L'Assemblée nationale a adopté la proposition de loi visant à "lutter contre la mortalité infantile", présentée dans le cadre de la journée d'initiative parlementaire du groupe LIOT. Le texte, qui instaure un moratoire sur les fermetures de maternités, sauf en cas de mise en danger de la sécurité des patients, va maintenant être transmis au Sénat afin de poursuivre son parcours législatif.
L'Assemblée nationale s'est prononcée en faveur de la préservation des petites maternités. Les députés ont adopté en première lecture, jeudi 15 mai au soir, la proposition de loi visant à "lutter contre la mortalité infantile" (97 pour, 4 contre). Ce texte, défendu par le groupe "Libertés, indépendants, Outre-mer et territoires", présidé par Laurent Panifous, dans le cadre de sa journée d'initiative parlementaire, instaure un moratoire de trois ans sur les fermetures de maternité. Approuvé par les députés, le texte doit maintenant être transmis au Sénat afin d'y poursuivre son parcours législatif.
"L'an dernier, en France, 2 700 enfants de moins d'un an sont morts", a indiqué en ouverture des débats le rapporteur du texte, Paul-André Colombani (Liot). "La mortalité néonatale est en augmentation depuis de nombreuses années et atteint le niveau inquiétant de 4,1 pour 1000", a ajouté le député de Corse-du-Sud, qui rappelle dans sa proposition de loi que la France se situe au 23e rang sur 27 au sein de l'Union européenne s'agissant de la mortalité infantile.
Notre seule boussole doit être la santé des mères et des enfants. Paul-André Colombani
Paul-André Colombani estime que ces chiffres inquiétants peuvent en partie trouver leur origine dans "l’éloignement géographique croissant des structures de soins". Dans son texte, l'élu cite une enquête réalisée par les journalistes Anthony Cortes et Sébastien Leurquin qui révèle que "le risque de décès néonatal est multiplié par deux lorsque le trajet jusqu’à la maternité dépasse 45 minutes". Or en cinquante ans, "les trois quarts des maternités ont fermé", si bien que le nombre de femmes qui vivent à plus de 45 minutes "a augmenté de 40% depuis 2000".
Le texte adopté jeudi soir instaure donc un moratoire de trois ans sur les fermetures de maternité, sauf celles susceptibles de mettre en "danger" la "sécurité des patients" qui pourraient voir leur autorisation d'exercer retirée.
"Un moratoire permettra une évaluation fine et territorialisée des établissements menacés et évitera des décisions irréversibles fondées sur des logiques purement comptables", a salué Josiane Corneloup (Droite républicaine). "La concentration des maternités dégrade aussi les conditions de travail, dans ces usines à bébés, les soignants n'ont plus le temps d'accompagner réellement les mères", a ajouté Murielle Lepvraud (La France insomise).
Le seul critère du nombre de naissances pour décider d'une fermeture de maternité n'est pas suffisant. Laurent Panifous (LIOT)
Le texte donne aussi pour mission aux agences régionales de santé (ARS) d'effectuer un "état des lieux des établissements exerçant une activité d’obstétrique pratiquant moins de 1000 accouchements par an". Le travail des ARS nourrira un rapport que le gouvernement devra remettre dans les deux ans au Parlement : celui-ci devra notamment "détailler les moyens à mettre en œuvre pour maintenir les petites maternités dont la présence est nécessaire à la sécurité et l’accessibilité des soins".
Au cours des débats, plusieurs députés ont fait part de leur opposition au moratoire : "Il est important de rappeler que si des maternités doivent fermer, c'est parce qu'elles ne permettent pas de garantir des accouchements en toute sécurité pour les parturientes et les nourrissons", a considéré Jean-François Rousset (Ensemble pour la République), qui a estimé que ce sujet nécessitait du "courage politique".
Son collègue Cyrille Isaac-Sibille (Les Démocrates) a, lui aussi, fait part de ses réticences, jugeant plus efficace de mettre à disposition des femmes vivant des grossesses à risque des logements proches des hôpitaux, dans "l'attente de l'accouchement".
Le gouvernement, pour sa part, s'en est remis à la "sagesse" des députés. Le ministre chargé de la Santé, Yannick Neuder, a déclaré qu'il était favorable à une étude "bénéfice-risque" pour chaque maternité. "Le ministère de la Santé n'a aucun objectif de fermeture d'établissements de santé, ni de politique de fermeture de service de maternité", a-t-il ajouté.
Yannick Neuder a toutefois mis en avant la "complexité" de la thématique abordée : "L'éloignement d'une maternité peu, bien sûr être un facteur important de la hausse du risque de mortalité néonatale, tout comme le fait d'accoucher dans une petite structure de niveau 1 peut être un facteur de risque en cas de complication à l'accouchement." Le ministre a évoqué d'autres facteurs qui peuvent expliquer cette hausse de la mortalité infantile, comme le recul de l'âge de la mère lors de l'arrivée du premier enfant, l’accroissement des grossesses multiples, ou encore la hausse de la prématurité favorisée par les progrès de la médecine.
Par ailleurs,la proposition de loi de Paul-André Colombani (LIOT) prévoit de créer un registre national des naissances avant le 1er janvier 2026, afin de permettre "un suivi fin, réactif et territorialement précis des problématiques". Le texte rend, en outre, obligatoire la mise en place dans chaque maternité de formations régulières aux gestes d’urgence obstétrique ainsi qu'aux bonnes pratiques en matière de transfert périnatal.