L'Assemblée nationale a approuvé à l'unanimité, mardi 10 juin, la version finale de la proposition de loi "sur la profession d'infirmier", qui a fait l'objet d'un accord en CMP. Le texte prévoit notamment la reconnaissance d'une "consultation infirmière" et d'un "diagnostic infirmier", ainsi qu'un droit de prescription pour certains examens ou médicaments. Il sera définitivement adopté par le Parlement, après un ultime vote du Sénat, la semaine prochaine.
Qualifiée de "loi historique" par sa rapporteure Nicole Dubré-Chirat (Ensemble pour la République), la réforme de la profession d'infirmier a été adoptée à l'unanimité, mardi 10 juin, dans l'hémicycle de l'Assemblée nationale. "Pour les 650 000 infirmières qui constituent la colonne vertébrale de notre système de soins, ce texte marque une reconnaissance qui était attendue depuis longtemps", s'est aussi réjouie la rapporteure. Une évolution qui intervient dans un contexte de vieillissement de la population et de désertification médicale entraînant des difficultés d'accès aux soins.
Fruit d'un compromis entre députés et sénateurs réunis en commission mixte paritaire (CMP) la semaine dernière, le texte définit les missions des infirmiers, alors que leur cadre d'exercice est jusqu'à présent fondé sur le "décret d'actes" de 2004 devenu obsolète. Il reconnaît les consultations et le diagnostic infirmiers, ainsi que le droit de prescription des produits de santé et des examens complémentaires nécessaires aux soins. Les possibilités d'exercice des infirmiers en pratique avancée (IPA) sont également élargies. Le calcul des indemnités kilométriques des infirmiers libéraux sera par ailleurs pris en compte.
Nicole Dubré-Chirat (EPR) s'est félicitée de discussions "plutôt consensuelles" en commission mixte paritaire, en dépit de deux points ayant suscité des désaccords. Le premier ayant trait à la création d'une spécialité de niveau master pour les infirmiers scolaires, la rapporteure regrettant "une formation longue et coûteuse alors que nous manquons cruellement d'infirmiers scolaires", le second concernant la reconnaissance en pratique avancée pour les infirmiers de spécialité, que la députée du parti présidentiel a souhaité assortir de conditions.
Le ministre chargé de la Santé et de l'Accès aux Soins, Yannick Neuder, a pour sa part vanté "un travail équilibré et ambitieux" au service des "chevilles ouvrières de notre système de santé". Il s'est, par ailleurs, engagé à ce que les textes réglementaires adossés à la loi soient édictés "rapidement" après sa promulgation.
Quant au président de la commission des affaires sociales de l'Assemblée, Frédéric Valletoux (Horizons), il a salué "un texte attendu depuis des années", d'autant plus nécessaire que les projections démographiques indiquent qu'en 2050, 20 millions de personnes auront plus de 65 ans. Il a également estimé qu'il était devenu indispensable de "définir la compétence des infirmiers de manière autonome, et non relativement à d'autres professions de santé".
Si le texte s'avère consensuel, les critiques le visant ont eu trait à ce que certaines oppositions ont qualifié d'insuffisances. Si Karen Erodi (La France insoumise) a évoqué "des progrès qu'il faut reconnaître", elle a regretté que la proposition de loi s'avère silencieuse sur les questions liées aux salaires et à la pénibilité du métier, ne permettant pas de répondre à la "crise des vocations" qui le touche.
Plus encore, Marie-Charlotte Garin (Ecologiste et Social) a souhaité alerter ses collègues sur d'éventuels effets pervers induits par le texte. "Cette loi risque d'aggraver la charge des infirmières sans les moyens nécessaires, et cela pourrait se traduire par plus de souffrance au travail", a-t-elle considéré, alors que l'espérance de vie des infirmières est inférieure de sept ans à la moyenne nationale, et qu'une infirmière sur cinq part à la retraite en situation d'invalidité. Marie-Charlotte Garin s'est cependant réjouie d'une "avancée importante" obtenue en CMP, à savoir une négociation sur les rémunérations qui devra être engagée dès la promulgation de la loi.
La bataille pour les rémunérations sera cruciale pour que cette loi ne se transforme pas en marché de dupes : travailler plus, sans gagner plus. Marie-Charlotte Garin (Ecologiste et Social)
Sandrine Runel (Socialistes) a, quant à elle, estimé que le texte constituait "une étape, mais pas une fin", et permettait pour l'heure d'"éviter des situations ubuesques où les infirmières ne peuvent pas changer le pansement d'un patient si l’ordonnance est expirée".
Et Si Olivier Fayssat (Union des droites pour la République) a loué la "juste reconnaissance de la montée en compétences de toute une profession", Christine Loir (Rassemblement national) a regretté des mesures "fragmentaires" et une proposition de loi dénuée de "vision d'ensemble".
Malgré les critiques, le texte a été approuvé à l'unanimité par les députés. Il sera définitivement adopté par le Parlement jeudi 19 juin, à l'issue d'un ultime vote au Sénat.