Parmi les textes à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale cette semaine, une proposition de résolution transpartisane portée par Laure Miller (Ensemble pour la République) visant à créer une commission d'enquête sur "les effets psychologiques de TikTok sur les mineurs".
Avec plus d'1,5 milliard d'utilisateurs dans le monde, le réseau social TikTok a vu son nombre d'adeptes exploser, en particulier chez les jeunes, depuis son lancement par l'entreprise chinoise ByteDance en 2016. Avec quels effets psychologiques pour ces jeunes alors que l'usage de TikTok peut se révéler particulièrement addictif et qu'ils peuvent être exposés à des contenus réputés dangereux pour eux ? C'est le sujet de la commission d'enquête transpartisane qui sera créée cette semaine, lors de l'adoption d'une proposition de résolution, portée par Laure Miller (Ensemble pour la République).
Alors que 35% des 7-12 ans détiennent un smartphone - chiffre qui culmine à 89% pour les 13-19 ans -, 45% des jeunes Français de 11-12 ans sont inscrits sur TikTok, a indiqué la rapporteure, Laure Miller, se fondant sur les données de l'Arcom, lors de l'examen de son texte en commission des affaires sociales mercredi 5 mars. En outre, 70% des utilisateurs de TikTok en France ont moins de 24 ans, et 40% des jeunes qui ont entre 16 et 25 ans utilisent TikTok quotidiennement. Des chiffres qui ne reflètent, en outre, qu'en partie l'audience particulièrement juvénile de cette application qui est, en principe, interdite en France aux moins de 13 ans.
Or, dans un contexte de dégradation de la santé mentale des jeunes particulièrement mise en lumière depuis la crise du Covid, le réseau social est notamment mis en cause dans le suicide de deux adolescentes de 15 ans, en 2021 et en 2023. Particulièrement pointés : son algorithme enfermant les utilisateurs dans le visionnage de certains contenus, sa politique de modération insuffisante, ses contenus hypersexualisés et violents, pouvant notamment favoriser des troubles alimentaires ou inciter à l'automutilation.
Des contenus qui au-delà même de leur objet, conduisent à un phénomène d'"addiction numérique" pointée par la proposition de résolution, qui vise à en examiner les ressorts et les risques concrets pour les jeunes.
Pour Laure Miller, le danger spécifique de TikTok réside dans le fait qu'il soit très peu réglementé, alors même qu'il cible en premier lieu un public d'adolescents, voire d'enfants. "Ce réseau social incarne un paradoxe particulièrement morbide puisqu'il confronte le public le plus vulnérable aux biais de fonctionnement les plus délétères", a déploré la députée lors de la présentation de sa proposition de résolution en commission, évoquant tour à tour "la faiblesse remarquable de la modération des contenus" et "à l'inverse, une amplification de l'exposition aux contenus violents, à caractère sexuel et relatifs à la souffrance psychique".
De nombreux cliniciens confirment que TikTok tend à exacerber les fragilités psychologiques des personnes les plus vulnérables. Texte de la proposition de résolution
"Outre les effets addictifs de la plateforme provoquant un déficit de sommeil, des troubles de l’attention, une sédentarité", l’algorithme pourrait aussi "avoir des conséquences encore plus dangereuses", la résolution citant les risques de harcèlement, d'anxiété et de dépression. TikTok est par ailleurs à l'origine de défis viraux susceptibles de mettre en danger la vie des plus jeunes utilisateurs, à l'instar du "Blackout Challenge", consistant à se priver d’air jusqu’à provoquer l’évanouissement.
Votée à l’unanimité en commission, la proposition de résolution sera examinée dans l’hémicycle en milieu de semaine et, sans aucun doute, adoptée. À terme et à l'issue de ses travaux d'enquête, la commission pourra proposer des mesures concrètes afin de mieux réguler l'usage de TikTok chez les jeunes et d'accroître la sécurité numérique des publics les plus vulnérables.