L'Assemblée nationale a terminé l'examen de la proposition de loi visant à "sortir la France du piège du narcotrafic" dans la nuit du jeudi 27 au vendredi 28 mars. Le texte, qui crée notamment un parquet national spécialisé et un nouveau régime de détention pour les plus gros trafiquants, fera l'objet d'un vote solennel mardi 1er avril.
Cette fois-ci, les députés sont parvenus au bout. L'Assemblée nationale a achevé, dans la nuit du jeudi 27 au vendredi 28 mars, l'examen de la proposition de loi visant à "sortir la France du piège du narcotrafic". Le texte vise, selon le ministre de l'Intérieur, Bruno Retailleau, à lutter contre la "menace existentielle" que représente le trafic de stupéfiants. Les députés se prononceront sur l'ensemble de la proposition de loi, lors d'un vote solennel qui aura lieu dans l'hémicycle, mardi 1er avril, une semaine après le calendrier initialement fixé, les débats ayant été plus longs que prévus.
Issue d'une initiative sénatoriale, cette proposition de loi crée notamment un nouveau parquet spécialisé, qui se saisira des affaires concernant les trafiquants les plus dangereux. Ce parquet national anti-criminalité organisée (Pnaco), qui aura aussi une "fonction d'incarnation", pourrait voir le jour dès le début de l'année 2026, a expliqué le ministre de la Justice, Gérald Darmanin.
Le texte crée aussi un nouveau régime de détention particulièrement strict, qui sera réservé aux 700 à 800 détenus jugés les plus dangereux. Mis en œuvre dans les quartiers de haute sécurité qui doivent voir le jour à Vendin-le-Vieil (Pas-de-Calais) et Condé-sur-Sarthe (Orne). ce nouveau régime aura pour but de rompre le lien entre le détenu et "le réseau criminel auquel il appartient", a expliqué le président de la commission des lois, Florent Boudié (Ensemble pour la République).
D'une durée de deux ans renouvelable, ce régime, qualifié de "difficile" par Gérald Darmanin, permettra de restreindre l'usage du téléphone pour ces détenus, de mettre en place des parloirs par hygiaphone, ou encore de favoriser le recours à la visioconférence pour les actes de procédures, afin de limiter les risques d'évasion. Un dispositif qualifié de "fabrique à fous" par la gauche mais soutenu par Les Républicains et le Rassemblement national, qui, par la voix de Romain Baubry (RN), a estimé que ce dispositif permettra "de mettre hors d'état de nuire des individus dangereux".
Alors que la disposition avait été supprimée en commission des lois, les députés ont rétabli la création du "dossier-coffre", un "procès-verbal distinct" qui sera inaccessible aux avocats de la défense. Jugé "essentiel et vital" par Bruno Retailleau, il pourra être utilisé dans les dossiers liés à la criminalité organisée, dès lors que la vie ou l'intégrité physique d'une personne (enquêteur, informateur) sera "gravement en danger", a expliqué l'un des rapporteurs du texte, Vincent Caure (Ensemble pour la République). La mesure a été critiquée par les députés de gauche, Ugo Bernalicis (La France insoumise) dénonçant un article qui "jette l'opprobre sur la profession d'avocat".
Ce lundi soir, l'Assemblée nationale a adopté un amendement d'Olivier Marleix (Droite républicaine) visant à instaurer une automaticité de la peine complémentaire d'interdiction du territoire français pour les étrangers condamnés à cinq ans de prison pour trafic de stupéfiants, sauf décision motivée du juge. Dans la foulée, les députés ont adopté un autre amendement du député d'Eure-et-Loir visant à "sanctionner plus sévèrement les trafiquants qui exploitent des mineurs, en introduisant une circonstance aggravante spécifique".
Au cours des débats, la semaine dernière, les députés ont refusé l'accès aux messageries chiffrées lors des enquêtes, malgré les demandes répétées de Bruno Retailleau. "La cavale de Mohamed Amra a duré neuf mois : avec cette technique, elle aurait duré deux fois moins", a plaidé le ministre de l'Intérieur, qui estime que cette décision de l'Assemblée risque de "désarmer les services". Les élus ont toutefois approuvé l'utilisation de deux autres techniques spéciales d'enquête en matière de criminalité organisée, en approuvant les interceptions satellitaires et en prolongeant l'expérimentation de la surveillance algorithmique.
Le texte comporte, en outre, des dispositions visant à "taper au portefeuille des délinquants". Il en va ainsi de la fermeture administrative des commerces et locaux en lien avec le narcotrafic. Parmi les nombreuses autres dispositions de la proposition de loi, figurent également l'expulsion locative facilitée des narcotrafiquants, la refonte du statut de repenti, ainsi que diverses nouvelles infractions pénales destinées à lutter contre le narcotrafic.