Réintégration des soignants non-vaccinés : La niche LFI s'éteint dans une ambiance houleuse

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Les députés de l'opposition quittent l'hémicycle avant la fin de la séance, jeudi 24 novembre 2022
Les députés de l'opposition quittent l'hémicycle avant la fin de la séance, jeudi 24 novembre 2022, pour protester contre "l'obstruction" de la majorité et de l'exécutif
par Raphaël Marchal, le Vendredi 25 novembre 2022 à 01:12, mis à jour le Mardi 25 juillet 2023 à 16:30

Alors que La France insoumise semblait en mesure de faire adopter sa proposition de loi visant à réintégrer les personnels non-vaccinés des établissements de santé, le gouvernement et sa majorité relative ont œuvré pour ralentir les débats et empêcher que le texte puisse être mis au vote. Peu avant minuit, la journée d'initiative parlementaire du groupe LFI s'est achevée dans une ambiance tendue. 

C'est l'histoire d'un texte qui n'aurait probablement jamais dû être examiné ce jeudi 24 novembre. Après avoir retiré, la veille au soir, deux textes de sa journée d'initiative parlementaire - commission d'enquête sur les "Uber files" et SMIC à 1 600 euros - pour assurer l'adoption de la proposition de loi visant à inscrire l'IVG dans la Constitution, La France insoumise a retiré, en cours de séance, une autre proposition - l'abolition de la corrida - qui semblait avoir peu de chances d'aboutir.

Résultat, les députés ont commencé à débattre du texte qui venait ensuite à l'ordre du jour de la niche parlementaire du groupe LFI :  la proposition de loi "portant réintégration du personnel des établissements de santé et de secours non‑vacciné grâce à un protocole sanitaire renforcé".  La discussion a commencé aux alentours de 18 heures, alors que si tous les autres textes avaient été examinés, celui-ci n'aurait pas pu être étudié avant la fin de la journée réservée aux députés insoumis qui s'achevait à minuit. 

Porté par Caroline Fiat, ce texte prévoit, comme son nom l'indique, de réintégrer les personnels suspendus dans leurs fonctions. À condition qu'ils respectent un protocole strict, et soient en mesure de présenter, tous les jours, un test négatif. Ce dernier étant également rendu gratuit par la proposition de loi, tout comme un équipement de protection spécifique. Une mesure rendue d'autant plus nécessaire, selon la députée LFI, par la pénurie de personnels dans les services médicaux. 

Dès le début de la discussion, la ministre chargée de l'Organisation territoriale et des Professions de santé a opposé une fin de non-recevoir aux élus de La France insoumise, arguant que cette mesure ne répondrait ni à l'éthique spécifique des soignants, ni au manque d'effectifs. Les professionnels du secteur de la santé "sont totalement opposés à la perspective d'un retour de leurs collègues qui n'ont pas joué le jeu de la vaccination", a également indiqué Agnès Firmin-Le Bodo.

Au-delà des bancs de la Nupes, l'initiative du groupe LFI a, en revanche, été bien reçue jusque dans les rangs des Républicains et du Rassemblement national. Au point de mettre en minorité le gouvernement et sa majorité relative. L'amendement de suppression de l'article premier, colonne vertébrale du texte, a ainsi été confortablement écarté en fin d'après-midi, laissant augurer d'une adoption de la proposition de loi lors de la séance du soir.

D'une "obstruction" l'autre

C'est finalement un tout autre scénario qui s'est dessiné à compter de 21h30. Dès la reprise, ayant compris qu'ils n'arriveraient pas à empêcher l'adoption du texte en cas de scrutin, les députés de la coalition présidentielle ont multiplié rappels au règlement et suspensions de séance. "Vous êtes en train de faire une loi antivax, complotiste", a lancé en premier Sylvain Maillard (Renaissance), fustigeant l'alliance entre élus Nupes, LR et RN. Le ministre des Solidarités et de la Santé, François Braun, arrivé en renfort en séance a, par la suite, longuement détaillé les raisons de s'opposer à la réintégration des soignants non-vaccinés, avant que Thomas Mesnier (Horizons) ne demande une nouvelle suspension. En parallèle, une série de sous-amendements au texte a été déposée par le camp présidentiel, faisant passer le nombre de modifications du texte à débattre de 45 à 316.

Le dépôt d'amendements par le gouvernement lui-même a particulièrement déplu aux députés des oppositions, qui y ont vu une immixtion abusive de l'exécutif dans le cadre d'une journée d'initiative parlementaire. "C'est sans doute la première fois dans l'histoire de la Ve République", s'est ému le président du groupe LR, Olivier Marleix. "Inadmissible", a grondé Caroline Fiat. "Une ligne rouge", a renchéri la présidente du groupe LFI, Mathilde Panot. Un point d'orgue a été atteint lorsque Olivier Serva (Libertés, indépendants, Outre-mer et territoires) a intimé au silence un député de la majorité : "Tu vas la fermer !", s'est-il emporté. "Vous refusez la démocratie, vous méprisez une niche parlementaire LFI, vous méprisez le peuple", a critiqué l'élu guadeloupéen, après une suspension décrétée par la présidente de séance, Naïma Moutchou.

Quelque 30 minutes avant la fin de la séance, c'est l'ancien ministre de la Santé, Olivier Véran, qui s'est présenté à la tribune pour dérouler, sous les quolibets de l'opposition, son argumentaire et son opposition au texte. Finalement, 5 minutes avant minuit, et alors que de nombreux députés d'opposition quittaient bruyamment l'hémicycle sans écouter une nouvelle intervention de François Braun, Naïma Moutchou a levé la séance. Mettant ainsi fin, dans une ambiance tendue, à la journée d'initiative parlementaire de La France insoumise qui avait permis, dans l'après-midi, l'adoption de la proposition de loi visant à inscrire le droit à l'IVG dans la Constitution grâce aux voix des groupes de la Nupes et de la majorité.