Les députés Quentin Bataillon (Renaissance) et Jean-Jacques Gaultier (Les Républicains) ont présenté, mercredi 7 juin, le rapport de la mission d'information sur l'audiovisuel public. Lors d'une conférence de presse à l'Assemblée nationale, ils sont revenus sur leurs principales recommandations, notamment en matière de financement et de publicité.
"La spécificité du service public doit être réaffirmée pour une meilleure différenciation". Telle est la ligne directrice du rapport de la mission d'information "sur l'avenir de l'audiovisuel public", présenté mercredi 7 juin devant la commission des affaires culturelles de l'Assemblée nationale, puis lors d'une conférence de presse.
Face aux défis actuels et à venir, dans un paysage audiovisuel en plein bouleversement, le rapporteur de la mission d'information, Quentin Bataillon (Renaissance), en est convaincu : "le statu quo serait mortifère" pour le service public. Un avis partagé par le président de la mission, Jean-Jacques Gaultier (Les Républicains), qu'il "faut révolutionner l’audiovisuel public pour conserver sa spécificité, son indépendance et ce qu’il fait mieux que le secteur privé".
D'autant qu'à l'heure des "fake news" et de la multiplication des théories du complot, le service public de l'audiovisuel a plus que jamais un rôle essentiel à jouer, ont insisté les deux députés. Un rôle essentiel en matière d'information, mais aussi de création culturelle. "Il y a un enjeu démocratique, un enjeu de souveraineté culturelle", a souligné Jean-Jacques Gaultier, qui a mis en garde contre le risque "d'uniformisation de la culture".
En matière de différenciation par rapport aux chaînes privées, le rapporteur et le président de la mission sont revenus sur l'une des 30 propositions du rapport, celle qui a suscité le plus de réactions : leur préconisation d'interdire totalement la publicité sur les chaînes et plateformes numériques de France Télévisions entre 20 heures et 6 heures. Théoriquement, cette interdiction est déjà en vigueur depuis 2009, mais les élus estiment qu'elle a été "contournée", notamment via les parrainages d'émissions, qui ressemblent à s'y méprendre à de la publicité. "Les Français ont été un peu trompés", a estimé Quentin Bataillon à ce sujet.
Pour Jean-Jacques Gaultier, cette différenciation aurait notamment l'avantage de permettre au service public de se concentrer davantage encore sur ses missions, les chaînes étant soulagées de la course à l'audience et libérées d'une ressource aux évolutions incertaines. Conscients du manque à gagner induit par une telle mesure - estimé à 120 millions d'euros par an - les deux députés préconisent de compenser - "à l'euro près" - ces pertes par une fraction de la taxe sur les services numériques, dite taxe "Gafam". "Ce n'est pas incohérent d'aller chercher une compensation là où la publicité augmente chez les géants du streaming étranger pour compenser une baisse de publicité chez les acteurs de l'audiovisuel français", a expliqué le président de la mission.
Axe majeur du rapport : le modèle de financement de l'audiovisuel public, en suspens depuis la suppression de la redevance audiovisuelle. Jusqu'en 2024, le modèle doit son équilibre à l'affectation d'une fraction de la TVA. Quentin Bataillon et Jean-Jacques Gaultier plaident pour la pérennisation de cette solution, qui convient selon eux aux acteurs du secteur.
D'autant plus que les autres solutions ne semblent pas satisfaisantes aux deux députés. Ils estiment qu'une budgétisation directe présenterait des "incertitudes" et "un risque d'attrition des ressources" et considèrent que la création d'une taxe dédiée serait difficilement acceptable par les Français si peu de temps après la suppression de la redevance.
Quoi qu'il en soit, les deux élus agitent le spectre d'une "budgétisation forcée" en 2025 si rien n'est entrepris. Ils ont d'ailleurs déposé une proposition de loi organique transpartisane, signée par chacun d'entre eux, dans le but de pérenniser l'affectation d'une fraction de la TVA, considérant qu'une ressource affectée est une "garantie d'indépendance".
Au-delà des modalités de financement, le rapport recommande de "mettre fin à l’exercice de contrainte budgétaire mené depuis 2018 afin de donner à l’audiovisuel public les moyens de mener les investissements nécessaires aux nouveaux défis qui l’attendent".
Quid du budget de LCP ?
Si La Chaîne Parlementaire-Assemblée Nationale et Public Sénat occupent une place particulière dans le paysage audiovisuel, leurs financements respectifs procédant de chacune des Chambres du Parlement, Quentin Bataillon a tout de même eu un mot sur le sujet lors de la conférence de presse qu'il a tenu avec Jean-Jacques Gaultier.
Quentin Bataillon a notamment jugé qu'il serait utile que "le Bureau et la présidente de l'Assemblée nationale se repenchent sur la situation de LCP, qui semble avoir plus de besoins du fait de l'activité plus dense" au Palais-Bourbon depuis le début de l'actuelle législature, notamment en raison de la composition de l'Assmblée. "La présence de LCP est d'autant plus importante" du fait du regain d'intérêt que suscite la vie parlementaire, a-t-il expliqué en substance.