Les députés ont voté un amendement visant à transformer l'impôt sur la fortune immobilière (IFI) en "impôt sur la fortune improductive". Proposé par Jean-Paul Matteï (Les Démocrates), vendredi 31 octobre au soir, le dispositif a été largement modifié à l'initiative de Philippe Brun (Socialistes) et adopté avec les voix du MoDem, du PS, du RN et de LIOT.
Après le rejet de la taxe Zucman, les débats budgétaires ont été marqués par une nouvelle discussion engagée sur la fiscalité au terme de laquelle les députés ont approuvé, vendredi 31 octobre au soir, une réforme de l'impôt sur la fortune immobilière (IFI). Un vote obtenu par une addition hétéroclite de voix venant du Modem, du PS, du RN et de LIOT.
L'amendement initial, porté par Jean-Paul Matteï (Les Démocrates) plaidait pour l'instauration d'un "impôt sur la fortune improductive" en lieu et place de l'IFI qui présente, selon lui, l'inconvénient d'exclure de son assiette des biens "improductifs" : or, monnaies précieuses, voitures de collection, yachts, cryptoactifs... Par sa révision de l'IFI, le député MoDem proposait d'intégrer ces biens dans le dispositif, ainsi que les fonds en euros des assurances-vie. L'amendement modifiant, par ailleurs, le barème de l'IFI en remplaçant la progressivité par un taux unique de 1 %.
Au cours des débats, l'amendement a été modifié en profondeur par des sous-amendements défendus par Philippe Brun (Socialistes). Les députés se sont ainsi opposés au relèvement du seuil à 2 millions d'euros proposé l'amendement du groupe Les Démocrates, au sein duquel siègent les élus MoDem, en le maintenant à 1,3 million d'euros. L'amendement initial prévoyait, en outre, d'exclure du nouvel impôt les "actifs immobiliers productifs" - biens loués pour une durée de plus d'un an répondant à des critères environnementaux -, une mesure elle aussi supprimée par sous-amendement.
Enfin, et surtout, les députés ont voté un troisième sous-amendement excluant de l'assiette un bien immobilier par foyer fiscal, dans la limite d'un abattement d'un million d'euros. Une mesure assez similaire à celle qui était défendue par le Rassemblement national. Ainsi modifié, l'amendement de Jean-Paul Matteï a été adopté contre l'avis du gouvernement par 163 voix "pour" et 150 "contre".
Philippe Brun s'est immédiatement félicité d'avoir "rétabli" l'ISF, supprimé par le gouvernement d'Edouard Philippe en 2017. Une vision partagée sur assez peu d'autres bancs de l'Assemblée nationale, notamment du côté de La France insoumise, qui a peu dénoncé l'abattement sur la résidence principale. "Il y a une alliance entre le Parti socialiste et le Rassemblement national pour exonérer d'impôt sur la fortune immobilière le château de Mme Le Pen", a ainsi cinglé Manuel Bompard.
"Ce n'est pas l'ISF qui a été revoté, sinon (...) LFI l'aurait voté", a considéré Prisca Thévenot (Ensemble pour la République) à la sortie de l'hémicycle. Et de lancer : "C'est une taxe inventée par Marine Le Pen elle-même !"
Cependant, l'initiative du MoDem a également irrité ses partenaires de l'ex-majorité présidentielle. "Ce qui a été voté, c'est l'impôt sur la fortune financière, le programme du Rassemblement national", a accusé Paul Midy (EPR). "Il y a eu une alliance entre le RN, les socialistes et le MoDem pour rétablir l'ISF, en taxant l'épargne des Français via les assurances-vie", a déploré Sylvain Berrios (Horizons).
En fin de séance, un échange assez engagé a eu lieu entre Antoine Armand (Eensemble pour la République) et Erwan Balanant (Les Démocrates), signe des remous provoqués par l'adoption de cet amendement. "On assume l'esprit de l'amendement, nous assumons l'esprit du compromis", a quant à lui calmement déclaré Jean-Paul Matteï. "On a fait un joli travail parlementaire."
Les représentants du MoDem et du PS ont fait part de leur souhait de voir la rédaction du dispositif adopté améliorée au cours de la navette parlementaire. Pour que cette réforme voit effectivement le jour, il faudra qu'elle figure dans la version finale du budget de l'Etat pour l'année prochaine.