Législatives anticipées : dissolution inattendue, fin de mandat brutale, lancement de campagne express... La folle semaine des députés sortants

Actualité
Image
Emilie Chandler
La députée sortante du Val d'Oise Émilie Chandler (Renaissance) colle sa première affiche de campagne, trois jours après la dissolution de l'Assemblée nationale. (© LCP)
par Adèle Daumas, le Vendredi 14 juin 2024 à 20:47, mis à jour le Vendredi 14 juin 2024 à 21:07

Dimanche 9 juin, la dissolution de l'Assemblée nationale et l'annonce d'élections législatives trois semaines plus tard ont pris les députés de court. Formalités de fin de mandat, démarches pour le dépôt d'une nouvelle candidature, lancement de campagne express... Illustration de la folle semaine vécue par les députés sortants qui se représentent à travers celle d'Emilie Chandler dans le Val d'Oise. Reportage.  

"Ici, c'est le QG", présente Emilie Chandler à la petite vingtaine de militants qui s'est réunie en milieu de semaine à 18h30, dans une annexe de sa maison située dans la cour. "La première campagne, c'était dans mon salon. Là ce sera moins galère, les gens pourront venir chercher le matériel quand ils veulent"

Avec cette première réunion du "cercle proche", la députée sortante de la 1ère circonscription du Val d'Oise espère remobiliser ses troupes, quelque peu déboussolées par l'annonce soudaine de la dissolution de l'Assemblée nationale, trois jours plus tôt. Entre les démarches administratives de fin de mandat et les démarches liées au dépôt d'une nouvelle candidature pour les législatives, Emilie Chandler (Renaissance), à peine sortie des européennes, relance en urgence une campagne pour tenter d'être réélue députée. 

Clôturer son mandat en urgence

Dimanche soir, le président de la République a annoncé la dissolution de l'Assemblée nationale, dans la foulée des résultats du scrutin européen. "J'étais un peu assommée, d'abord par le résultat des élections européennes, puis par l'annonce de la dissolution. Ce n'est jamais très agréable", confie Emilie Chandler. "Il a fallu se demander comment organiser les choses dès le lendemain, être tout de suite opérationnel."

Dans ce genre de situation, du jour au lendemain, députés et collaborateurs se retrouvent sans mandat, ni travail. "D'abord, j'ai appelé mes collaborateurs pour leur annoncer qu'ils allaient être licenciés", explique-t-elle. "Ce n'est pas une chose facile à annoncer, puisque tout s'arrête net".

Au-delà de la question des contrats, se pose également la question du matériel et des moyens mis à disposition des élus par l'Assemblée nationale dans le cadre de l'exercice de leur mandat. Il faut rendre l'ordinateur, le téléphone portable... "Lundi, j'ai eu pas mal de visios pour m'occuper de choses très techniques. Est-ce qu'on peut encore répondre aux mails qu'on reçoit [via la messagerie électronique de l'Assemblée] ? Comment se faire rembourser les derniers frais de mandat ?" Le mardi, lui, est consacré aux cartons. "Il a fallu vider les bureaux, partir de Paris, ramener tous les dossiers en circonscription. On n'a pas eu le temps de souffler", poursuit-elle, soulignant toutefois que les choses sont encore moins faciles pour les députés sortants dont la circonscription est située à l'autre bout de la France. 

Passée la surprise, relancer la machine

Malgré ces obligations, la députée sortante assure n'avoir pas hésité à se représenter et s'être préparée à repartir en campagne immédiatement. Dès le dimanche soir, elle échange des messages avec les militants de sa circonscription. Car les dates annoncées par le président de la République pour les élections législatives à venir, les 30 juin et 7 juillet, laissent à peine trois semaines pour faire campagne

Lundi, 500 premières affiches sont élaborées et commandées par son ex-collaborateur et désormais directeur de campagne, sans attendre qu'une charte graphique soit transmise par le parti. De quoi effectuer les premiers collages dès mercredi soir, après la réunion, "pour que les gens se réhabituent à voir ma tête", explique-t-elle. 

