Budget 2025 : revers à répétition pour le gouvernement, vers une reprise des débats en novembre

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par Ludovic FAUSoizic BONVARLET, le Samedi 26 octobre 2024 à 20:45, mis à jour le Jeudi 7 novembre 2024 à 09:04

L'examen du projet de loi de finances pour l'année 2025 se poursuit à l'Assemblée nationale, ce samedi 26 octobre au soir, sans que le gouvernement puisse empêcher que son budget ne soit largement modifié, et même dénaturé, depuis le coup d'envoi des débats en début de semaine. Mais il ne s'agit que de la première étape du processus budgétaire. L'examen de la partie "recettes" s'interrompra ce soir à minuit, avant de reprendre le 5 novembre.  

Sans véritable majorité à l'Assemblée nationale le gouvernement tente de défendre son projet de loi de finances (PLF) pour l'année 2025, actuellement en cours de première lecture, dans l'hémicycle du Palais-Bourbon. Sans pouvoir éviter de nombreuses modifications. Depuis le coup d'envoi des débats, lundi 21 octobre, il n'a ainsi pas pu empêcher la pérennisation de la surtaxe sur les hauts revenus, la suppression de la hausse de la taxe sur la consommation d'électricité, ou encore l'alourdissement de la contribution exceptionnelle sur les grandes entreprises qui a de ce fait finalement été rejetée. 

Des additions de voix à géométrie variable

Et ce samedi 26 octobre, le gouvernement a encore enchaîné les revers à l'Assemblée, avec peu de chances d'arriver au terme de l'examen de la partie "recettes" du budget avant minuit, alors que des séances ont été ouvertes aujourd'hui dans cet objectif. Le recours à l'article 49.3 de la Constitution pourrait certes être une façon d'abréger les débats, mais de sources parlementaires, cela ne semble pas l'option retenue à ce stade. Le gouvernement affichant, au contraire, la volonté de laisser la discussion de dérouler

Depuis le début de la journée, contre l'avis du ministre du Budget, Laurent Saint-Martin, une majorité de députés ont décidé de rendre pérenne la contribution exceptionnelle demandée aux entreprises de fret maritime qui s'appliquera en fait à l'armateur français CMA CGM et de plafonner à 500 millions d'euros la niche fiscale dont bénéficie ce secteur. L'Assemblée a aussi approuvé un rétablissement progressif de la CVAE (Cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises) dont le PLF prévoyait au contraire l'extinction totale en 2030. Et supprimé un article prévoyant de durcir le malus écologique pour les voitures essence et diesel.

Ces votes, avec des additions de voix à géométrie variable, ont eu lieu dans un hémicycle où les bancs du "socle commun" de Michel Barnier - qui sait pouvoir être mis en minorité à tout instant et qui a fait état de différences, si ce n'est parfois de divergences, avec certaines mesures du projet de budget - apparaissent souvent clairsemés. Ainsi le Rassemblement national a mêlé ses voix avec celles du Nouveau Front populaire pour plafonner la niche fiscale des armateurs, tandis que le Nouveau Front populaire a obtenu seul le rétablissement progressif de la CVAE.

Concernant le malus automobile, c'est une addition hétéroclite de députés des groupes Rassemblement national, Droite républicaine, Union des droites pour la République, Socialistes, ainsi que Gauche démocrate et républicaine, qui a eu raison de la mesure voulue par le gouvernement, la gauche et le socle gouvernemental apparaissant divisés sur le sujet. 

Reprise des débats sur les recettes le 5 novembre

Compte tenu du nombre d'amendements qui restent à discuter ce samedi soir, terminer l'examen de la partie "recettes" du projet de loi de finances est, de l'avis général des députés interrogés, hors de portée d'ici à minuit, alors que les débats qui devaient s'achever vendredi soir ont déjà été prolongés d'une journée. Le vote solennel actuellement programmé mardi prochain, 29 octobre, ne pourra donc pas avoir lieu.

Sans recours au 49.3, le gouvernement ayant laissé entendre qu'il voulait que la discussion puisse se dérouler jusqu'au bout, l'examen de la première partie du budget 2025 reprendra le 5 novembre. A partir de ce lundi 28 octobre, c'est en effet le projet de loi de financement de la Sécurité sociale, qui s'annonce lui aussi difficile pour le gouvernement, qui est inscrit à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale. 

A partir du 5 novembre, c'est l'examen de la partie "dépenses" du projet de loi de finances qui est pour l'instant prévu. Mais les crédits des ministères, c'est-à-dire le financement des grandes politiques publiques (éducation, sécurité, justice, emploi, défense, etc.) ne pourront pas être débattus sans adoption de la partie "recettes". En cas de vote, sans 49,3, un rejet des recettes empêcherait d'ailleurs l'Assemblée d'examiner les dépenses. C'est alors l'ensemble du PLF qui serait directement transmis au Sénat

Délai constitutionnel de 40 jours

En outre, si contrairement à ce qui s'est passé en commission et contre toute attente en raison des modifications apportées au texte du gouvernement - ainsi que des intentions affichées à ce stade par les différents groupes politiques -, les recettes finissaient par être adoptées début novembre, les députés entameraient la discussion sur les dépenses, vraisemblablement sans pouvoir l'achever en raison du retard pris sur le calendrier.

En effet, alors que deux semaines étaient prévues pour l'examen de la deuxième partie du PLF, du 5 au 21 novembre, le délai de 40 jours dont disposent les députés pour se prononcer sur l'ensemble du budget en première lecture, conformément à l'article 47 de la Constitutions'éteindra le 21 novembre. Entièrement examiné ou pas, voté ou pas, par l'Assemblée nationale, le projet de loi de finances sera alors transmis au Sénat

La droite et le centre étant majoritaires au Palais du Luxembourg, le gouvernement pourra alors reprendre la main, puis miser sur un accord entre députés et sénateurs en commission mixte paritaire, ce qui lui permettra de se rapprocher des équilibres initiaux du texte. C'est à ce moment-là, pour obtenir la validation de l'accord à l'Assemblée nationale que Michel Barnier aura très certainement recours au 49.3 et devra affronter une motion de censure.