La chute du gouvernement Bayrou retarde la reprise des travaux législatifs dans l'hémicycle de l'Assemblée nationale, qui étaient prévue le 22 septembre. Pour autant, même au ralenti en période de gouvernement démissionnaire, les députés ont repris leur travail au sein des commissions du Palais-Bourbon et préparent notamment la séquence budgétaire qui doit commencer en octobre.
"Ce n'est pas parce qu'il n'y a pas de parlementaires dans l'hémicycle de l'Assemblée nationale qu'il n'y a pas des parlementaires qui sont au travail à l'Assemblée et sur le terrain." Invitée de Lundi C'est Politique le 15 septembre, Yaël Braun-Pivet, a rappelé que l'absence de gouvernement n'empêche pas l'institution qu'elle préside de fonctionner et de travailler.
Dès le 8 septembre, les députés ont bel et bien siégé dans l'hémicycle. Mais... en refusant la confiance à François Bayrou, une large majorité d'entre eux ont décidé de faire tomber le gouvernement. Et en raison du temps nécessaire à Sébastien Lecornu pour proposer un nouveau gouvernement à Emmanuel Macron, la session extraordinaire envisagée jusque-là à partir du 22 septembre ne sera pas convoquée. Sauf accélération des opérations du côté de l'Elysée et de Matignon, le coup d'envoi de la session ordinaire du Parlement aura donc lieu, comme le prévoit la Constitution, "le premier jour ouvrable d'octobre", c'est-à-dire cette année le mercredi 1er.
Un contretemps qui ralenti l'activité législative, alors que plusieurs textes auraient dû être examinés la semaine prochaine dans l'hémicycle, mais qui ne paralyse pas l'activité du Palais-Bourbon. "Les députés sont déjà là, j'ai des commissions qui se réunissent", a expliqué la présidente de l'Assemblée nationale. Et de citer notamment la commission des affaires économiques qui s'est réunie, mercredi 17 septembre, pour donner son feu vert à l'examen de la pétition contre la loi Duplomb qui devrait ensuite faire l'objet d'un débat dans l'hémicycle. Ce même jour, cette commission a, en outre, auditionné le président-directeur général du groupe CMA-CGM, Rodolphe Saadé, qui a par exemple été interrogé sur la taxe Zucman.
Yaël Braun-Pivet (Ensemble pour la République) a également rappelé que, le 10 septembre dernier, les députés avaient approuvé en commission spéciale le projet de loi "relatif à la résilience des infrastructures critiques et au renforcement de la cybersécurité". Le gouvernement étant démissionnaire l'examen du texte a cependant eu lieu sans ministre, ce qui a mécontenté plusieurs élus de gauche : "Permettez-moi de souligner l'absurdité, le scandale même, que puissent se tenir les travaux d'une commission spéciale au lendemain de la révocation du Premier ministre et de son gouvernement", a regretté, en début de séance, Arnaud Saint-Martin (La France insoumise).
Anticipant les critiques, le président de la commission, Philippe Latombe (Les Démocrates), avait cité une note du Secrétariat général du gouvernement, datée de juillet 2024, qui précise "les contours de la notion d'affaires courantes". Selon celle-ci, la transposition de directives européennes dans un texte de loi - ce qui est le cas du projet qui a été examiné - n'est pas expressément interdite quand un gouvernement est démissionnaire. Il faudra cependant attendre la session pour que le texte soit voté dans l'hémicycle.
Un argumentaire qui n'a pas convaincu Arnaud Saint-Martin : "Ce projet de loi ne relève en rien de l'intendance des affaires courantes, de la formalité administrative", a répondu le député LFI, rejoint sur ce point par Sabrina Sebaihi (Ecologiste et social). A l'inverse, Aurélien Lopez-Liguori (Rassemblement national) a plutôt vu cette situation comme une opportunité : "Peut-être que l'absence de gouvernement peut nous permettre plus de liberté à nous, législateur", a-t-il estimé.
Par ailleurs depuis le début du mois, la commission d'enquête sur "les effets psychologiques de TikTok sur les mineurs", présidée par Arthur Delaporte (Socialistes), a adopté le rapport préparé par Laure Miller (Ensemble pour la République), qui a été rendu public le 11 septembre. Et deux autres commissions d'enquête sont en plein cycle d'auditions : l'une travaille sur "les défaillances des politiques publiques de prise en charge de la santé mentale et du handicap et les coûts de ces défaillances pour la société", qui a notamment entendu la Défenseure des droits Claire Hédon, l'autre sur "les dysfonctionnements obstruant l’accès à une justice adaptée aux besoins des justiciables ultramarins".
Le travail préparatoire sur le budget, qui sera présenté par le futur gouvernement, suit également son cours : "Tous les rapporteurs spéciaux pour avis travaillent le budget en ce moment, font des auditions, etc.", a souligné Yaël Braun-Pivet sur LCP. Les parlementaires attendent néanmoins la nomination du gouvernement - et les arbitrages qui seront rendus par celui-ci en matière budgétaire - pour entamer formellement l'examen du projet de loi de finances. L'article 39 de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF) indique que le PLF "est déposé au plus tard le premier mardi d'octobre" – qui tombe cette année le 7 octobre.
"Il faut se dépêcher", a prévenu la présidente de l'Assemblée nationale, qui estime qu'"avant la fin du mois, évidemment, il nous faut un gouvernement consolidé". "A la mi-octobre on doit être dans l'hémicycle [et] avoir avant un débat en commission (...). On ne peut pas squeezer les instances de l'Assemblée nationale", a prévenu Yaël Braun-Pivet.