La proposition de loi visant à "modifier la définition pénale du viol et des agressions sexuelles", sera examinée ce mercredi 26 mars en commission, puis la semaine prochaine dans l'hémicycle de l'Assemblée nationale. L'objectif de ce texte, porté par Marie-Charlotte Garin (Ecologiste et Social) et Véronique Riotton (Ensemble pour la République), est d'intégrer la notion de "non-consentement" dans l'appréciation judiciaire des viols et des agressions sexuelles.
Mettre fin à une "culture d'impunité" en matière de viol, c'est tout l'objet de la proposition de loi portée par Marie-Charlotte Garin (Ecologiste et Social) et Véronique Riotton (Ensemble pour la République), qui sera examinée ce mercredi 26 mars par les députés de la commission des lois, puis la semaine prochaine dans l'hémicycle de l'Assemblée nationale.
Les élues ont travaillé le sujet dans le cadre d'une mission d'information qui leur avait été confiée, en janvier 2024, par la délégation aux droits des femmes du Palais-Bourbon. Des travaux sur la base desquels elles ont rédigé la proposition de loi visant à "modifier la définition pénale du viol et des agressions sexuelles", en y intégrant le critère de "non-consentement".
La mesure proposée par Marie-Charlotte Garin et Véronique Riotton est déjà appliquée dans 19 pays européens, parmi lesquels l'Espagne, avec l'entrée en vigueur en octobre 2022 de la loi "Sólo sí es sí" ("Seul un oui est un oui"). Sans pour autant inscrire la notion de consentement dans son droit, la France a ratifié, en 2011, la Convention du Conseil de l’Europe relative à la prévention et à la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique, dite Convention d’Istanbul, selon laquelle "le consentement doit être donné volontairement comme résultat de la volonté libre de la personne considérée dans le contexte des circonstances environnantes".
"Nos engagements internationaux et l’exemple de nos voisins européens nous invitent à changer de paradigme", considèrent les deux co-rapporteures dans l'exposé des motifs de leur proposition de loi. Ces dernières partant d'un constat, selon lequel la jurisprudence ne parviendrait toujours pas à combler le silence de la loi française sur la notion de consentement.
Et pour cause, l'interprétation des éléments matériels qui définissent le viol en l'état actuel du droit - à savoir la violence, la contrainte, la menace et la surprise -, ne permettrait pas de couvrir un large éventail de cas caractérisés par un état de sidération de la victime, une situation d’emprise, ou encore un abus de vulnérabilité. Or, si le juge est en incapacité de démontrer l’usage de la violence, la contrainte, la menace, ou la surprise, la condamnation pour viol s'avère légalement impossible. Si elles estiment nécessaires de préserver dans la loi les quatre critères actuellement en vigueur, les auteures du texte préconisent donc d'en introduire un cinquième, celui du consentement, précisant que la nouvelle définition doit intégrer que celui-ci est "spécifique, donné librement, et peut être retiré à tout moment".
A l'inquiétude qui a pu émerger quant à un éventuel effet pervers de la mesure qui consisterait en un surcroît de justification demandé aux victimes, Véronique Riotton a opposé une réponse claire : "Il n'y aura pas d'inversion de la charge de la preuve (...) On reste dans un système accusatoire". L'un des éléments majeurs d'appréciation de l'existence, ou non, du consentement sera constitué par les "circonstances environnantes", qui figurent dans la Convention d'Istanbul, afin d'éviter que l'investigation ne se concentre exclusivement sur la victime, et d'interroger davantage les agissements de la personne mise en cause, au regard en particulier de la situation de vulnérabilité dans laquelle la victime a pu être placée, ou dont l'auteur a profité.
Saisi par la présidente de l'Assemblée nationale, Yaël Braun-Pivet, pour avis sur le texte, le Conseil d’Etat a rendu ses conclusions le 6 mars. La plus haute juridiction administrative française juge que l'introduction du critère de non-consentement "indique que c’est chez l’auteur des faits qu’il faut rechercher s’il s’est assuré du consentement de l’autre". Et d'ajouter que la rédaction proposée "n’instaure pas davantage une présomption de défaut de consentement qui impliquerait une formalisation du recueil du consentement, voire une contractualisation entre les personnes". Des débats qui ne devraient cependant pas manquer de ressurgir lors de l'examen de la proposition de loi.