Vote sur la défense nationale à l'Assemblée : ce qu'il faut retenir du débat en 6 points

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Sébastien Lecornu, le 10 décembre 2025.
Sébastien Lecornu, le 10 décembre 2025. LCP
par Maxence Kagni, le Mercredi 10 décembre 2025 à 21:35

L'Assemblée nationale a approuvé, ce mercredi 10 décembre, la déclaration du Premier ministre, Sébastien Lecornu, qui souhaite augmenter les crédits de la défense nationale de 6,7 milliards d'euros en 2026. En six points clés, LCP vous explique tout sur cette déclaration et sur le débat qui a suivi dans l'hémicycle. 

1 - L'Assemblée favorable à une hausse du budget de la défense

Face au "retour des guerres de haute intensité", Sébatien Lecornu a demandé à l'Assemblée nationale "d'approuver le principe d'une augmentation du budget de la défense pour soutenir une montée en puissance plus rapide de nos forces armées dès 2026". Le but est d'"accélérer notre réarmement par une augmentation des crédits de 6,7 milliards d'euros en 2026" (contre 3,2 milliards supplémentaires initialement prévus), pour un budget total de 57 milliards d'euros.

Le gouvernement "proposera un texte de réactualisation de la programmation militaire au début de l'année 2026 au Parlement". La somme engagée permettra notamment de produire des munitions mais aussi des drones "en masse".

Selon Sébastien Lecornu, l'Assemblée nationale devait "envoyer un message à nos alliés comme à nos compétiteurs pour leur montrer que nous nous retrouvons sur l'essentiel, c'est-à-dire la sécurité et l'indépendance nationale" C'est chose faite : la déclaration du Premier ministre a été soutenue par 411 députés, sur les 521 votants. Seuls les élus de La France insoumise, ceux du groupe Gauche démocrate et républicaine où siègent les députés communistes, quatre élus écologistes et un socialiste ont voté contre. Soit, au total, 411 voix "pour", 88 "contre", et 22 abstentions (détail du scrutin à consulter ici).

2 - Marine Le Pen accuse Sébastien Lecornu d'instrumentaliser le débat

L'organisation de ce débat suivi d'un vote avait été annoncée en novembre par Sébastien Lecornu. En pleine séquence budgétaire, le Premier ministre souhaitait ainsi montrer qu'il était possible de trouver une majorité sur des sujets majeurs, y compris sur les choix financiers à faire en conséquence. Comme pour dire qu'au regard des grands enjeux auxquels le pays doit faire face, un vote du projet de loi de finances de l'Etat devrait être un objectif envisageable. Plusieurs membres de l'ex-socle commun ont d'ailleurs enjoint les députés à voter, à terme, le budget de la défense.

Une méthode qui a été fustigée ce mercredi par Marine Le Pen. La présidente des députés du Rassemblement national a accusé Sébastien Lecornu "d'instrumentaliser le budget de la défense pour faire passer [sa] loi de financesqu'elle a qualifiée de "loi de punition sociale et fiscale". "Nous ne sommes pas dupes", a-t-elle déclaré. "Ce débat est une manière déguisée d'imposer à l'Assemblée une pression afin qu'elle vote le budget du gouvernement", a lui aussi regretté le président de la commission des finances, Eric Coquerel (La France insoumise).

3 - La promotion d'une préférence européenne

Le gouvernement a également défendu sa vision d'une défense européenne, la ministre des Armées, Catherine Vautrin, évoquant notamment "le renforcement du pilier européen de l'Otan". Sébastien Lecornu a, quant à lui, fait la promotion de la "préférence européenne" : "L'argent européen et donc du contribuable français doit servir les intérêts européens et donc les industries européennes" d'armement, a expliqué le Premier ministre. 

Maxime Michelet (Union des droites pour la République) s'est opposée à la création d'une armée européenne : "L'armée française serait réduite au rôle de contingent sans doute sous commandement américain ou allemand", a-t-il estimé. "Personne ne mourra jamais pour la défense des directives de Bruxelles", a ajouté le député du groupe d'Eric Ciotti. Marine Le Pen a également dénoncé la "dérive" que constitue selon elle "l'accélération de la fédéralisation de notre système de défense".

4 - Insoumis et communistes défendent l'idée de paix

Les députés insoumis et communistes ont pour leur part voté contre la déclaration du Premier ministre. Dans une intervention sans concession, Edouard Bénard (Gauche démocrate et républicaine) a mis en garde ses collègues, dénonçant une "cacophonie belliciste" : "Nous n'accepterons pas la guerre comme horizon." Le député communiste a fustigé les "libéraux", qui "entendent imposer par la militarisation" ce qu'ils "n'ont pu obtenir des luttes sociales". 

"Vous entraînez notre pays vers la guerre, comme des somnambules prisonniers de leurs songes, inconscients du chemin qu'ils empruntent", a fustigé Bastien Lachaud (La France insoumise). Et d'affirmer à la tribune de l'Assemblée nationale que "si l'on veut la paix, on prépare la paix, par tous les moyens possibles". Anna Pic (Socialistes), qui a voté en faveur de la déclaration du Premier ministre, a cependant souligné que la hausse des crédits militaires ne devrait pas "être utilisée comme justification au démantèlement de nos services publics".

5 - Le bilan d'Emmanuel Macron valorisé

Les soutiens du président de la République ont profité de ce débat pour mettre en valeur son bilan en matière de budget de la défense : "Depuis 2017, le budget du ministère des armées est passé de 32,07 milliards d'euros pour atteindre 57,1 milliards l'année prochaine si les crédits du projet de loi de finances sont adoptés", a expliqué le Premier ministre Sébastien Lecornu. "C'est d'ailleurs l'une des rares politiques que l'on peut mettre à l'actif du président de la République", a quant à elle estimé Marine Le Pen.

Bastien Lachaud (LFI) n'a pas été aussi positif : "Le budget de la défense est en surchauffe, vos propositions étaient mal calibrées, sous-budgétisées et reposaient sur des hypothèses intenables". Selon lui, la volonté d'augmenter de 3,5 milliards d'euros supplémentaires le budget de la défense en 2026, soit "deux ans après le vote de la loi de programmation militaire", est "un aveu d'échec".

6 - Un service militaire volontaire vecteur de résilience ?

Sébastien Lecornu a aussi évoqué le futur service national militaire volontaire, qui devrait accueillir "3000 jeunes français dès l'été prochain". Ce service devra aussi permettre "un réarmement moral et humain", a estimé le Premier ministre. A ce sujet, Loïc Kervran (Horizons) a considéré que le service national militaire volontaire devra être "un véritable contrat social entre la Nation et la jeunesse". Et d'évoquer un "projet de cohésion nationale". 

L'ancienne ministre et secrétaire d'Etat auprès de la ministre des Armées, Geneviève Darrieussecq (Les Démocrates), a elle aussi mis en avant le "chantier majeur" de la "résilience nationale". Puisqu'"une armée seule ne peut pas tout", la députée souhaite "sensibiliser" et "informer" les Français sur "les risques" et entend mobiliser pour cela "l'école, le monde du travail et les collectivités locales".

De son côté, Bastien Lachaud (LFI) a, au contraire, dénoncé le futur service national militaire volontaire qui sera, selon lui, "bâclé et sans moyens" : "Au début du siècle précédent, on appelait cela le bourrage de crâne", a-t-il lancé, fustigeant une "fuite en avant militariste".