Dans un courrier adressé au Premier ministre, les députés La République en marche Laurent Saint-Martin et Emilie Cariou, deux experts du Budget, réclament des éclaircissements sur le coût des mesures de compensation envisagées pour accompagner la réforme des retraites. Leurs questions font écho à la demande, très forte, de chiffrage lors des débats de la commission spéciale.
Même pour les membres de la majorité, le financement de la réforme des retraites est pour le moins nébuleux. Pour preuve, ce courrier adressé mardi à Matignon par le rapporteur général du Budget, Laurent Saint-Martin, et la cheffe de file La République en marche de la commission des finances, Émilie Cariou, et dont LCP a consulté une copie.
Ces deux piliers de la majorité y posent vingt-deux questions concernant les "mesures de compensation" prévues par le gouvernement, qui doivent selon eux être "précisément évaluées". Une façon de souligner que, pour l'heure, le chiffrage de cette réforme phare du quinquennat n'est pas connue.
Les députés rappellent que certaines mesures de compensation auront "de forts effets sur les équilibres budgétaires" et s'interrogent notamment sur les conséquences de l'intégration des régimes de la fonction publique et des indépendants au futur régime universel.
Alors que le calcul de la retraite des fonctionnaires sera désormais effectué sur l'ensemble de leur carrière et non plus les six derniers mois et que leurs primes seront désormais prises en compte, "existe-t-il des fonctionnaires qui y perdent, soit au niveau du salaire net, soit au niveau de la pension future ?", demandent par exemple Laurent Saint-Martin et Émilie Cariou. Et d'essayer de savoir, en substance, à quel prix se fera cette transition pour les comptes publics.
Le sujet n'est pas anodin et il a animé longuement les débats de la commission spéciale. La retraite des fonctionnaires pesant actuellement 43 milliards d'euros dans le Budget de l'État :
Alignement des cotisations du public sur le privé : "On passe de 74 à 16%, précise @TurquoisNicolas. Optiquement, c'est comme si l'État allait moins cotiser mais il s'est engagé à ce que ces 43 Mds € soient affectés à la caisse universelle."#Retraites #DirectAN pic.twitter.com/NwO4Ehai3K
— LCP (@LCP) February 9, 2020
De même, alors que "les indépendants et libéraux seront soumis à de fortes hausses de cotisations, un abattement de 30% est prévu par une ordonnance pour revoir leur assiette de cotisation : "Comment sera financée la réduction de ces recettes ? Les autres branches de la Sécurité sociale vont-elles voir leurs ressources baisser ?", s'enquièrent-ils.
À travers ces interpellations, nombreuses et précises formulées par deux membres influents de la commission des finances, l'opposition veut y voir les carences du projet de loi du gouvernement.
Le président de la commission des finances Éric Woerth (LR) n'a d'ailleurs pas manqué de le souligner en pleine séance de la commission spéciale, qui terminait mercredi l'examen du volet organique de la réforme :
"Répondez aux questions! " martèle @ericwoerth. La lettre au Premier ministre de deux ténors de la majorité (@EmilieCariou et @LauStmartin) réclamant des réponses sur le financement de la réforme donne du grain à moudre aux oppositions. #Retraites #DirectAN pic.twitter.com/6ARxPslBw4
— LCP (@LCP) February 12, 2020
"Terminer les travaux [de la commission] sur des interrogations qui viennent y compris des rangs de la majorité, je trouve que c'est une conclusion intéressante... et sur laquelle nous reviendrons dès lundi", juge de son côté Clémentine Autain (LFI)
A minima deux semaines de débats sont prévues dans l'hémicycle à partir du 17 février. L'occasion pour l'exécutif d'apporter les réponses aux questions des députés de l'opposition et... de la majorité.