Sécurité sociale : derrière les chiffres du PLFSS 2024, des mesures très concrètes

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Logo de la Sécurité sociale. © AFP
par Maxence KagniLéonard DERMARKARIAN, le Lundi 23 octobre 2023 à 08:10

Renforcement des contrôles des arrêts maladie, préservatifs gratuits pour les moins de 26 ans, médicaments délivrés à l’unité en cas de rupture d’approvisionnement, lutte contre la précarité menstruelle... Au-delà des chiffres, le projet de loi de financement de la Sécurité sociale contient des mesures très concrètes. Tour d'horizon avant le coup d'envoi de l'examen du PLFSS dans l'hémicycle de l'Assemblée nationale. 

"Poursuivre l'investissement et la transformation du système de santé." Voilà, selon le ministre de la Santé et des Solidarités, Aurélien Rousseau, l'ambition du projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) pour l'année 2024. Un avis que ne partagent pas les oppositions de gauche et le Rassemblement national, qui dénoncent une "politique d'austérité".

Après avoir été rejeté en commission, le PLFSS sera examiné dans l'hémicycle de l'Assemblée nationale à partir de mardi 24 octobre avec, déjà, la perspective d'un recours au 49.3, le gouvernement ne disposant que d'une majorité relative, insuffisante pour faire adopter les budgets, qu'il s'agisse de celui de l'Etat ou de la Sécu. Au-delà des chiffres et des grands équilibres du texte (à retrouver ici), tour d'horizon des principales mesures. 

Campagne de vaccination contre le papillomavirus au collège

Le PLFSS permet notamment le financement de la campagne nationale de vaccination gratuite contre les infections à papillomavirus humais (HPV) pour l'ensemble des élèves de cinquième. Cette campagne, annoncée par Emmanuel Macron le 28 février 2023, a commencé en octobre.

Gratuité des préservatifs pour les moins de 26 ans

Le texte propose d’inscrire dans le droit la prise en charge par l’Assurance maladie de la délivrance en pharmacie de préservatifs aux jeunes de moins de 26 ans. Cette mesure, qui s'applique actuellement à deux marques de préservatifs, est déjà mise en œuvre par les caisses d’Assurance maladie depuis le 1er janvier 2023. En commission, les députés ont adopté un amendement indiquant que les préservatifs féminins sont pleinement concernés par le dispositif. 

La lutte contre la précarité menstruelle 

Le remboursement des protections menstruelles réutilisables (des culottes et coupes menstruelles) pour les femmes de moins de 26 ans et les bénéficiaires de la complémentaire santé solidaire sans limite d'âge fait également partie des mesures prévues par le projet de loi. Les assurées de moins de 26 ans bénéficieront d’une prise en charge à hauteur de 60 % par l’Assurance maladie et leur participation pourra être compensée par les organismes complémentaires. Les bénéficiaires de la C2S bénéficieront, quant à elles, d’une prise en charge à 100 % pour ces protections hygiéniques.

Arrêts de travail, téléconsultations : vers un renforcement des contrôles

L'article 27 du PLFSS 2024 a été vivement critiqué par plusieurs groupes d'opposition qui ont tenté, sans succès, de supprimer cet article prévoyant un renforcement des contrôles des arrêts maladies - une mesure défendue comme nécessaire par le gouvernement "face à la très forte dynamique des dépenses d’indemnités journalières maladie observée ces dernières années (16 Md€ en 2022 contre 11 Md€ en 2010)", selon les chiffres du ministère de l'Economie.

L'article prévoit "de renforcer les modalités de contrôle tant des prescripteurs que des assurés pour, in fine, éviter tout arrêt de travail qui ne serait pas, ou plus, médicalement justifié". Une "mesure scandaleuse" pour François Ruffin (La France insoumise), tandis que Nicolas Turquois (Démocrate) a, au contraire, estimé qu'il fallait "questionner" des pratiques jugées abusives.

Dans le sillage de l'article 27, l'article 28 prévoit un renforcement des contrôles en matière de téléconsultations. Il ne sera ainsi plus possible de bénéficier en téléconsultation d’un arrêt de travail d’une durée supérieure à trois jours ou du renouvellement d’un arrêt de travail. Avec deux exceptions : lorsque que les prescriptions sont réalisées par le médecin traitant, ou si le patient justifie d’une impossibilité d’obtenir une consultation en présentiel pour le renouvellement de son arrêt de travail.

Une "double peine", selon le député écologiste Sébastien Peytavie (Ecologiste), alors que les médecins sont amenés à refuser de nouveaux patients dans certains territoires face à la désertification médicale, selon une récente étude de la Drees. La mesure proposée par le gouvernement et la majorité est, en revanche, soutenue par Les Républicains, à l'image de Yannick Neuder : "Notre intérêt de législateur, c'est d'éviter la fraude et de ne pas consommer du temps médical là où c'est inutile."

Pénuries de médicaments : rôle accru des pharmacies et délivrance à l'unité

Alors que la France connaît des pénuries de médicaments, plusieurs dispositions du projet de loi de financement de la Sécurité sociale, prévoient, selon la rapporteure du texte Stéphanie Rist (Renaissance), "d'apporter des mesures nouvelles pour permettre de pallier les pénuries de médicaments", notamment l'article 32 établissant la création de "préparations officinales spéciales" pour suppléer la production hospitalière de médicaments. L'article 33 prévoit quant à lui d'autoriser la délivrance à l'unité d'antibiotiques et de "limiter ou interdire la prescription de certains médicaments concernés par [une] rupture d’approvisionnement" afin, selon l'exposé des motifs de l'article, d'éviter la constitution de "stocks de précaution à domicile".

Certificats médicaux : vers une délivrance par de nouveaux professionnels de santé

Dans la lignée d'un décret paru fin août rappelant le caractère non-obligatoire du certificat médical pour exercer une activité sportive, les députés ont adopté un amendement de Stéphanie Rist (Renaissance) autorisant une expérimentation, sur les trois prochaines années, de la délivrance des certificats sportifs par d'autres professionnels de santé (infirmiers, kinésithérapeutes) que les médecins, dont l'activité est parfois congestionnée par ces demandes. Une mesure qui a suscité un certain scepticisme chez Yannick Monnet (Gauche démocrate et républicaine) et Yannick Neuder (Les Républicains).

Renforcement des bilans de prévention

A l'instar du projet de loi de financement de l'année dernière, le texte prévoit d'accroître les efforts en matière de prévention - un domaine où la France a des "résultats globalement médiocres", selon un rapport de la Cour des Comptes paru en 2021. Plusieurs amendements ont ainsi été adoptés pour renforcer le dépistage de certaines infections comme le cytomégalovirus ou favoriser la prévention de la surdité.

Dépression post partum : expérimentation d'un parcours de soins dédié

D'après une enquête de Santé publique France de 2021, "16,7 % des femmes présentent des symptômes suggérant une dépression post partum". Si celle-ci commence à connaître un écho médiatique, sa prise en charge reste lacunaire, selon Frédéric Valletoux (Horizons) qui a défendu et obtenu, en commission, l'adoption d'un amendement visant à expérimenter sur une durée de trois ans un parcours de soins dédié, piloté par les Agences régionales de santé, notamment en "[systématisant] l’information des femmes sur la dépression post partum, sur les possibilités de traitement ou d’intervention et sur les dispositifs de suivi médical et d’accompagnement psychologique disponibles".