Énergie : l'Assemblée nationale vote pour la relance du nucléaire

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La centrale nucléaire de Civaux (Vienne)
La centrale nucléaire de Civaux, dans la Vienne (Daniel Jolivet - Flickr)
par Raphaël Marchal, le Mercredi 18 juin 2025 à 18:30, mis à jour le Mercredi 18 juin 2025 à 23:55

Les députés se sont majoritairement prononcés en faveur de la relance du nucléaire en rétablissant l'article 3 de la proposition de loi de programmation énergétique, ce mercredi 18 juin. Un vote qui conforte la stratégie du gouvernement qui s'est engagé à publier, "avant la fin de l'été", la feuille de route énergétique de la France pour les années à venir.

C'est l'article clé de la proposition de loi "portant programmation nationale et simplification normative dans le secteur économique de l’énergie". A l'issue d'un long débat, parfois électrique, qui s'est étalé sur deux jours, les députés ont approuvé, ce mercredi 18 juin, la relance du nucléaire, prévue l'article 3 de la proposition de loi "Gremillet", du nom du sénateur à l'initiative du texte. 

Au stade de la commission, cet article avait été supprimé du fait de l'adoption d'amendements contradictoires. C'est par un amendement de rétablissement du rapporteur Antoine Armand (Ensemble pour la République), préféré à un amendement du gouvernement, que cet article a retrouvé sa place dans le texte, par 163 voix contre 90 (détail du scrutin à consulter ici).

La rédaction approuvée par les députés est proche de la version précédemment retenue par les sénateurs. L'article 3 vise ainsi à tendre vers 27 gigawatts de nouvelles capacités installées de production d’électricité d’origine nucléaire à l’horizon 2050, avec le lancement de nouvelles constructions d'installations équivalent à au moins 10 gigawatts dès 2026.

Mardi soir, le ministre chargé de l'Industrie et de l’Energie, Marc Ferracci, avait rappelé que le gouvernement s'était déjà "engagé" à lancer la construction de six nouveaux réacteurs EPR2 et qu'il décidera "d'ici la fin de l'année 2026" s'il souhaite en construire huit supplémentaires.

Le texte prévoit, en outre, le maintien en fonctionnement des installations nucléaires existantes, avec une capacité équivalent à au moins 63 gigawatts. Contrairement à la version des sénateurs, la rédaction adoptée par les députés ne fait, en revanche, plus mention d'objectifs fixés en pourcentage de la part du nucléaire dans le mix de production électrique. Idem pour l’objectif d’engager la construction d’un petit réacteur modulaire (SMR) d’ici 2030, qui ne figure plus dans la version de l'Assemblée. 

Un débat engagé dans l'hémicycle

Sans surprise sur ce sujet particulièrement clivant, les débats ont été vifs et engagés, entraînant, à l'orée du vote, une mise au point d'Antoine Armand (Ensemble pour la République) décidé à "démonter" les "mensonges" provenant, selon ses mots, des bancs écologistes et insoumis, que ce soit concernant la dose minimale de contamination, l'action du gendarme du nucléaire, l'ASNR, ou encore sur la durabilité du béton des centrales.

"Nous avons un manque crucial de transparence de données", lui a rétorqué Aurélie Trouvé (La France insoumise). "C'est un choix de civilisation", a considéré la présidente du groupe LFI, Mathilde Panot, qui a fustigé contre "une folie qui nous engage pour des centaines de milliers d'années". Les députés socialistes ont, quant à eux, défendu une approche plus mesurée que leurs alliés de gauche. "Le nucléaire doit avoir sa juste place dans le mix energétique. Pas plus, pas moins", a ainsi plaidé Karim Benbrahim (PS).

De l'autre côté de l'hémicycle, les élus du Rassemblement national, qui défendaient une relance maximaliste du nucléaire, ont joint leur voix à celles du socle gouvernemental composé de la coalition présidentielle et de la droite. "Nos collègues écolo et d'extrême gauche s'enfoncent dans leur idéologie antinucléariste, hors-sol et deconnectée de la réalité", a estimé Maxime Amblard (RN). "Vous êtes des fanatiques de la peur, et comme tous les fanatiques, vous voulez que toute la société ait peur. Nous, nous n'avons pas peur", a renchéri Jean-Philippe Tanguy (RN).

Pour le gouvernement, le ministre de l'Industrie et de l'Energie, Marc Ferracci, a promis une "transparence sur les coûts". "Rien n'est obscur, rien n'est caché", a-t-il déclaré, avant d'évoquer un objectif de coût pour le nouveau nucléaire français fixé à 67 milliards d'euros.

Les députés poursuivent maintenant l'examen du texte, devant notamment encore examiner les articles relatifs aux réseaux électriques et aux énergies renouvelables. Avant un vote solennel sur l'ensemble de la proposition de loi prévu mardi prochain, le 24 juin.

Les députés votent pour la réouverture de Fessenheim

Dans la foulée du rétablissement de l'article 3, un amendement issu du groupe RN visant à rouvrir la centrale nucléaire de Fessenheim - fermée de manière "injustifiée" depuis 2020, selon Jean-Philippe Tanguy - a été voté "Certains ici, même en Macronie, savent que nous n'aurions jamais dû la fermer."

L'amendement a été adopté dans un hémicycle encore assez dépeuplé à la suite d'une suspension de séance, et ce malgré les avertissements du rapporteur, Antoine Armand (EPR), qui a rappelé que la centrale n'étais pas seulement à l'arrêt, mais "en cours de démantèlement".