Le modèle des services de réanimation "doit être revu" selon Pierre Moscovici

Actualité
par Jason Wiels, le Mardi 23 mars 2021 à 18:44, mis à jour le Mercredi 24 mars 2021 à 10:10

Lors de la présentation de son rapport annuel, le Premier président de la Cour des comptes a appelé mardi à une refonte du système de soins critiques hospitalier, alors même qu'il "conditionne depuis le début de la crise nombre de nos décisions".

Les services de réanimation ont-ils été le point faible de la réponse française à la pandémie ? Dans son rapport public annuel, la Cour des comptes estime que les acteurs publics ont en général fait preuve d'une "faible anticipation" face à la crise sanitaire et notamment dans le secteur hospitalier. Venu présenté les conclusions du rapport à l'Assemblée nationale, Pierre Moscovici a pointé un "secteur peu armé pour affronter une crise qui l'a placé en première ligne".

"Les services de réanimation conditionnent depuis le début de la crise nombre de décisions (...) qui influent de manière décisive sur notre vie économique et sociale et même sur nos libertés publiques", a rappelé le Premier président de la Cour des comptes. 

Alors que la France comptait 5080 lits de réanimation au 1er janvier 2020, la première vague épidémique a certes pu être endiguée grâce au doublement de ces capacités, atteignant 10707 lits au 15 avril pour un pic de patients à 7027 le 8 avril 2020.  Mais cela s'est fait "au prix d'un renoncement aux [autres] soins absolument sans précédent, dont il faudra d'ailleurs évaluer toutes les conséquences", a-t-il souligné. Avant de lancer un appel à un "redimensionnement" plus pérenne de ce secteur :

La Cour pense que ce modèle doit être revu car le vieillissement de la population soulèvera quoiqu'il arrive la question des services de réanimation, avec un redimensionnement des effectifs et une réforme des modalités de financement. Pierre Moscovici

À l'heure où les capacités hospitalières sont de nouveau sous pression, le focus de la Cour des comptes sur ce sujet sensible rappelle d'ailleurs que la France a vu son taux de lits en réanimation baisser significativement en quelques années : "Si la France avait conservé son ratio nombre de lits/population de plus de 65 ans de 2013, elle aurait disposé, au début de la crise covid, de 5 949 lits de réanimation adultes, contre 5 080 constatés au 1er janvier 2020." Soit presque un millier de lits perdus en moins de dix ans, dans une société pourtant vieillissante.

Parmi les pistes évoquées, la réforme du mode de financement est clé pour inciter les hôpitaux à rouvrir des lits de réanimation. Aujourd'hui, chaque lit génère un déficit moyen de 115 000 euros par an, "une situation qui n’est pas de nature à inciter les établissements à adapter leurs capacités d’hospitalisation aux besoins constatés".

Faible anticipation, meilleure réaction

"Impréparation ne veut pas dire manque de réaction", a toutefois nuancé Pierre Moscovici sur la réponse des pouvoirs publics à la crise. L'ancien ministre socialiste de l'Économie a ainsi salué l'aide efficace aux retours des Français sur le territoire national, grâce à l'action du Quai d'Orsay et de la compagnie Air France et ce pour un "coût maîtrisé".

Cette "forte capacité de mobilisation" des agents face à la soudaineté de la crise, a aussi permis "une continuité du service" au sein de l'administration fiscale pour délivrer les aides ou à l'Unedic pour adapter les règles de l'assurance chômage. 

Enfin, l'utilisation du fonds de solidarité pour les entreprises comme arme anti-crise, qui a coûté 12 milliards d'euros l'an dernier, doit être lui "mieux contrôlé", notamment pour éviter que "le cumul des aides soit supérieur au préjudice subi""La principale critique sur ce fonds est presque 'un excès de générosité'", a répondu Laurent Saint-Martin (LaREM). Pour le rapporteur général du Budget, le succès du fonds signifie qu'il "a atteint sa cible et même, parfois, un peu plus".