Le Nouveau Front populaire chiffre son programme à 150 milliards d'ici à 2027, assurant qu'il sera équilibré par des recettes équivalentes

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Eric Coquerel lors de la conférence de presse de chiffrage du programme du Nouveau Front populaire, le 21 juin 2024
Eric Coquerel (LFI) lors de la conférence de presse de chiffrage du programme du Nouveau Front populaire, le 21 juin 2024 - LCP
par Soizic BONVARLET, le Vendredi 21 juin 2024 à 18:55, mis à jour le Jeudi 27 juin 2024 à 11:10

Le Nouveau Front populaire a présenté lors d'une conférence de presse, vendredi 21 juin, le chiffrage de son programme "de rupture". Après de nombreuses critiques, notamment de la part de la coalition présidentielle - et des débats internes à l'alliance de gauche - les représentants du NFP, entourés de plusieurs économistes, ont argué d'un projet à l'équilibre grâce à de nouvelles recettes fiscales et à l'enclenchement d'un "cercle vertueux". 

Un programme qui donne la priorité "au pouvoir d'achat, aux services publics et à la bifurcation écologique", et donne toute sa place à un "Etat stratège", c'est ainsi que les représentants du Nouveau Front populaire (NFP) ont résumé leur ambition, ce vendredi 21 juin, lors d'une conférence de presse à Paris. Pour l'alliance de gauche, il s'agissait de répondre aux critiques dénonçant la perspective d'un dérapage des finances publiques, ainsi que d'un "matraquage fiscal", critique formulée par le Premier ministre lui-même. Avec aussi un enjeu de clarification, alors que le chiffrage du projet et du périmètre de certaines mesures, notamment au sujet des retraites, ont fait débat au sein même du NFP ces derniers jours. 

Smic, retraites, logement, école et point d'indice des fonctionnaires

Abrogation des reformes des retraites et de l'assurance chômage, hausse du SMIC à 1600 euros net et du point d'indice des fonctionnaires de 10% : le Nouveau Front populaire avait déjà détaillé les mesures prioritaires qu'il souhaitait mettre en œuvre. Mais c'est le coût estimé de ces mesures qui est désormais connu : 25 milliards d'euros pour 2024, a indiqué Alexandre Ouizille (Parti socialiste). Le sénateur a précisé que ce chiffrage comprenait également la gratuité intégrale de l’Éducation nationale et l'augmentation des aides pour le logement de 10%.

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"Il y a dans notre pays de l'argent oisif, de l'argent improductif", a poursuivi Alexandre Ouizille, évoquant comme sources de recettes la réinstauration de l'ISF avec une composante climatique, qui rapporterait "15 milliards d'euros", ainsi que, pour le même montant, la taxation des superprofits.

Evoquant le levier fiscal pour générer des recettes, Eric Coquerel (La France insoumise) a pour sa part mis en avant la réforme du barème de l'impôt sur le revenu, soulignant que "92% des Français ne [verraient] pas leur fiscalité transformée". Avançant le chiffre de "100 milliards d'euros" de dépenses publiques nouvelles d'ici à 2025, avec un bond significatif pour cette échéance au vu qu'il s'agira d'une année pleine, il a énuméré comme sources de recettes "la suppression des niches fiscales injustes", "l'impôt sur les plus hauts patrimoines", ou encore "la suppression de la flat tax". Au total, le document de présentation annonce "100 milliards de rentrées fiscales nouvelles" au même stade de l'application du programme. 

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Sur l'objectif prôné par La France insoumise d'un retour à la retraite à 60 ans, le président sortant de la commission des Finances de l'Assemblée nationale a formé le vœu d'"une grande loi avant 2027" en lien avec les partenaires sociaux.

"Une recette face à chaque dépense"

Fixant une troisième borne à 2027 avec un chiffrage total du programme à "150 milliards d'euros" de dépenses d'ici à cette échéance, Alexandre Ouizille, établissant une étape "autour de 125 milliards" d'ici à 2026, a souligné la "proximité" de ces calculs avec celui qui avait été établi par Valérie Rabault, en partie remis en cause par La France insoumise qui le trouvait insuffisant. Le chiffrage de l'ancienne rapporteure générale du budget à l'Assemblée nationale avait évalué l'effort à 106 milliards en n'intégrant, concernant les retraites, que l'abrogation de la réforme de l'an dernier.

Sur la possibilité d'un accroissement des déficits, le sénateur socialiste a, par ailleurs, affirmé que les recettes envisagées avaient vocation à "couvrir" les dépenses. Même tonalité de la part de l'économiste, professeure à Sciences Po et proche de la coalition de gauche, Julia Cagé, qui a fait valoir la "crédibilité" du programme avec "des recettes mises en face de chaque dépense". Et de fustiger au passage la politique "anti-redistributive" du Rassemblement national, et son inaptitude à dégager des recettes au vu de ses éléments programmatiques.

Eloi Laurent, membre de l'Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE), a, pour sa part, remis en cause le concept de "crédibilité" réelle ou supposée en matière économique, dont il a estimé qu'elle pouvait s'avérer "exterminatrice", lui préférant celui de "cohérence", et rappelant la théorie keynésienne selon laquelle "une dépense sociale peut devenir un investissement (...) peut être efficace économiquement".