PLFSS 2024 : l'incitation à la fraude sociale bientôt punie de 2 ans d'emprisonnement et 30.000 euros d'amende

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Elisabeth Borne recourt au 49.3 sur le PLFSS 2024
Elisabeth Borne recourt au 49.3 sur le PLFSS 2024. LCP
par Maxence Kagni, le Jeudi 26 octobre 2023 à 17:40, mis à jour le Jeudi 26 octobre 2023 à 18:03

Le gouvernement, qui a engagé mercredi 25 octobre sa responsabilité sur le volet "recettes" du projet de loi de financement de la Sécurité sociale 2024, a sélectionné environ 80 amendements à intégrer au texte. Ils seront adoptés, en première lecture, si les motions de censure de La France insoumise et du Rassemblement national sont rejetées.

Vers un délit spécifique destiné à sanctionner pénalement l'incitation publique à la fraude sociale. C'est l'une des nouveautés du projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour l'année 2024. Mercredi 25 octobre, Elisabeth Borne a engagé la responsabilité du gouvernement sur le volet "recettes" du texte. 

L'exécutif a retenu 78 amendements qui seront intégrés au texte, sauf si l'une des motions de censure présentées par La France insoumise ou le Rassemblement national est adoptée, ce qui sera impossible sans le soutien des Républicains qui n'ont pas, à ce stade, l'intention de faire tomber le gouvernement. Ces amendements portent notamment une réforme de la fiscalité des travailleurs indépendants ou encore la création d'un nouveau délit d'incitation à la fraude sociale.

Délit d'incitation à la fraude sociale 

"Il est insupportable que certains ne se contentent pas de frauder, mais se vantent d’inciter les autres à le faire et, pire encore, d’en faire commerce" a martelé mardi, dans l'hémicycle de l'Assemblée nationale, le ministre délégué chargé des Comptes publics, Thomas Cazenave. Le gouvernement a donc décidé de profiter du PLFSS pour créer, via un amendement, un nouveau délit d'incitation publique à la fraude sociale, puni de deux ans d'emprisonnement et de 30.000 euros d'amende.

Ce délit sanctionnera l'incitation, par "quelque moyen que ce soit", à :

  • "se soustraire à l’obligation de s’affilier à un organisme de sécurité sociale",
  • "se soustraire à la déclaration et au paiement des cotisations et contributions sociales dues",
  • Ainsi que le fait d'"obtenir frauduleusement le versement de prestations, allocations ou avantages servis par un organisme de protection sociale".

De plus, les personnes qui mettront "à disposition, à titre gratuit ou onéreux, un ou plusieurs moyens, services, actes ou instruments juridiques, comptables, financiers, ou informatiques" permettant de réaliser une fraude seront sanctionnées de trois ans d'emprisonnement et 250.000 euros d'amende. La peine sera portée à cinq ans d'emprisonnement et 500.000 euros d'amende lors que le délit sera réalisé "en utilisant un service de communication au public en ligne".

L'amendement Guedj-Ferracci remplacé

En revanche, le gouvernement n'a pas conservé l'amendement sur les cotisations sociales patronales de Marc Ferracci (Renaissance) tel qu'il avait pourtant été adopté en commission des affaires sociales. Cet amendement proposait de supprimer la réduction de cotisations familiales pour les entreprises (dit "bandeau famille") sur les salaires compris entre 2,5 Smic et 3,5 Smic. Une mesure issue d'un rapport transpartisan mené par le député de la majorité et le député socialiste Jérôme Guedj. 

Finalement, le gouvernement lui a substitué une autre mesure proposée par Marc Ferracci : celle-ci vise à geler les seuils du "bandeau famille" et du "bandeau maladie" (une autre exonération de cotisations sociales patronales) en les fixant en euros et non plus en multiples du Smic. En effet, puisque l'inflation entraîne une hausse mécanique du salaire minimum, de plus en plus de salaires entrent dans le champ des réductions de cotisation : 2,5 Smic équivalaient à 3974 euros en 2021, contre 4368 euros aujourd'hui.

Le gel des plafonds va donc "générer des économies progressivement", explique à LCP Marc Ferracci. Ce gel empêchera à de nouveaux hauts salaires d'entrer dans le dispositif : la mesure devrait "éviter une perte de recettes de l’ordre de 600 millions d'euros pour la Sécurité sociale", a estimé mardi le ministre délégué chargé des Comptes publics. "Cela sera potentiellement plus les années suivantes", précise Marc Ferracci, qui reconnaît toutefois une "philosophie" différente de sa proposition initiale. Cette dernière aurait rapporté la somme d'1,6 milliard d'euros, fléchée vers de nouvelles exonérations sur les bas salaires. Cela ne sera pas le cas avec l'amendement retenu par le gouvernement.

Travailleurs indépendants

Par ailleurs, un amendement prolonge l'expérimentation de la modulation des cotisations sociales des travailleurs indépendants en temps réel, tandis qu'un autre réforme les "assiettes des cotisations et contributions de Sécurité sociale des travailleurs indépendants afin de renforcer l’équité de leurs prélèvements sociaux avec les salariés et d’augmenter leurs droits retraite". Le gouvernement sera également habilité à prendre "les ordonnances nécessaires pour assurer la complète mise en œuvre de la réforme".

Le gouvernement a également conservé un amendement de Nicolas Turquois (Démocrate), qui vise à permettre aux personnes non salariées qui "développent des activités de production agricoles dites 'innovantes' sur des très petites surfaces" de bénéficier d'une "couverture sociale complète".