L'ancienne ministre de l'Education nationale (2014-2017) Najat Vallaud-Belkacem a été auditionnée, ce lundi 5 mai, par la commission d'enquête dite "Bétharram" à l'Assemblée nationale. L'ex-ministre de François Hollande a assuré que lorsqu'elle était en fonction, rien n'était "parvenu" au ministère "de l'ordre du lancement d'alerte ou de l'information préoccupante" concernant des faits de violences commis dans l'établissement d'enseignement catholique des Pyrénées-Atlantiques.
Elle était la première ex-ministre de l'Education nationale à être auditionnée par les députés de la commission des affaires culturelles et de l'éducation dans le cadre de leurs travaux d'enquête sur "les modalités du contrôle par l’Etat des violences dans les établissements scolaires", créée dans la foulée des révélations sur Notre-Dame-de-Bétharram.
Pendant une heure, ce lundi 5 mai, Najat Vallaud-Belkacem, qui a occupé cette fonctionde 2014 à 2017 sous la présidence de François Hollande, a répondu aux questions des députés. L'occasion pour l'ex-ministre socialiste de revenir sur son action rue de Grenelle, notamment sur la création de l'application "Faits établissement", destinée à permettre aux établissements de faire remonter les faits de violence préoccupants.
"Dans la mesure où j'avais fait du bien-être des élèves une priorité de mon mandat de ministre, (...) j'avais remédié à une lacune que j'avais constaté : il n'existait pas de logiciel adapté pour que ces faits puissent être remontés établissement par établissement", a expliqué Najat Vallaud-Belkacem. "Nous avons fluidifié la remontée d'informations", a-t-elle ajouté, avant d'être interrogée par le co-rapporteur Paul Vannier (La France insoumise) sur l'utilisation de cette application par les établissements privés.
L'ancienne ministre a alors assuré que "l'outil, au moment de sa création, s'adresse à tous les établissements, publics et privés". "Les pouvoirs publics n'ont pas la même capacité d'imposer aux établissements privés ce qu'ils imposent se pose dans le public", a-t-elle complété, évoquant "des dispositifs maison, dont il est avéré (...) qu'ils ne sont pas propices à la libération de la parole des élèves". Najat Vallaud-Belkacem considère donc que "la ministre actuelle [Elisabeth Borne] a raison de vouloir aller plus loin sur ce point".
Questionnée sur ses relations de l'époque avec le Secrétariat général à l'enseignement catholique (Sgec) et sur d'éventuels "dîners mensuels", elle a affirmé qu'il "n'y a[vait] pas cette promiscuité à [son] époque", et qu'il était traité "comme tous les interlocuteurs". L'ex-ministre n'a, en outre, "pas souvenir que le Sgec en tant que tel nous ait montré une réticence à l'égard de l'application 'Faits établissements’".
C'est en revenant sur l'affaire de l'école de Villefontaine, où un ancien directeur avait été mis en examen et écroué pour des viols sur 61 enfants au cours de ses différentes affectations en Isère et dans le Rhône, et en détaillant les mesures mises en place en 2015 que Najat Vallaud-Belkacem a évoqué celle de Notre-Dame-de-Bétharram.
"Quand on a connaissance de faits aussi graves, on doit réagir rapidement, on peut réagir rapidement. Les ministres ont bel et bien des leviers pour agir et agir vite, et je ne vous cache pas que j'ai été étonnée du temps de latence entre les premières révélations en 2023 et l'inspection diligentée aujourd'hui par le ministère de l'Education nationale en mars [2025]", a-t-elle estimé.
Son ministère avait-il été informé de faits relatifs à Notre-Dame-de-Bétharram lorsqu'elle était en poste, a demandé co-rapporteure Violette Spillebout (Ensemble pour la République) ? "Je me suis empressée de fouiller dans mes propres archives pour me rendre compte si nous étions passés à côté de quelque chose. Je n'ai rien trouvé qui nous soit parvenu de l'ordre du lancement d'alerte ou de l'information préoccupante, entre 2014 et 2017", a-t-elle répondu. Avant de déclarer : "Non, ce n'était pas arrivé à nos oreilles."
Quant à savoir si elle a été surprise par les révélations des faits de violence à Notre-Dame-de-Bétharram, Najat Vallaud-Belkacem a indiqué qu'il "y a eu une forme de sidération, à voir l'ampleur, la gravité, la durée et la silenciation" et a évoqué "un phénomène d'omerta totale, qui est quand même absolument terrifiant". Et d'appeler - alors que la libération de la parole est encore "extrêmement fragile" - à "prendre les mesures qui s'imposent pour éviter que cette parenthèse ne se referme trop vite".