Une proposition de loi visant à lutter contre la désertification médicale, d’initiative transpartisane, sera examinée en commission ce mercredi 26 mars. La mesure phare du texte, notamment porté par Guillaume Garot (Socialistes), consiste à effectuer "un premier pas dans la régulation de l’installation des médecins sur le territoire", afin de partir des besoins de la population et de procéder au désenclavement de nombreux territoires en matière de santé.
Agir sur la démographie médicale en régulant l'installation des praticiens. C'est la logique enclenchée par la proposition de loi d’initiative transpartisane qui sera examinée, ce mercredi 26 mars, par la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale. Visant à "lutter contre les déserts médicaux", le texte est le résultat d'un travail amorcé en juillet 2022 par des députés de neufs groupes politiques de différentes tendances, et dont Guillaume Garot (Socialistes), en pointe sur ce sujet depuis plusieurs années, est à l'initiative.
Une première version de la proposition de loi avait été déposée en janvier 2023 avant d'être enrichie, les députés ayant repris le fil de leurs travaux au début de l'actuelle législature, rejoints par de nouveaux venus élus lors des législatives anticipées de l'été dernier. Parmi les signataires du texte actuel figurent des députés issus de la gauche, du bloc gouvernemental (coalition présidentielle et droite) et du groupe LIOT. Plusieurs membres du groupe de travail ont été reçus à Matignon le 19 mars pour défendre le texte, dont Christophe Marion (Ensemble pour la République), Xavier Breton (Droite républicaine), Yannick Favennec-Bécot (LIOT) ou encore Hadrien Clouet (La France insoumise).
Lors d'une conférence de presse, le 13 novembre dernier à l'Assemblée, rappelant que "six millions de Français sont sans médecin traitant", et que "huit millions vivent dans un désert médical", Guillaume Garot avait appelé à mettre "un coup d'arrêt" à cette situation d'inégalité croissante.
Mesure phare de la proposition de loi, l'article 1er "permet de flécher l’installation des médecins – généralistes et spécialistes – vers les zones où l’offre de soins est insuffisante", indique le texte, qui précise qu'il "s’agit d’un premier pas dans la régulation de l’installation des médecins sur le territoire, qui permettra, à tout le moins, de stopper la progression des inégalités entre territoires". Une logique qui n'a jamais été mise en œuvre jusque-là, en grande partie en raison de l'opposition du milieu médical, qui estime que cela reviendrait à remettre en cause l'exercice libéral de la profession.
Concrètement, le texte propose de créer "une autorisation d’installation des médecins, délivrée par l’ARS" (Agence régionale de santé). Plus précisément : "En zone sous‑dotée, l’autorisation est délivrée de droit pour toute nouvelle installation. Dans tous les autres cas, c’est‑à‑dire lorsque l’offre de soins est au moins suffisante, l’autorisation est délivrée uniquement si l’installation fait suite à la cessation d’activité d’un praticien pratiquant la même spécialité sur ce territoire", prévoit la proposition de loi dans la version qui sera examinée en commission.
"C'est un encadrement de la liberté d'installation, le principe subsiste, il est juste question de l'aménager, de l'encadrer, pour répondre à des préoccupations d'intérêt général", avait fait valoir Guillaume Garot en novembre dernier. Et le texte de citer des exemples de pays étrangers où la régulation a été mise en place avec succès, comme en Allemagne, où un nombre de médecins pouvant être conventionnés avec l’Assurance maladie est fixé pour chaque zone géographique, et le Danemark, où les médecins généralistes doivent passer un contrat avec les autorités régionales qui régulent la distribution géographique de l’offre médicale.
À situation exceptionnelle, mesures exceptionnelles (...) la régulation de l’installation est une mesure probante qui a déjà été mise en place dans plusieurs États comparables à la France. Exposé des motifs de la proposition de loi
Autre mesure de régulation proposée par le texte : limiter à quatre ans, à l'issue des études de médecine, la possibilité d'exercer en tant que remplaçant, alors que l'intermittence est de plus en plus privilégiée par les praticiens. Selon les chiffres relayés par les députés, 27% des primo-inscrits à l'ordre des médecins choisissent le remplacement, avec une moyenne de 32 semaines d'activité par an.
Le texte propose, en outre, de mettre en place un nouvel outil, l'indicateur territorial de l'offre de soins (ITOS). Se voulant une cartographie par bassin de vie de la répartition de l'offre de soins, cet indicateur serait mis à jour chaque année afin d'aiguiller les Agences régionales de santé dans leurs prises de décision en matière de dotation médicale.
Autres leviers qui figurent dans la proposition de loi : l'intégration facilitée des PADHUE (praticiens à diplômes hors Union européenne, ndlr.), la garantie d'accès à une première année de médecine dans chaque département, ou encore le développement des centres de santé. Autant de sujets qui seront débattus par les députés en commission mercredi et dans l'hémicycle la semaine prochaine.