L'Assemblée nationale a adopté, ce lundi 2 juin, une motion de rejet préalable contre la proposition de loi de "validation" de l'autoroute A69 entre Castres et Toulouse. Un coup de théâtre puisque cette motion de rejet présentée par La France insoumise a été votée par les groupes de la coalition présidentielle et la droite, qui soutiennent la proposition de loi. Conséquence : le texte va être directement envoyé en commission mixte paritaire, sans avoir été examiné dans l'hémicycle du Palais-Bourbon.
Bis repetita... Une semaine après le vote d'une motion de rejet préalable sur la proposition de loi agricole "Duplomb", visant à "lever les contraintes à l'exercice du métier d'agriculteur", une nouvelle motion de rejet a été votée par l'Assemblée nationale. Cette fois sur la proposition de loi de "validation" de l'autoroute A69 entre Castres et Toulouse. Le texte va donc directement faire l'objet de négociations entre sénateurs et députés réunis en commission mixte paritaire (CMP), sans avoir été examiné dans l'hémicycle du Palais-Bourbon. La motion de rejet a été adoptée par 176 voix "pour" et 0 "contre" (détail du scrutin à consulter ici).
Un coup de théâtre résultant d'une manœuvre tactique des députés du "socle commun", qui ont expliqué vouloir éviter l'"obstruction parlementaire" provoquée par le grand nombre d'amendements déposés sur le texte par les groupes "La France insoumise" et "Ecologiste et social". "Je vous avais demandé instamment de ne pas parasiter le débat", a tancé le rapporteur, Jean Terlier (Ensemble pour la République), alors que l'examen de la proposition de loi devait se terminer d'ici à minuit sous peine d'être reporté à une date indéterminée. Les groupes "Rassemblement national" et "Union des droites pour la République" ont également voté la motion. "Les députés de gauche sont parvenus à leur fin en empêchant le débat démocratique", a estimé Manon Bouquin (RN).
Contrairement à la semaine dernière, c'est toutefois une motion de rejet initialement déposée par les députés de La France insoumise qui a été adoptée. Aboutissant à un scrutin inédit et baroque : le rejet du texte a été approuvé à l'unanimité, avec les voix des élus LFI qui ont revendiqué une "victoire" - le texte étant considéré comme rejeté par l'Assemblée. Les élus écologistes, ulcérés par la tactique des groupes du socle gouvernemental, n'ont pas pris part au vote, préférant quitter l'hémicycle. "Vous faites honte à la démocratie représentative", a lancé Christine Arrighi (Ecologiste et social), opposante historique au projet autoroutier.
"Cela fait deux fois que vous détournez la motion de rejet en 49.3 parlementaire", s'est indignée Mathilde Panot à l'issue du vote. La présidente du groupe LFI a mis en garde contre une forme d'institutionnalisation de cette stratégie, menaçant de saisir les Sages de la rue de Montpensier. "Le Conseil constitutionnel ne pourra que retoquer ce détournement manifeste, flagrant et choquant de la procédure. (...) Vous piétinez la démocratie, mais vous en plus en train de vous réduire à des députés Playmobil." Les députés insoumis ont d'ailleurs déposé une motion de censure, qui doit être examinée cette semaine, après le rejet de la loi "Duplomb" sur une base similaire.
"Il va falloir venir avec un imperméable à l'Assemblée nationale. C'est l'arroseur arrosé. De qui vous vous moquez ? Vous êtes des professionnels de l'obstruction", lui a rétorqué Jean-René Cazeneuve (Ensemble pour la République) qui a, au contraire, jugé que le Conseil constitutionnel n'aurait rien à redire au vote d'une motion de rejet, même à front renversé.
La proposition de loi va donc désormais poursuivre son parcours, sans que le fond du sujet n'ait été véritablement débattu dans l'hémicycle de l'Assemblée nationale. Le texte ambitionne de faire approuver sur le plan législatif le projet de construction de l'A69, dans l'attente d'une décision de justice attendue d'ici plusieurs mois. La cour administrative de Toulouse a récemment décidé d'autoriser la reprise des travaux, déjà partiellement réalisés, dans l'attente de cette décision au fond. Le chantier reprendra à la mi-juin, a annoncé, ce lundi, le ministre chargé des Transports, Philippe Tabarot.