La motion de censure de la Nupes est rejetée

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Mathilde Panot à la tribune de l'Assemblée nationale (LCP)
par Jason WielsMaxence Kagni, Juliette Lacroix, Aurelien Meslet, le Lundi 11 juillet 2022 à 13:30, mis à jour le Lundi 11 juillet 2022 à 19:18

La Nouvelle union populaire écologique et sociale a défendu une motion de censure contre le gouvernement qui n'a réuni que 146 voix, loin de 289 voix requises. Élisabeth Borne a fustigé "l'invective en commun" des groupes de gauche, après le discours de Mathilde Panot tentant en vain de faire tomber le gouvernement. Comme annoncé, RN et LR se sont abstenus.

Les enjeux

  • Vent debout contre le refus de la Première ministre de se soumettre à un vote de confiance, la coalition de gauche à l'Assemblée nationale a mis au vote lundi après-midi une motion de censure. Mathilde Panot, présidente du groupe La France insoumise, a rebaptisé le texte en "motion de défiance" envers le nouvel exécutif.
  • Pour être adoptée, la motion devait réunir 289 voix, soit la majorité absolue de l'hémicycle. Elle n'a en a rassemblé que 146, soit légèrement moins que son nombre de signataires (150). Le RN (89 élus) et LR (62 élus) ayant annoncé vouloir s'abstenir, le texte n'avait aucune chance d'être adopté.
  • En réponse à la remise en cause de sa légitimité, Élisabeth Borne a dénoncé une motion "pleine de procès d'intention" et a regretté que ce texte l'empêche d'"être en train d'agir pour les Français".

Le détail du scrutin

Avec 146 voix pour, la motion de censure aurait dû rassembler presque deux fois plus de suffrages pour être adoptée. "Le congrès de la Nupes est officiellement terminé", a ironisé le porte-parole du gouvernement Olivier Véran à l'annonce des résultats.

"Il y a une majorité implicite que LaREM (Renaissance, ndlr) forme avec LR, et une majorité d'opportunité qu'elle forme avec le RN, qui a décidé de se comporter comme un supplétif", a dénoncé immédiatement Olivier Faure (PS).

Retour sur les moments clés

Une motion contre une "anomalie démocratique"

Mathilde Panot a d'emblée donné le ton en qualifiant la présence d'Élisabeth Borne à Matignon d'"anomalie démocratique", après ce qu'elle estime être le "naufrage des élections législatives" qui n'ont pas donné de majorité absolue au gouvernement et l'absence de vote de confiance suite au discours de politique générale de la Première ministre.

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Profitant de cette motion de censure, la présidente du groupe La France insoumise a voulu marquer la différence entre l'opposition de gauche et les autres oppositions : "Ceux qui ne voteront pas cette motion de défiance seront les partisans de votre politique" a-t-elle lancée à Elisabeth Borne en visant le Rassemblement national et Les Républicains. 

Pour appuyer sa démonstration d'une dizaine de minutes, la députée a accusé le camp présidentiel et le RN de "vivre une lune de miel" depuis les élections. "On ne récolte jamais impunément les soutiens de ce côté-là de l'hémicycle", a-t-elle critiqué. "Cette motion de défiance sert à démasquer les impostures !"

"L'invective en commun"

La riposte n'a pas tardé. Élisabeth Borne a accusé la Nupes de "faire passer la tactique politique avant l'intérêt des Français", estimant que la gauche a inventé "la motion de censure a priori", puisque celle-ci a été décidée et déposée avant même son premier discours dans l'hémicycle, mercredi dernier.

Déterminée à rendre les coups, Élisabeth Borne a jugé la Nupes "fâchée avec la démocratie" : "En démocratie, ce n'est pas celui qui a moins de voix, moins de sièges qui est légitime à gouverner."  

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Brandissant le risque d'instabilité que ferait courir l'adoption de la motion de censure, la Première ministre a ajouté que La France insoumise ne proposait "rien" : "L'avenir en commun a été remplacé par l'invective en commun", a-t-elle fustigé en référence au programme présidentiel de Jean-Luc Mélenchon.

En soutien à l'exécutif, Aurore Bergé (Renaissance) a reconnu dans un trait d'ironie "une vertu et une seule" à la proposition de censurer le gouvernement : "Rappeler par votre vote minoritaire que Jean-Luc Mélenchon a perdu une fois encore la présidentielle."

La gauche unie derrière le rejet de l'exécutif

Signataires de la motion de censure, les autres groupes de gauche l'ont vivement défendue à la tribune. "Si vous souhaitez trouver des points d'accord avec les socialistes, les insoumis, les écologistes et les communistes, comprenez que notre raison d'être n'est pas l'abdication devant le capital", a martelé Olivier Faure pour le groupe socialiste. 

"Vous fissurez toutes les digues ! (...) pour imposer votre programme, vous empruntez le choix de la lâcheté", a ajouté le premier secrétaire du PS, accusant la majorité de banaliser l'extrême droite. Il a été rejoint par sa collègue écologiste Cyrielle Chatelain, qui ne veut "aucun compromis avec les héritiers de l'Action française, de l'OAS et du Front national".

Pour les communistes, Pierre Dharréville a dénoncé une fausse ouverture du gouvernement envers les oppositions : "Vous demandez des compromis et vous affichez un plan sans concession (...) vous n'écoutez pas le pays."

Abstention à droite et à l'extrême droite

Parce que les LR ne veulent pas "joindre [leurs voix] à celle de l'extrême gauche avec qui [ils n'ont] aucun point commun", la droite a confirmé s'abstenir. "Contre tout blocage stérile", Michèle Tabarot a, au contraire, réclamé "du courage" de la part de l'exécutif pour "réformer la France", citant pêle-mêle la mise sous condition du RSA, la réforme des retraites ou le redressement des comptes publics.

Pour le Rassemblement national, Alexandre Loubet a dit vouloir, lui aussi, écarter le risque d'une "crise de régime", raison invoquée pour ne pas voter la motion de censure de gauche. Surtout, le député a ironisé sur la "motion d'imposture" de la Nupes, alors que les quatre formations politiques de la coalition ont appelé à faire battre Marine Le Pen contre Emmanuel Macron à la présidentielle :

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Surfant sur la stratégie désormais établie de normalisation du RN, il a mis en avant une "décision responsable" de la part des 89 députés de son groupe, en "faisant passer le pays avant les partis".