Délinquance des mineurs : Que contient la proposition de loi de Gabriel Attal, que le Parlement s'apprête à adopter définitivement ?

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Gabriel Attal LCP 12/02:2025
Le président du groupe EPR, Gabriel Attal, le 12 février 2025 (© LCP)
par Raphaël Marchal, le Lundi 12 mai 2025 à 17:30

Après un accord trouvé entre députés et sénateurs en commission mixte paritaire, la proposition de loi visant à "renforcer l’autorité de la justice à l’égard des mineurs délinquants et de leurs parents", initiée par Gabriel Attal, est sur le point d'être définitivement adoptée. Le texte élaboré en CMP sera soumis à l'Assemblée nationale ce mardi 13 mai, puis au Sénat lundi 19 mai.

Près de deux ans après les émeutes de juin 2023 qui avaient secoué la France, impliquant de nombreux jeunes, le Parlement s'apprête à adopter définitivement la proposition de loi de Gabriel Attal visant à "renforcer l’autorité de la justice à l’égard des mineurs délinquants et de leurs parents". Le texte a fait l'objet d'un accord entre députés et sénateurs, qui doit encore être validé successivement par l'Assemblée nationale, ce mardi 13 mai, puis par le Sénat, lundi 19 mai.  

La proposition de loi est la traduction législative d'une antienne popularisée par l'ex-Premier ministre : "Tu casses, tu répares ; tu salis, tu nettoies ; tu défies l'autorité, on t'apprend à la respecter." Désormais président du groupe Ensemble pour la République au Palais-Bourbon, Gabriel Attal avait élaboré ce texte, au moins en partie, en réponse aux violences urbaines qui avaient suivi la mort de Nahel, tué après un refus d'obtempérer lors d'un contrôle de police. 

Nos concitoyens attendent des mesures fortes de la part du législateur afin de responsabiliser les parents et de réarmer l’État face à des délinquants toujours plus jeunes qui commettent des faits toujours plus graves. Jean Terlier, rapporteur (EPR) du texte à l'Assemblée.

En commission mixte paritaire (CMP), les sept députés et sept sénateurs composant l'instance se sont entendus sur une version de compromis "efficace" et "juridiquement solide", s'est félicité le rapporteur du texte à l'Assemblée, Jean Terlier (Ensemble pour la République). La mouture finale du texte conserve les principales mesures de la proposition de loi, tout en les adaptant. La procédure d'audience unique en comparution immédiate a été réservée aux justiciables mineurs de plus de 16 ans, récidivistes ou encourant une peine d'au moins 3 ans de prison.

Autre disposition centrale du texte : l'atténuation de "l'excuse de minorité". La proposition de loi prévoit un renversement de la logique en vigueur, obligeant ainsi les magistrats à motiver l'application de ce mécanisme concernant les mineurs de plus de 16 ans en état de récidive, ayant commis des crimes et délits punis d'au moins 5 ans d'emprisonnement.

Le texte comporte également des mesures spécifiques aux parents. Il crée ainsi une nouvelle circonstance aggravante du délit de soustraction. Un parent se dégageant de ses obligations légales encourra 3 ans de prison et 45 000 euros d'amende lorsque son comportement a directement conduit à la commission d'un crime ou plusieurs délits par son enfant. La proposition de loi étend, en outre, le régime de responsabilité civile solidaire des parents pour les dommages causés par leurs enfants mineurs. Par ailleurs, les sanctions pour refus de déférer aux convocations du juge des enfants seront renforcées.

Pas de courtes peines d'emprisonnement

Plusieurs mesures introduites par le Sénat ont été conservées dans le texte de la CMP. Sont concernés l'extension du recours à l'audience unique, des mesures spécifiques aux mineurs terroristes ou liés à la criminalité organisée, la possibilité d'obliger les mineurs à se plier à une mesure de "pointage", la rétention des mineurs en cas de violation d'une mesure éducative, ou encore l'élargissement du couvre-feu en tant qu'alternative aux poursuites.

En revanche, les parlementaires n'ont pas conservé la possibilité pour le tribunal des enfants de prononcer des peines d’emprisonnement ferme d’une durée inférieure ou égale à un mois. Cette disposition avait été ajoutée au Sénat via un amendement de Marie-Claire Carrère-Gée (Les Républicains). "Un tel dispositif mérite assurément un débat approfondi au sein de la représentation nationale", a commenté Jean Terlier (EPR).

Ce texte s’écarte dangereusement des principes qui fondent une justice réellement éducative et fait perdre à celle-ci son efficacité. Adeline Hazan, présidente de l'Unicef France

Une fois définitivement approuvée par le Parlement, la proposition de loi aura terminé son parcours législatif, mais devrait avoir encore une étape à franchir avant son entrée en vigueur. Le texte suscite en effet les critiques et l'inquiétude des groupes de gauche, très opposés à ce durcissement de la justice des mineurs. Plusieurs parlementaires ont donc déjà fait savoir qu'ils saisiront le Conseil constitutionnel.