Les députés ont adopté à l'unanimité le projet de loi spéciale, en première lecture, ce lundi 16 décembre. Le texte - qui vise à "assurer la continuité de la vie nationale et le fonctionnement régulier des services publics", dans l'attente d'un budget 2025 en bonne et due forme en début d'année prochaine - va maintenant être transmis au Sénat, où il pourrait être définitivement adopté dès mercredi, si le texte est voté sans modification par rapport à la copie de l'Assemblée nationale.
Le projet de loi spéciale a franchi une première étape décisive, ce lundi 16 septembre. Le texte a été adopté par l'Assemblée nationale en première lecture, à l'unanimité des 481 votants, les députés de La France insoumise s'étant abstenus. Il va désormais être transmis au Sénat, où il sera examiné en séance publique mercredi 18 décembre.
Le projet de loi spéciale, indispensable pour le fonctionnement du pays, a pour objet de permettre à l’Etat de continuer à percevoir les impôts existants, en l'absence de budget voté en bonne et due forme avant la fin de l'année, pour une entrée en vigueur au 1er janvier de l'année prochaine. "C'est un texte technique, sans portée politique, qui vise uniquement à permettre d'éviter une discontinuité budgétaire", a martelé le ministre de l’Economie et des Finances du gouvernement démissionnaire, Antoine Armand.
Après ce texte d'urgence présenté en raison de l'impossibilité politique de faire voter un véritable projet de loi de finances avant la fin 2024, un budget devra être voté début 2025 pour permettre un fonctionnement plein et entier du pays pour le reste de l'année. "La Loi spéciale est une roue de secours, on a absolument besoin d'un budget. Elle ne résout en rien l'incertitude dans laquelle nous a plongé la censure de Michel Barnier", a déclaré l'ancien ministre chargé des Comptes publics, Thomas Cazenave (Ensemble pour la République), la semaine dernière.
Le principal débat a porté sur la question de l'indexation sur l'inflation du barème de l'impôt sur le revenu (IR). Le matin, la présidente de l'Assemblée nationale, Yaël Braun-Pivet, avait déclaré irrecevables les amendements visant à voter cette indexation dès la loi spéciale. Une décision prise conformément à l'avis du Conseil d'Etat, qui avait estimé la semaine dernière que cette mesure sortait du champ très limité d'un tel texte. Une analyse soutenue par les élus du bloc central, à l'instar de Perrine Goulet (Les Démocrates), mais aussi par le rapporteur général du budget, Charles de Courson (LIOT).
Yaël Braun-Pivet "a préféré abuser de son pouvoir pour faire payer aux Françaises et aux Français la censure", a pour sa part cinglé Aurélien Le Coq (La France insoumise). "On a le droit encore dans notre République de dire qu'on n'est pas d'accord avec le Conseil d'Etat", a également jugé Jean-Philippe Tanguy (Rassemblement national), qui a rappelé que l'avis "consultatif" de la juridiction ne valait pas décision juridique. "Je décide en droit", avait répondu plus tôt dans la journée la présidente de l'Assemblée dans un message publié sur X (ex-Twitter).
Soucieux de ne lancer "aucune polémique" sur la décision de Yaël Braun-Pivet, le président de la commission des finances, Eric Coquerel (LFI), a toutefois considéré qu'une autre décision aurait été possible, quitte à aller quérir l'avis du Conseil constitutionnel qui aurait, par ailleurs, pu être amené à trancher en dernière instance.
Quoi qu'il en soit, l'indexation sur l'inflation du barème de l'impôt sur le revenu faisant consensus sur le principe, si ce n'est sur le véhicule législatif, tous les groupes parlementaires ont indiqué que cette mesure sera votée en début d'année prochaine pour éviter aux contribuables une augmentation mécanique de leur IR du simple fait de l'inflation. Que ce soit dans le cadre du projet de loi de finances 2025 qui devra être présenté en début d'année prochaine, solution privilégiée par l'exécutif et le bloc central. Ou dans un texte qui serait destiné à porter quelques mesures consensuelles comme l'extension du prêt à taux zéro et les mesures de soutien aux agriculteurs. Une solution défendue par Charles de Courson (LIOT) et Eric Coquerel (LFI). En tout état de cause, compte tenu des engagements pris, les contribuables ne seront pas pénalisés.
Au cours de la discussion dans l'hémicycle, plusieurs amendements ont été adoptés. Le principal d'entre eux, défendu par Stéphane Delautrette (Socialistes) vise à garantir les prélèvements sur les recettes de l'Etat au profit des collectivités. Une proposition jugée superfétatoire par le rapporteur général et par le gouvernement, son objet étant déjà garanti par l'article premier du texte, mais qui a tout de même été votée.
Si le projet de loi spéciale est voté par le Sénat sans modification par rapport à la copie de l'Assemblée, le texte sera immédiatement considéré comme définitivement adopté par le Parlement. Dans le cas contraire, une commission mixte paritaire (CMP) sera réunie pour tenter d'harmoniser les versions des deux Chambres. Que cette procédure de conciliation soit conclusive, ou qu'une nouvelle navette entre l'Assemblée nationale et le Sénat soit nécessaire, la loi spéciale sera entérinée et promulguée avant la fin de l'année 2024 pour une application au premier jour de l'année 2025.