Ce jour-là, Emilie Chandler a passé l'après-midi à déplacer les meubles du petit bâtiment situé à côté de sa maison, pour l'aménager en QG de campagne. "C'est une pièce de stockage, où on va pouvoir mettre les outils de campagne, mais c'est aussi une pièce où on pourra faire le 'phoning', les réunions..." Un lieu où se retrouver, aussi. Un buffet de gâteaux apéritifs et de jus de fruits attend d'ailleurs les bénévoles venus à cette première réunion. "Certains ont fait 40 minutes de route, il faut bien traiter nos militants. C'est du temps de vie qu'ils nous donnent", salue Émilie Chandler.

Après quelques échanges sur la situation politique, les réflexes d'organisation reviennent rapidement pour ces militants dont la plupart ont participé à la campagne de 2022. La création de trois boucles WhatsApp est décidée - "une pour les collages, une pour les boîtage et une pour les tractages" et une quatrième est envisagée pour "les discussions politiques", afin de ne pas polluer les trois autres, plus opérationnelles. On commence à parler répartition des lieux à couvrir : "Il faut faire tout le plateau", "Ca fait un paquet de communes !" "Évitez de faire des doublons, ça agace les gens", "Ne pas oublier les hameaux, comme la Goulée..."

D'une campagne à l'autre

Chacun repart avec son lot d'affiches à coller. Les 2500 premiers tracts, eux, arrivent en fin de semaine. "Dès vendredi matin, je vais faire la gare de Pontoise, une autre gare l'après-midi et samedi et dimanche on se déploie sur tous les marchés du territoire", détaille Emilie Chandler. Au-delà de l'organisation, la réunion a aussi pour objectif de fédérer tout ces volontaires. "J'ai senti au début de la réunion qu'ils avaient besoin de voir que j'avais l'énergie d'y retourner", reconnaît la candidate, qui a senti ses militants un peu échaudés par l'annonce de la dissolution.

"Au milieu de tout ça, on s'occupe des démarches administratives", indique-t-elle. Car c'est l'autre enjeu de cette "campagne éclair" : remplir dans des délais très restreints les formulaires divers et variés nécessaires pour se présenter. "Le programme, maintenant, c'est aller déposer ma candidature" - la période de dépôt s'est ouverte mercredi 12 et sera close dimanche 16 juin, soit une semaine seulement après la dissolution de l'Assemblée nationale.

Quand j'ai appris qu'il y avait la dissolution je me suis dit : "on y retourne !" Emilie Chandler

D'autres échéances viennent encore charger ce calendrier : "Demain, il faut que je fasse ma profession de foi, car vendredi midi nos bulletins de vote, affiches et profession de foi doivent être prêts, c'est le délai que nous a adonné notre imprimeur", explique la députée sortante. La propagande officielle doit, quant à elle, être reçue mardi prochain à 18 heures par la préfecture. Et puis il reste à remplir "tous les Cerfa, les annexes, désigner le mandataire financier, le suppléant, ouvrir le compte de campagne, s'occuper du rattachement au parti... Il y a pleins de papiers."

D'une campagne à l'autre, ces quelques jours entre organisation et démarches l'administrative paraissent cependant presque reposants à la candidate et à son équipe qui sortent de plusieurs semaines d'une intense campagne européenne. "Quand j'ai appris qu'il y avait la dissolution je me suis dit : "on y retourne !" Je n'ai pas eu le temps de trop comprendre, on est encore dans l'énergie de la campagne", raconte Emilie Chandler, qui pense qu'il aurait été plus difficile de s'y remettre s'il y avait eu un retour à l'Assemblée entre les élections européennes et la dissolution : "Là, on est encore dans la campagne, on est en continu", dit-elle reconnaissant toutefois qu'"après, il faudra se reposer un petit peu, atterrir de tout ça quels que soient les résultats".