Les députés Mathilde Feld (La France insoumise) et Nicolas Sansu (Gauche démocrate et républicaine) ont présenté, ce jeudi 21 novembre, les conclusions du troisième rapport annuel sur la lutte contre l'évasion fiscale. Face à un phénomène qui coûterait, selon ce rapport, entre 80 à 100 milliards d'euros à l'Etat, les deux élus proposent des solutions comme l'embauche de "4 000 agents supplémentaires dans le contrôle fiscal".
Il s'agit, selon Mathilde Feld (La France insoumise) d'un phénomène qui "représente un manque à gagner extrêmement important pour les comptes publics". Ce jeudi 21 novembre, la députée a présenté, avec son collègue communiste Nicolas Sansu (Gauche démocrate et républicaine), les conclusions de leur rapport spécial sur "la lutte contre l'évasion fiscale".
A l'issue d'un cycle d'auditions d'économistes, de sociologues ou encore du directeur de Tracfin et de celui du contrôle fiscal au sein de la Direction générale des finances publiques (DGFiP), les deux parlementaires indiquent avoir fait plusieurs constats. "La part des impôts fraudés augmente avec la richesse, ce qui crée un cercle vicieux", souligne en premier lieu Mathilde Feld. "Les milliardaires ont un taux d'imposition moyen sur l'ensemble de leur revenus de l'ordre de 25%, soit un taux plus faible que tout le reste de la population", alors que "les 10% les plus pauvres sont imposés à 47% de leurs revenus en prenant en compte les prélèvements obligatoires", comparent les élus.
Mathilde Feld et Nicolas Sansu affirment que l'évasion fiscale, qui représente d'après leurs travaux un manque à gagner pour l'Etat de 80 à 100 milliards d'euros, "abîme considérablement le consentement à l'impôt". Les élus NFP mettent en cause "les gouvernements successifs qui n'ont pas fait preuve d'une assez grande volonté politique pour combattre ce phénomène". "Les plans Darmanin et Attal affichaient de réelles ambitions mais ne sont que des plans de communication qui ne sont pas suivis d'effets", déplore Mathilde Feld.
"Les résultats sont décevants", ajoute le président de la commission des finances, Eric Coquerel (La France insousmise), présent à la conférence de presse au cours de laquelle ses collègues ont rendu leurs conclusions publiques. Et de déplorer que la lutte contre la fraude ait rapporté "5,2 milliards d'euros en 2023, soit une baisse d'environ 800 millions d'euros en tenant compte de l'inflation" par rapport à l'année précédente.
Mathilde Feld et Nicolas Sansu regrettent aussi l'"affaiblissement" de l'administration fiscale : "30.000 postes ont été supprimés à la DGFiP depuis sa création en 2008, soit un quart de ses effectifs" dénonce la députée, qui craint une poursuite de la baisse des effectifs en raison des suppressions de postes prévues par le projet de loi de finances 2025.
Les députés présentent donc un certain nombre de propositions comme "un plan de recrutement de 4.000 agents supplémentaires dans le contrôle fiscal", une amélioration de la législation, la mise en place d'un impôt minimum adossé sur le patrimoine, ou encore "l'instauration d'une taxe Zucman", qui permet de taxer les multinationales à hauteur de leurs bénéfices réellement réalisés en France.
Mathilde Feld (LFI) et Nicolas Sansu (GDR) proposent, en outre, de créer une mission chargée d'évaluer la hausse des règlements d'ensemble, c'est-à-dire "les accords transactionnels entre l'administration fiscale et ceux qui se sont trompés pour payer l'impôt". Par ailleurs, ils plaident pour un élargissement de la liste des Etats et territoires non coopératifs.
Le rapport annuel sur "la lutte contre l'évasion fiscale" a été créé en 2022, sous l'impulsion d'Eric Coquerel, après son accession à la tête de la commission des finances de l'Assemblée.
Ses deux précédentes versions avaient été confiées à Charlotte Leduc (LFI), battue lors des élections législatives de 2024. Selon Eric Coquerel, ce travail avait poussé le gouvernement à faire des annonces sur le sujet, même s'il considère qu'"aucune action réelle" n'a été entreprise. Nicolas Sansu espère lui aussi alimenter le débat public : "Ce débat sur la fraude fiscale monte, notre rapport est une pierre de plus."
"Il y a une majorité à l'Assemblée nationale, en plus du Nouveau Front populaire, pour que ces mesures passent", a le président de la commission des finances, rappelant que plusieurs mesures proposées ce jeudi ont été votées au Palais-Bourbon, lors des débats sur la partie "recettes" du budget 2025. Et Eric Coquerel d'imaginer que le rapport et les amendements déjà présentés pourraient aussi servir de base pour "modifier le budget" qui serait potentiellement élaboré par un nouveau Premier ministre, si Emmanuel Macron décidait de "donner la main au NFP".