Votée au Sénat en janvier, la proposition de loi visant à "lever les contraintes à l'exercice du métier d'agriculteur", qui prévoit la réintroduction d'un insecticide de la famille des néonicotinoïdes, sera examinée à l'Assemblée nationale fin avril. Pour cela, le gouvernement a décidé de décaler d'une semaine le début des débats sur les deux textes sur la fin de vie (soins palliatifs et aide à mourir), qui devraient finalement être étudiés à partir du 19 mai, et non plus du 12 mai.
Le nouveau calendrier doit être acté mardi prochain, 25 mars, lors de la Conférence des présidents de l'Assemblée nationale. L'examen des deux propositions de loi sur la fin de vie, la première portant sur les soins palliatifs et la seconde sur l'aide à mourir, va être repoussé d'une semaine, selon des informations de l'AFP et dont LCP a obtenu confirmation. Les textes devraient être étudiés les semaines des 19 et 26 mai, en lieu et place des 12 et 19 mai.
La raison d'un tel changement ? L'arrivée dans le calendrier parlementaire d'une proposition de loi visant à "lever les contraintes à l'exercice du métier d'agriculteur" votée au Sénat en janvier. Porté par les sénateurs Laurent Duplomb (Les Républicains) et Franck Menonville (Union centriste), le texte prévoit de réintroduire à titre dérogatoire et exceptionnel l'acétamipride, un insecticide de la famille des néonicotinoïdes interdit en France depuis 2018, mais autorisé ailleurs en Europe jusqu'en 2033. Le gouvernement avait rendu un avis de sagesse (ni favorable, ni défavorable) sur cette mesure au Palais du Luxembourg. Nocive pour les pollinisateurs, comme les abeilles, cette substance reste utilisée dans l'Union européenne notamment sur la betterave ou la noisette.
"Le gouvernement veut repousser encore l'examen du texte de loi sur la fin de vie... pour ouvrir la voie à la réintroduction des pesticides néonicotinoïdes ! Double faute. Les socialistes s'y opposeront" a réagi, ce jeudi 20 mars sur X, le président des députés PS, Boris Vallaud.
"Je trouve cela très dommageable. Le message envoyé avec ce décalage n'est pas un bon signe", réagit auprès de LCP la députée Annie Vidal (Ensemble pour la République), rapporteure de la proposition de loi sur les soins palliatifs, qui n'avait pas été informée en amont de ce changement à venir. "Si on s'en tient à un décalage d'une semaine, ce n'est pas dramatique, mais il faudrait à mon sens qu'on sanctuariser ces deux semaines", des 19 et 26 mai, estime l'élue du parti présidentiel, pour qui "quelle que soit la position que l'on porte sur l'ouverture d'un nouveau droit, le débat doit avoir lieu".
Egalement interrogée par LCP, la députée et ex-ministre de la Santé, Agnès Firmin Le Bodo, qui avait participé à l'élaboration du projet de loi initial sur la fin de vie considère que "cela prouve que François Bayrou ne veut pas" de l'aide à mourir et craint que "le texte ne soit pas adopté d'ici la fin du quinquennat" d'Emmanuel Macron.
La proposition de loi sur le métier d'agriculteur devait arriver la semaine du 7 avril, mais l'embouteillage parlementaire a contraint le gouvernement à repousser son examen, au grand dam de ses soutiens, parmi lesquels les principaux syndicats agricoles : les Jeunes Agriculteurs et la FNSEA. Mardi, le président de la FNSEA, Arnaud Rousseau, avait déploré "l'incertitude" autour de ce texte, tandis le rapporteur de celui-ci à l'Assemblée, Julien Dive (apparenté Droite républicaine), s'était alarmé des rumeurs de report fin mai, qui laisserait, selon lui, "des filières définitivement en situation d'impasse pour la campagne 2025".
La Confédération paysanne, troisième syndicat, y est de son côté opposée, comme nombre d'associations environnementales, ainsi que les parlementaires de gauche. "On se prépare à la guerre", souligne une députée écologiste, citée par l'AFP. "L'effondrement de la biodiversité n'est apparemment pas assez rapide, donc la droite accélère !", avait critiqué le sénateur écologiste Daniel Salmon après le vote de janvier.
Pour pouvoir inscrire ce texte au programme du Palais-Bourbon, le gouvernement - qui partage la fixation de l'ordre du jour avec l'Assemblée - a décidé de reprendre à son compte la semaine du 28 avril, contrairement à une décision prise précédemment, renonçant en retour à la semaine du 12 mai, qui devait jusque-là permettre de commencer l'examen des propositions de loi sur la fin de vie. L'ordre du jour est partagé entre le gouvernement, qui dispose de deux semaines par mois, et l'Assemblée nationale qui fixe son programme législatif une semaine par mois, la dernière étant consacré à sa mission de contrôle.