Les députés de la commission d'enquête "visant à établir les freins à la réindustrialisation de la France" poursuivent leurs travaux. Cette semaine, ils ont notamment auditionné l'ancien ministre de l'Economie et du Redressement productif, Arnaud Montebourg, qui a développé ses idées en matière d'industrie et de souveraineté.
L'ancien ministre de l’Economie et du Redressement productif (2012-2014) Arnaud Montebourg serait-il un client idéal pour les commissions d'enquête parlementaires ? Il faut dire que plusieurs d'entre elles travaillent sur des sujets proches de ceux qu'il a eu à traiter lors de son passage à Bercy et sur lesquels il continue de se faire entendre. Ce mois de mai, il enchaîne donc les auditions.
Au Sénat devant la commission d'enquête "sur l'utilisation des aides publiques aux grandes entreprises et à leurs sous-traitants", puis à l'Assemblée nationale devant celle s'interroge "sur les défaillances des pouvoirs publics face à la multiplication des plans de licenciement", et enfin devant celle "visant à établir les freins à la réindustrialisation de la France".
Jeudi 22 mai, l'ex-ministre de François Hollande a été auditionné pendant environ deux heures par cette commission d'enquête créée à l'initiative du groupe "Rassemblement national" de l'Assemblée. Une audition menée par le président de l'instance, Charles Rodwell (Ensemble pour la République), et le rapporteur, Alexandre Loubet (Rassemblement national).
Comme à son habitude, celui qui a aussi député socialiste (1997-2012) n'a pas bridé sa parole. Il a ainsi évoqué une France "en voie d'appauvrissement" ; considéré que l'Union européenne était au bord d'une "rébellion massive" des Etats membres ; lancé qu'en matière économique, il faut parfois "sortir la batte de baseball du placard"... Et d'alerter notamment sur la stratégie de la Chine qui ne cesse d'attirer les entreprises françaises. "Si on ne prend pas des mesures protectionnistes drastiques, d'ici deux à trois ans, toutes les usines de l'industrie automobile en Europe fermeront", a-t-il affirmé.
Pour limiter la catastrophe qui se profile selon lui, Arnaud Montebourg a estimé que "Madame von der Leyen [la présidente de la Commission européenne, ndlr.] doit prendre des mesures aussi fortes que celles voulues par le Président Trump", avant de développer son analyse : "Les Etats-Unis sont en déficit dangereux et sont quasiment dépendants de leurs créanciers qui sont les Chinois. Ils décident de taxer les autres, pas les Américains."
Pour protéger les filières industrielles européennes (aéronautique, nucléaire, automobile, ferroviaire), il conseille à l'UE de faire de même : "Taxer les autres puissances". L'ancien ministre de Bercy se montre cependant très sceptique, considérant que l'Allemagne dicte sa politique économique à l'Union européenne. En situation d'excédent commercial, Berlin n'aurait pas de raison d'initier des mesures protectionnistes. Au grand dam d'Arnaud Montebourg, selon lequel "il n'existe pas de couple franco-allemand à Bruxelles".
Dans ce contexte, il plaide pour faire valoir la souveraineté française, afin de redresser la balance commerciale. Il appelle à réinvestir dans des secteurs délaissés au fil du temps (médicaments, électronique, industrie d'assemblage, chimie...). Et prôner, en substance, la relance de coopérations entre des opérateurs privés et des organismes publics qui ont par le passé fait le succès de l'industrie française. "La France, quand on s’unit on est surpuissants. C'est comme ça qu’on a a gagné nos guerres. Là, il y a une guerre à mener et à gagner !", a martelé Arnaud Montebourg.
Devant la commission d'enquête l'ancien ministre a, en outre, avancé d'autres propositions comme la nationalisation de la Société Générale, ou encore la création d'un fonds souverain pour développer les startups industrielles.