La commission du développement durable et de l'aménagement du territoire a publié après examen, mercredi 4 juin, le rapport d'information sur "l'adaptation de l'aménagement des territoires au changement climatique". Les auteurs du rapport, Fabrice Barusseau (Socialistes) et Philippe Fait (Ensemble pour la République), soulignent que "l’adaptation n’est pas uniquement une contrainte", mais peut aussi être "un levier de résilience, d’innovation et d’attractivité pour les territoires".
Passer de la "maladaptation" au changement climatique à une politique qui enclencherait une dynamique vertueuse. C'est en substance, l'idée qui ressort des travaux de la mission d'information "sur l'adaptation de l'aménagement des territoires au changement climatique", qui était présidée par Vincent Descoeur (Droite républicaine) et dont les rapporteurs étaient Fabrice Barusseau (Socialistes) et Philippe Fait (Ensemble pour la République).
En mars dernier, le troisième plan national d'adaptation au changement climatique (Pnacc-3) a dressé un constat inquiétant : la France subirait une hausse de 4°C en 2100 par rapport à l'ère pré-industrielle (1850-1900). Des conséquences qui "vont affecter les Français dans tous les aspects du quotidien : disparition d’habitations, baisse des rendements agricoles du fait des sécheresses, coupures récurrentes de routes, de courant électrique, de services publics", indique la synthèse du rapport.
Cependant, le Pnacc-3 présente un écueil auquel le rapport de Fabrice Barusseau (PS) et Philippe Fait (EPR) entend répondre : l'absence de "vecteur législatif" permettant l'adoption de "mesures contraignantes". Les deux députés préconisent de développer la notion de "réflexe adaptation dans la conduite de chaque politique publique". Ils ont défendu cet argumentaire, ce mercredi 4 juin, devant la commission du développement durable et de l'aménagement du territoire. En résumé, ils suggèrent d'intégrer "les enjeux climatiques dans les décisions d'investissement", d'avoir "une meilleure coordination entre les collectivités locales et l’Etat" et d'identifier "la faiblesse de l’accompagnement des collectivités locales".
L'enjeu à éviter selon ce rapport d'information de 148 pages, c'est la "maladaptation". Elle désigne "toute action accroissant accidentellement les conséquences néfastes liées au climat", comme s'adapter "en augmentant la vulnérabilité du voisin". A titre d'exemple, effectuer une retenue d'eau en période d'étiage en amont d'un cours d'eau augmente le risque de sécheresse. Pour y remédier, plusieurs propositions du rapport invitent à repenser le droit de l'urbanisme, comme avec une "meilleure articulation du zéro artificialisation nette".
Les deux rapporteurs regrettent, par ailleurs, "le déficit d'ingénierie territoriale", freinant l'adaptation des petites collectivités aux risques climatiques à venir. Ils évoquent l'accès pour les élus à une formation obligatoire sur "la culture du risque et les enjeux climatiques". Pour eux, la suite est optimiste. Toujours dans l'exposé des motifs, les députés rappellent que "l'adaptation est locale et ne dépend pas des autres pays", "la logique économique conduit à investir le plus et le plus tôt possible pour adapter la société" et "l’adaptation est une politique du long terme, qui nécessite des investissements dès maintenant".
En réponse à la question du député Denis Fégné (Socialistes) sur "les préconisations prioritaires" à traduire dans un éventuel texte législatif, Fabrice Barusseau a insisté sur les propositions (n°1 et n°14, voir l'encadré ci-dessous) visant à consacrer dans la partie législative du code de l’environnement l’existence de la trajectoire de référence pour l’adaptation au changement climatique (Tracc), ainsi que l’existence d’un plan national d’adaptation au changement climatique (Pnacc) révisé tous les cinq ans.
Les principales propositions du rapport d'information :
- Proposition n° 1 : Consacrer dans la partie législative du code de l’environnement l’existence de la trajectoire de référence pour l’adaptation au changement climatique (Tracc).
- Proposition n° 14 : Consacrer dans la partie législative du code de l’environnement l’existence d’un plan national d’adaptation au changement climatique (Pnacc) révisé tous les cinq ans.
- Proposition n° 17 : Généraliser la formation des élus locaux en début de mandat aux enjeux de transition écologique et plus spécifiquement d’adaptation afin de développer la culture du risque.
- Proposition n° 36 : Préciser à l’article L. 2152-7 du code de la commande publique que, dans le cadre des marchés publics, le critère du prix ou du coût, fondé sur l’entièreté du cycle de vie du produit, prend en compte le climat futur et les coûts associés pour cet investissement.
- Proposition n° 6 : Rétablir un lien direct entre l’évolution de la surprime et les ressources allouées au fonds Barnier en rehaussant de 12 % à 20 % le taux de la taxe prévue à l’article 235 ter ZE du code général des impôts.
- Proposition n° 53 : Mettre fin au principe de la reconstruction à l’identique. Pour cela, prévoir une dérogation au principe indemnitaire en zone à risque pour permettre, voire imposer, à l’assureur de financer des travaux de prévention à la suite de sinistres reconnus Cat Nat.
- Proposition n° 71 : Mettre en place une péréquation horizontale des revenus de la taxe Gemapi à l’échelle du bassin hydrographique, afin de permettre aux EPCI les plus exposés et les moins bien dotés de bénéficier de la solidarité des territoires à fort potentiel fiscal et moins à risque.
- Proposition n° 85 : Créer un fonds érosion côtière alimenté par une taxe sur les plateformes de location touristiques de courte durée et par la taxe sur les éoliennes maritimes.