Dans le cadre de l'examen du projet de budget de la Sécurité sociale, un amendement qui supprime la contribution sociale de solidarité des sociétés (C3S) a été adopté à l'Assemblée nationale. Un vote inattendu qui représente une perte de recettes de 5,4 milliards d'euros. Le président de la commission des affaires sociales, Frédéric Valletoux (Horizons), a demandé une "seconde délibération".
Il s'agissait, selon son propre auteur, d'un "amendement d'appel qui n'a[vait] pas vocation à être adopté" et ce pour "des raisons budgétaires évidentes". L'Assemblée nationale a voté par surprise, ce jeudi 6 novembre, un amendement de Charles Sitzenstuhl (Ensemble pour la République), présenté dans le cadre de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale 2026, qui supprime la contribution sociale de solidarité des sociétés (C3S).
La C3S est une contribution patronale qui touche les entreprises qui réalisent un chiffre d'affaires hors taxes d'au moins 19 millions d'euros. Son taux est de 0,16% du chiffre d'affaires. Sa suppression entrainerait une perte de recettes de 5,4 milliards d'euros pour la branche vieillesse, selon le rapporteur général du budget de la Sécurité sociale, Thibault Bazin (Droite républicaine).
Face à la portée de l'amendement et au trouble provoqué par cette adoption, le président de la commission des affaires sociales, Frédéric Valletoux (Horizons), a demandé une nouvelle délibération - c'est-à-dire un nouveau vote sur cet amendement, comme le permet le règlement de l'Assemblée nationale - à l'issue de l'examen de la partie "recettes" du projet de budget de la Sécurité sociale.
En présentant son amendement, Charles Sitzenstuhl ne voulait pas vraiment supprimer la C3S, ou "en tout cas pas cette année". L'élu du parti présidentiel souhaitait avant tout "que figure dans ce débat le sujet des impôts de production". "On est tous très nombreux à dire qu'il y a un problème majeur en France avec les impôts de production", a acquiescé le ministre chargé de la Fonction publique et de la Réforme de l'Etat, David Amiel, qui a également "remercié" le député du Bas-Rhin d'avoir engagé le débat par son amendement.
Mais le ministre a aussi rappelé que le gouvernement optait plutôt pour une baisse de la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) et a demandé au député de retirer sa proposition. Ce qu'a fait Charles Sitzenstuhl. Sauf que l'amendement a été "repris" à la volée par un autre député, ce qui a provoqué un vote.
L'amendement a finalement été adopté (117 pour, 113 contre, 10 abstentions) essentiellement grâce aux voix des élus du Rassemblement national (détail du scrutin à consulter ici), qui ont longuement applaudi le résultat. Dix députés de l'ex-majorité présidentielle ont, en outre, indiqué avoir commis une erreur lors du vote en se prononçant "pour" l'amendement, alors qu'ils voulaient voter "contre".
A l'issue de scrutin, Sandrine Rousseau (Ecologiste et Social) a interpellé le gouvernement afin de savoir combien la suppression de la C3S allait faire perdre de recettes au budget de la sécurité sociale. "C'est un amendement à cinq milliards", lui a répondu la ministre de la Santé, Stéphanie Rist, ajoutant : "Avec cet amendement, nous entrons dans une difficulté pour accompagner la trajectoire qui doit nous amener à un compromis."
"Heureusement qu'on en est qu'à la première lecture et qu'il y en a trois", a rappelé le raporteur général, Thibault Bazin (DR), qui estime que les députés "sont en train de déraper totalement". Selon lui, l'Assemblée nationale devra "corriger le tir parce que si on déséquilibre trop la branche vieillesse, ceux qui en paieront le prix ce sont nos retraités".
Comme annoncé par le président de la commission des affaires sociales, Frédéric Valletoux (Horizons), les députés auront l'occasion de revenir sur l'adoption de cet amendement lors d'une seconde délibération.