Lutte contre les ingérences étrangères : l'Assemblée nationale s'apprête à adopter définitivement la proposition de loi de Sacha Houlié

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Crédits photo : Tima Miroshnichenko / Pexels
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par Léonard DERMARKARIAN, le Mardi 4 juin 2024 à 12:25

Après avoir été largement adopté par l'Assemblée nationale et le Sénat, en des termes différents, la proposition de loi pour "prévenir les ingérences étrangères en France", portée par Sacha Houlié (Renaissance), a fait l'objet d'un accord entre députés et sénateurs en commission mixte paritaire le 30 mai dernier. L'accord élaboré en CMP sera soumis à un vote définitif à l'Assemblée mercredi 5 juin.

Etoiles de David et mains rouges taguées à Paris dans le contexte du conflit entre Israël et le Hamas, faux cercueils déposés près de la Tour Eiffel avec la mention "Soldats français de l'Ukraine", tentatives de déstabilisation menées par l'Azerbaïdjan en Nouvelle-Calédonie, fake news et attaques informatiques... Alors que les ingérences en tout genre font désormais régulièrement la Une de l'actualité, l'Assemblée nationale s'apprête à adopter définitivement la proposition de loi visant à "prévenir les ingérences étrangères en France".

Ce texte, porté par le président de la commission des lois, Sacha Houlié (Renaissance), a fait l'objet d'un accord entre députés et sénateurs, lors d'une commission mixte paritaire le 30 mai dernier. Cet accord ayant été validé par le Sénat lundi 3 juin, la proposition de loi sera définitivement adoptée par le Parlement après un ultime vote de l'Assemblée mercredi 5 juin.  

Déclaration d'activités, surveillance algorithmique...

Concrètement, l'article 1er du texte instaure un dispositif rendant obligatoire l’enregistrement des acteurs influant sur la vie publique française pour le compte d’une puissance étrangère auprès de la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique (HATVP). Le registre, effectif à compter du 1er juillet 2025 au plus tard, sera assorti d'un régime de sanctions pénales en cas de non-déclaration. Si les personnels consulaires et diplomatiques en sont exclus, les "personnes physiques ou morales" - membres ou ancien membres du gouvernement, collaborateurs ministériels, parlementaires et collaborateurs d'élus, fonctionnaires territoriaux et agents publics, présidents ou membres de collectivités territoriales, dirigeants de partis politiques et de think-tanks, etc. - devront ainsi déclarer leurs activités d'influence.

Autre mesure phare du texte, contestée à gauche lors des débats à l'Assemblée : l'expérimentation d'un dispositif de surveillance algorithmique jusqu'au 1er juillet 2028 (article 3). Si les "traitements automatisés" existaient déjà , ils concernaient uniquement que la "prévention du terrorisme". La proposition de loi, telle qu'issue de la CMP, l'étendra également, durant cette période, aux enjeux d'indépendance nationale, de politique étrangère ainsi qu'aux "ingérences étrangères, menaces pour la défense nationale ou menaces terroristes".

Le texte contient également diverses mesures techniques et juridiques pour mieux définir l'acte d'ingérence et la possibilité de "[geler] des fonds et des ressources économiques" (article 4) et la remise d'un rapport biannuel par le gouvernement au Parlement sur "l'état des menaces qui pèsent sur la sécurité nationale" (article 2),

Un texte de compromis entre l'Assemblée et le Sénat

Après avoir été largement adoptée à l'Assemblée, puis au Sénat dans une version différente, la proposition de loi a fait l'objet d'un accord en commission mixte paritaire. Celle-ci a notamment retenu plusieurs amendements défendus par la rapporteure du texte au Sénat, Agnès Canayer (Les Républicains), comme l'instauration d'une circonstance aggravante en cas d'infraction commise pour le compte d'une entité étrangère, notamment en matière de peines d'emprisonnement (article 4 bis). Le même article prévoit l'autorisation, durant l'instruction judiciaire, de recourir aux techniques spéciales d'enquêtes (surveillance électronique, géolocalisation).

A l'issue de cette CMP conclusive, Sacha Houlié (Renaissance), qui a été l'initiative du texte avec Thomas Gassilloud et Constance Le Grip, a salué sur X (ex-Twitter) un accord permettant "l’adoption d’outils facilitant notre combat contre les agents qui tentent de déstabiliser la France".