Budget 2025 : 49.3, lois spéciale, ordonnances... Les scénarios possibles sur fond de menace d'une motion de censure ?

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Assemblée nationale
par Raphaël Marchal, le Lundi 25 novembre 2024 à 08:30, mis à jour le Lundi 25 novembre 2024 à 08:45

Alors que le projet de loi de finances (PLF) pour 2025 a été transmis au Sénat après son rejet à l'Assemblée nationale, quels sont les scénarios possibles d'ici à la fin des discussions budgétaires ? PLF adopté par 49.3, censure du gouvernement, loi spéciale pour permettre à la France de continuer à fonctionner à partir du 1er janvier, application du budget par ordonnances... Passage en revue 

Quel dénouement pour le budget 2025 ? Après le rejet du projet de loi de finances (PLF) pour 2025 à l'Assemblée nationale, le texte a été transmis au Sénat, où le gouvernement de Michel Barnier dispose d'une majorité. A l'issue des débats au cours desquels ils sera examiné et amendé, le projet de loi devrait donc être adopté au Palais du Luxembourg, lors d'un vote solennel prévu le 12 décembre. Passée cette étape, l'incertitude plane encore sur la suite de l'histoire avec plusieurs scénarios possibles pour doter la France d'un budget sur fond de menace d'une motion de censure qui pourrait à la fois aboutir à la chute du gouvernement et au rejet du projet de loi de finances. 

A l'issue de la première lecture dans chacune des deux Chambres du Parlement, une commission mixte paritaire (CMP) réunissant une délégation de députés et sénateurs sera convoquée pour tenter de trouver un accord sur une même version du PLF. En cas d'échec de cette dernière, le projet de loi repartira en nouvelle lecture à l'Assemblée nationale et au Sénat puis, les députés ayant le dernier mot, une dernière lecture aura lieu au Palais-Bourbon. Un scénario long que le gouvernement souhaite éviter. Mais qui n'est pas exclu en raisons des divergences et des tensions entre Matignon et le groupe Ensemble pour la République de l'Assemblée soulignée par les récentes déclarations du ministre de l'Economie et des Finances, Antoine Armand, lui-même issu du parti présidentiel. 

Un plus que probable recours au 49.3...

Si le "socle commun" de Michel Barnier parvient finalement à un accord, la CMP sera dite "conclusive", le gouvernement étant majoritaire deux fois sur trois au sein de cette instance de conciliation entre les deux Chambres. La copie issue de l'accord serait alors soumise au Sénat et à l'Assemblée nationale, autour de la mi-décembre.

Dans les deux cas, que la commission mixte paritaire soit conclusive ou pas, Michel Barnier l'a dit dans Ouest-France le 14 novembre, il aura "probablement" recours à l'article 49.3 de la Constitution, en fin de processus, pour faire adopter le budget à l'Assemblée. Les oppositions étant, en additionnant leurs voix majoritaires au Palais-Bourbon, le Premier ministre n'aura en effet pas d'autre choix.   

...Voire une loi spéciale pour permettre au pays de fonctionner...

En réponse, les groupes du Nouveau Front populaire ont déjà fait savoir qu'ils déposeront une motion de censure visant à faire tomber le gouvernement. Si celle-ci n'est pas validée par une majorité absolue des députés composant l'Assemblée, le budget sera considéré comme définitivement adopté et le gouvernement de Michel Barnier restera en place. Si cette motion est en revanche approuvée, grâce à une addition des voix de l'alliance de gauche et du Rassemblement national, ce dernier en faisant peser la menace, le gouvernement tombera, ce qui entraînera aussi le rejet du budget par l'Assemblée nationale.

S'ouvrirait alors une période d'incertitude politique et économique. La Constitution ne prévoit pas expressément le rejet du projet de loi de finances, mais le gouvernement - qu'il soit démissionnaire ou nouvellement mis en place - disposerait d'un joker pour que la France puisse continuer à fonctionner dès le 1er janvier de l'année prochainel'article 45 de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF), qui lui permettrait de s'appuyer sur un "projet de loi spéciale l'autorisant à continuer à percevoir les impôts existants" jusqu'au vote d'un PLF en bonne et due forme en début d'année. La loi organique indique, en outre, qu'"après avoir reçu l'autorisation de continuer à percevoir les impôts (...), le Gouvernement prend des décrets ouvrant les crédits applicables aux seuls services votés". 

...Ou encore une application par ordonnances ?

Dernière hypothèse : des débats qui se prolongeraient au-delà des 70 jours que la Constitution donne au gouvernement pour se prononcer sur le projet de loi de finances. L'article 47 de la Loi fondamentale prévoit que, dans ce cas, "les dispositions du projet [de loi de finances] peuvent être mises en vigueur par ordonnance". Cette année la fin du délai constitutionnel interviendra le 21 décembre à minuit.

Si le Parlement ne s'est pas prononcé dans un délai de soixante-dix jours, les dispositions du projet peuvent être mises en vigueur par ordonnance. Article 47 de la Constitution

Là encore, cela permettrait au pays de continuer à fonctionner, mais ce dispositif jamais utilisé jusque-là comporte un certain nombre d'incertitudes juridiques et serait considéré comme un contournement du Parlement par nombre d'élus. Par ailleurs, cette procédure n'écarterait pas le risque d'une motion de censure qui peut être provoquée, comme le prévoit l'article 49 alinéa 3 de la Constitution, ou spontanée, comme le prévoit l'alinéa 2 du même article 49. Si celle-ci venait à être adoptée, la France aurait un budget, mais temporairement plus de gouvernement.