Prévention d'actes de terrorisme : les principales mesures du projet de loi

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Éric Dupond-Moretti et Gérald Darmanin à la sortie du Conseil des ministres, mercredi 28 avril 2021
Éric Dupond-Moretti, garde des Sceaux, et Gérald Darmanin, ministre de l'Intérieur, à la sortie du Conseil des ministres, mercredi 28 avril 2021 (Xose Bouzas / Hans Lucas / Hans Lucas via AFP)
par Raphaël Marchal, le Vendredi 7 mai 2021 à 13:36, mis à jour le Mardi 18 mai 2021 à 11:11

Les députés de la commission des lois commencent lundi 17 mai, leurs travaux sur le projet de loi "relatif à la prévention d'actes de terrorisme et au renseignement", par l'audition du ministre de l'Intérieur, Gérald Darmanin, et du garde des Sceaux, Éric Dupond-Moretti. LCP revient sur les principaux points du texte.

Lutter contre une menace qui reste "très élevée" sur l'ensemble du territoire. Tel est l'objectif du projet de loi "relatif à la prévention d’actes de terrorisme et au renseignement", présenté fin avril en Conseil des ministres. Le texte, qui sera examiné dans le détail par les députés à compter du 19 mai en commission, doit permettre d'affiner les outils de lutte contre le terrorisme dont disposent les services de sécurité intérieure, comme l'a expliqué Gérald Darmanin, le ministre de l'Intérieur.

Des dispositions inspirées de l'état d'urgence

Le projet de loi a tout d'abord pour ambition de pérenniser certaines mesures inspirées de l'état d'urgence : fermeture de lieux de culte, instauration de périmètres de protection, mesures individuelles de contrôle et de surveillance (comme le pointage) et les "visites et saisies", l'équivalent des perquisitions administratives.

Deux ans après la mise en place de l'état d'urgence à la suite des attentats de Paris, l'utilisation de ces mesures avait été permise à titre expérimental par la loi "Silt" du 30 octobre 2017, qui permettait de sortir du régime d'exception. Le Parlement avait souhaité instaurer une "clause de revoyure" pour débattre de ces mesures, qui étaient jusqu'à maintenant réservées à des situations d'urgence.

Le nouveau projet de loi prévoit donc de graver dans le marbre l'utilisation de ces dispositions, en les adaptant ; une évolution justifiée, selon l'exécutif, par leur "grande utilité opérationnelle pour l’autorité administrative" et par la "permanence de la menace terroriste". Et ce malgré leur caractère restrictif des libertés fondamentales, soulevé par plusieurs élus de l'opposition et organisations de défense des droits humains.

Prévenir le risque de récidive 

Le projet de loi consacre également un article à la création d'une "mesure judiciaire de prévention de la récidive terroriste et de réinsertion". Cette mesure est bordée de garde-fous : elle ne pourra être prononcée qu'à l'encontre de sortants de prison condamnés pour des faits de terrorisme graves, ayant fait au moins cinq ans de prison, et qui présentent "une particulière dangerosité caractérisée par une probabilité très élevée de récidive" à l'issue de leur peine.

Prononcée par le juge de l'application des peines, cette disposition permettra, par exemple, d'obliger un sortant de prison à exercer un emploi ou suivre une prise en charge sanitaire, dans le but de faciliter sa réinsertion et de prévenir le risque de récidive. Sa durée sera limitée à un an, renouvelable dans la limite de cinq ans. Cet article reprend l'esprit de la loi du 10 août 2020, issue d'une proposition de Yaël Braun-Pivet (LaREM), et qui a été largement censurée par le Conseil constitutionnel.

Une révision de la loi renseignement

Par ailleurs, le projet de loi comporte un volet spécifique au renseignement et au toilettage de la loi du 24 juillet 2015. Il offre aux services de nouvelles prérogatives, afin d'adapter leurs activités aux progrès technologiques, et favorise la transmission d'informations entre services.

Le texte étend la durée de conservation maximale des renseignements obtenus, à la condition que ceux-ci servent des travaux de recherche et développement. Il permet également aux services d'intercepter des communications satellitaires. Par ailleurs, le projet de loi adapte des dispositifs déjà existants. C'est notamment le cas du fait du déploiement de la 5G, dans le cadre de la coopération avec les opérateurs téléphoniques.

Enfin, il est à noter que le gouvernement a d'ores et déjà prévu de modifier son projet de loi, en lui apportant une "lettre rectificative", afin de tenir compte d'une décision du Conseil d'État rendue le 21 avril. Cette modification concerna notamment l'encadrement de l'utilisation d'une technique de renseignement décriée : celle des algorithmes, ou "boîtes noires", qui permettent à un service de renseignement d’analyser d'importantes quantités de données récupérées sur Internet afin de détecter une menace terroriste. Cette technique était menacée par une décision de la Cour de justice de l'Union européenne.

Les drones, une menace émergente

Autre mesure contenue par le projet de loi : le brouillage des drones, "menace émergente" qui "soulève d’importants enjeux de sécurité publique et de défense", explique le gouvernement dans l'exposé des motifs. Le texte doit déterminer les conditions d'utilisation de ce brouillage, afin de mettre fin aux menaces qui pèsent sur les grands événements ou lors de certains convois.

Ces appareils sont susceptibles d’être équipés de dispositifs d’attaque ou de captation d’images employés à des fins malveillantes. Exposé des motifs du projet de loi antiterroriste

Le projet de loi prévoit la possibilité de procéder à de telles opérations de brouillage en cas de survol par un drone d’une zone faisant l’objet d’une interdiction de circulation aérienne comme les aéroports, les terrains militaires et autres sites sensibles.