas ces derniers et ceux qui aspirent à s'engager.
Egalement co-rapporteur du texte, Stéphane Delautrette (Socialistes) avait quant à lui interpellé le gouvernement le 13 mai dernier tout en rendant hommage aux "500 000 élus municipaux, départementaux et régionaux". Le député avait alors mis en lumière les difficultés de ces derniers qui, "loin d'être des professionnels de la politique", se heurtent à "l'impossibilité de prendre un congé parental sans renoncer à [leurs] fonctions (...), la faible reconnaissance professionnelle des compétences acquises au cours du mandat" ou encore aux "obstacles au bon déroulement de carrière et au retour à l'emploi".
Stéphane Delautrette avait aussi évoqué une menace pour la démocratie locale, qu'il avait qualifié de "trésor national", et exhorté le gouvernement à inscrire à l'ordre du jour de l'Assemblée la proposition de loi qui sera donc examinée en cette dernière semaine de la session extraordinaire du Parlement. "Les élections municipales se tiendront dans moins d'un an, il est plus qu'urgent de permettre à tous nos concitoyens d'être candidats à des fonctions locales", avait fait valoir le député, ce afin de se prémunir du "grave danger" selon lui, "d'une démocratie qui ne soit plus à l'image de celles et ceux qu'elle représente".
Afin de rendre l'engagement local plus attractif, alors que depuis 2020 et les dernières élections municipales, 2 189 démissions de maires ont été enregistrées, le texte prévoit une augmentation des indemnités de fonction des maires et l'attribution d'une indemnité minimale universelle, y compris pour les élus sans délégation. Les conditions de retraite sont également améliorées, avec une majoration d'un trimestre par année d'engagement, dans la limite de huit trimestres. Au vu de la situation budgétaire actuelle, Didier Le Gac (EPR) a préconisé, en amont de l'examen du texte en séance, que le dispositif soit "resserré" au bénéfice des élus à qui il manque des trimestres, quand ces derniers n'ont pas été en mesure de cotiser suffisamment durant l'exercice de leur mandat.
Des indemnités de transport pour les élus des petites communes sont également instaurées, les frais de représentation étendus, et le congé électif pour participer à une campagne rallongé de dix à vingt jours. Le texte prévoit également le remboursement des frais de garde pour les parents et d'assistance pour les aidants, et sécurise les élus locaux en cas de congé maladie, maternité et paternité.
Disposition majeure du texte selon Didier Le Gac, celle visant à modifier les circonstances de la prise illégale d'intérêts. Le député a estimé qu'en l'état actuel du droit, la définition - par manque de clarté - pouvait instituer des situations de conflits d'intérêts public-public et constituait "une exception française". Il a ainsi souscrit au fait de distinguer ces situations de celles qui doivent relever du champ pénal, uniquement dans un cadre public-privé. Les associations d’élus dénoncent régulièrement une définition trop large et des situations qui n'auraient pas lieu d'être, les contraignant notamment à se "déporter", c’est-à-dire à quitter purement et simplement la salle du conseil municipal lors de certaines délibérations.
Lors de l'examen du texte en commission des lois, les mesures qu'il contient ont obtenu l'assentiment de la plupart des groupes politiques de l'Assemblée nationale. Sébastien Huyghe (Ensemble pour la République) a ainsi vanté des "mesures fortes" aptes à répondre à "la crise profonde de l'engagement local". De même, Philippe Gosselin (Droite Républicaine) s'est réjoui d'un texte qui "envoie un signal pour les élections municipales de mars 2026". tandis que Bryan Masson (Rassemblement national) a estimé que la proposition de loi permettait de "redonner de l'attractivité et du sens" au mandat d'élu local.
Revitaliser la démocratie locale serait un euphémisme, je pense qu'il s'agit aujourd'hui de sauver l'engagement local. Hervé Saulignac (Socialistes)
Concernant les mesures liées aux indemnités financières, Hervé Saulignac (Socialistes) a souligné que si "l'argent ne doit jamais être un motif d'engagement, il ne peut pas être un frein non plus", avant d'évoquer "la vague de lassitude et de découragement qui monte parmi les élus locaux de notre pays".
Une voix quelque peu dissonante s'est faite entendre au travers de celle de Carlos Martens Bilongo (La France insoumise). Ce dernier, considérant que le texte passait "à côté de l'essentiel", a estimé que la "réponse pécuniaire" était loin d'être la plus adaptée à la situation. "Revaloriser une indemnité sans redonner du pouvoir, c'est comme repeindre la façade d'une maison qui s'écroule", a-t-il déclaré, pointant du doigt un Etat "de plus en plus centralisateur" et un défaut d'autonomie locale.
Malgré cette nuance, Stéphane Delautrette (Socialistes) s'est réjoui que le texte constitue "une préoccupation largement partagée par l'ensemble des groupes politiques". Et d'espérer une adoption définitive "rapide" avant prochaines élections locales, c'est-à-dire les municipales qui auront lieu au printemps prochain.