Néonicotinoïdes, méga-bassines, élevages : la loi agricole "Duplomb" en passe d'être définitivement adoptée par l'Assemblée

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Agriculture blé PxHere 10/02/2025
image d'illustration (© PxHere)
par Raphaël Marchal, le Lundi 7 juillet 2025 à 19:17

L'Assemblée nationale va définitivement adopter, ce mardi 8 juillet, la proposition de loi Duplomb qui vise à "lever les contraintes à l'exercice du métier d'agriculteur". Le texte, qui a fait l'objet d'un accord entre députés et sénateurs en commission mixte paritaire (CMP), a déjà été approuvé par le Sénat le 2 juillet.

Ce sera son ultime étape parlementaire. Ce mardi 8 juillet, les députés vont définitivement adopter la proposition de loi "visant à lever les contraintes à l'exercice du métier d'agriculteur". Le texte des sénateurs Laurent Duplomb (Les Républicains) et Franck Menonville (Union centriste) avait fait l'objet de négociations conclusives entre les parlementaires des deux Chambres réunis en commission mixte paritaire (CMP), le 30 juin dernier. L'accord a déjà été validé dans la foulée, le 2 juillet, au Palais du Luxembourg.

Au vu des forces en présence au Palais-Bourbon, la proposition de loi devrait franchir sans coup férir cette ultime étape. Et ce malgré l'opposition des groupes de gauche, qui fustigent les "reculs environnementaux" du texte. Réintroduction à titre dérogatoire de l'acétamipride, un pesticide de la famille des néonicotinoïdes qui avait été interdit en France, accélération de la construction des ouvrages de stockage d'eau, relèvement des seuils d'autorisation environnementale pour les élevages intensifs... Autant de "lignes rouges" franchies selon la gauche.

La proposition de loi, particulièrement soutenue par la ministre de l'Agriculture, Annie Genevard, a fait débat jusqu'au sein du gouvernement. "J’ai perdu sur l’acétamipride, mais les conditions de réintroduction [de cet insecticide néonicotinoïde] sont extrêmement encadrées. Je doute qu’il bénéficie à beaucoup d’exploitations", a réagi la ministre de la Transition écologique, Agnès Pannier-Runacher, dans un entretien au Monde. Tout en estimant que le reste du texte ne marquait pas de "recul" environnemental.

Le texte est très largement soutenu par les groupes du "socle gouvernemental" (coalition présidentielle et droite), ainsi que par le Rassemblement national. "Ce texte ne répond pas à tout, mais il prend en compte des réalités de terrain, tout en maintenant les grands équilibres tracés ces dernières années en matière de souveraineté et de transition", avait déclaré l'ex-ministre l'Agriculture, et actuel président du groupe Les Démocrates, Marc Fesneau, à l'issue de la CMP.

L'examen de la proposition de loi à l'Assemblée a été marqué par le vote d'une motion de rejet préalable à front renversé, soutenue par les partisans du texte désireux de s'opposer à "l'obstruction" de la gauche, matérialisée par un grand nombre d'amendements. A contrario, les opposants à la proposition de loi ont grondé contre cette manœuvre, qui représente selon eux un détournement de la procédure parlementaire.

L'acétamipride, un sujet particulièrement clivant

La principale mesure du texte est aussi la plus controversée : la réintroduction à titre dérogatoire de l'acétamipride, dont l'usage est interdit en France depuis 2020, mais pas ailleurs en Europe. L'insecticide pourra être utilisé en cas d'alternative insuffisante, avec une clause de revoyure à trois ans. Les producteurs de noisettes, betteraves, et kiwis pourraient notamment se positionner.

Autre volet de la proposition de loi : les stockages d'eau, qui bénéficieront d'une présomption d’intérêt général majeur. Sont concernées les retenues collinaires et les "méga-bassines", popularisées par la contestation d'un projet à Sainte-Soline, qui avait donné lieu à des affrontements particulièrement violents entre opposants et forces de l'ordre.

Par ailleurs, le texte prévoit de relever les seuils à partir desquels les élevages de porcs et de volailles doivent être soumis à des procédures d’évaluation environnementale. Une énième mesure qui concerne une minorité d'agriculteurs, tancent les opposants au texte.

Les dispositions du texte ont été saluées par le principal syndicat agricole, la FNSEA, qui avait activement participé au mouvement de mobilisation des agriculteurs. Elles entreront en vigueur à condition d'avoir été validées au préalable par le Conseil constitutionnel, dont la saisine a déjà été annoncée par les parlementaires de gauche.