Budget 2023 : les députés Renaissance prêts au compromis comme au 49.3

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Photo de rentrée pour les parlementaires Renaissance (Elsa Mondin-Gava/LCP)
par Jason Wiels, le Mercredi 7 septembre 2022 à 08:00, mis à jour le Mercredi 7 septembre 2022 à 11:19

Réunis pour deux jours en Seine-et-Marne, les parlementaires macronistes préparent une rentrée sous le signe de la réforme de l’assurance-chômage et du premier budget de la législature. Si l’atmosphère est à l’ouverture avec les oppositions, l’utilisation du 49.3 n’est pour autant pas taboue.

Après avoir perdu plus de cent députés en juin, le groupe Renaissance – qui ne dispose plus que d’une majorité relative à l’Assemblée nationale – veut retrouver une cohésion et imaginer la suite d’une législature incertaine. Les 170 députés et leurs collègues sénateurs ont choisi les confins verdoyants de la Seine-et-Marne, à Louan-Villegruis-Fontaine, pour tenir mardi et mercredi des journées parlementaires studieuses. Une dernière pause ensoleillée et conviviale avant la reprise du travail législatif.

Pour Frank Riester, "c’est un moment où on se retrouve après le ‘rush’ du début de session en juillet, il faut en profiter pour mieux se connaître et préparer les mois qui viennent". Le ministre des Relations avec le Parlement poursuit un objectif principal : "Trouver les voies de passage pour les textes qui sont devant nous."

Car si les troupes du président de la République sont satisfaites d’avoir fait aboutir les réformes estivales sur le pouvoir d’achat, les prochains textes s’annoncent autrement plus compliqués à négocier avec des oppositions certes disparates mais majoritaires dans l’hémicycle.

Point d’équilibre

A ce titre, le projet de loi sur l’assurance-chômage constituera un premier test lors de la reprise de la session, début octobre. L’assouplissement des règles en défaveur des chômeurs est un des leviers que veut utiliser l’exécutif pour atteindre le plein emploi dans cinq ans : "Ce sera difficile d’y arriver, il faudra certainement investir un peu de capital politique sur certaines réformes, dont celle-ci qui arrive très vite", prévient Marc Ferracci, député et économiste de formation.

"Tous les débats à venir seront compliqués, ils ont déjà été interminables quand on a aidé le pouvoir d’achat des Français", anticipe sa collègue Stella Dupont. L'élue aimerait que le groupe et le gouvernement multiplient les signes d’ouverture sur sa gauche, après s’être pour l’instant reposé sur le soutien – ou l’abstention – des élus Les Républicains. "Il faut aussi tenir cette ligne-là et ne pas avoir de fermeture par principe."

Dans une tentative de synthèse, Yaël Braun-Pivet fait elle le vœu que Renaissance puisse toujours incarner le "dépassement des clivages" si souvent répété par le président de la République : "Notre responsabilité, nous le plus grand groupe, est de réussir à aller chercher du compromis et du consensus", espère la présidente de l’Assemblée nationale. Jusqu’à (re)définir le camp présidentiel comme n’étant "ni de droite ni de gauche", slogan qui a fait un temps le succès d’Emmanuel Macron.

Les oppositions attendues au tournant

Outre la question du chômage, les parlementaires vont également se frotter à la première loi de finances de la législature. Un budget 2023 dans lequel la majorité des crédits ministériels devraient être en hausse et les économies limitées, selon plusieurs sources parlementaires.

Illustrant la nouvelle méthode de l’exécutif, le ministre du Budget Gabriel Attal a invité l’ensemble les élus des commissions des finances des deux chambres à venir discuter du texte avant même sa finalisation. Des "dialogues de Bercy" ouverts à toutes les sensibilités, que seul le Rassemblement national a pour l’instant déclinés. "J’espère que les oppositions vont accepter cette main tendue", insiste Aurore Bergé. La présidente du groupe Renaissance assure que "pour la première fois les mêmes informations" seront données "aux députés de la majorité et de l’opposition" et qu’ils seront "reçus ensemble pour avancer ensemble".

Forcés de revoir leur mode de fonctionnement, les élus macronistes s’attendent aussi à une mise à jour du logiciel de leurs adversaires. Quitte à les y pousser : "Il faut les faire sortir de leurs positions dogmatiques", propose Guillaume Gouffier-Cha. L’élu pense aussi que les sujets comme l’écologie ou les droits de femmes pourront évoluer favorablement sous la législature, même dans un hémicycle composite. "Je suis membre du club parlementaire sur le vélo depuis 2017, et toutes les avancées sur le sujet ont été transpartisanes", souligne-t-il. Et rappelle que ce groupe informel compte 85 députés de toute sensibilité, RN excepté.

Le 49.3 dans toutes les têtes

Reste un atout maître dans les mains de l’exécutif : la possibilité de déclencher l’article 49 alinéa 3 de la Constitution, qui permet au gouvernement d’engager sa responsabilité sur un texte pour le faire adopter, à moins qu’une motion de défiance ne le fasse tomber. L’option est sérieusement envisagée en cas de blocage des débats ou de risque de rejet du budget, sur des tons plus ou moins affirmés.

"La Constitution nous donne des outils pour assurer le vote du budget", avertit par exemple Frank Riester. Plus directe, Yaël Braun-Pivet affirme que "le 49.3 ne doit pas être un tabou" même si "aujourd’hui, nous ne sommes pas dans cette phase-là". Le sénateur François Patriat ne se fait lui guère d’illusion quant à la capacité de trouver une majorité sur le budget : "Ce sera difficile, le gouvernement aura sans doute recours au 49.3."

Un commissaire aux finances espère toutefois que Les Républicains comme les socialistes ne pourront pas si facilement s’opposer frontalement au projet de loi de finances car "rien dans le texte n’est vraiment dirimant pour eux". Avant de rappeler l’enjeu essentiel d’un soutien au budget : "C’est avant tout un vote politique, il faudrait être naïf pour ne pas le croire."