GAFAM : les députés votent pour multiplier par deux la taxe qui vise les géants du numérique

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Jean-René Cazeneuve LCP 28/10/2025
Jean-René Cazeneuve à l'Assemblée nationale, le 28 octobre 2025 (© LCP)
par Raphaël Marchal, le Mercredi 29 octobre 2025 à 00:10, mis à jour le Mercredi 29 octobre 2025 à 00:53

Les députés se sont prononcés pour un doublement du taux de la taxe sur les services numériques qui vise les géants de la tech américains, ce mardi 28 octobre, dans le cadre de l'examen du projet de budget pour 2026. Le taux de cette taxe passerait ainsi de 3 à 6%. Le ministre de l'Economie et des Finances, Roland Lescure, a mis en garde contre d'éventuelles représailles américaines.

"Soyez prudents, je vous en conjure." Au terme d'une heure et demi de débats sur la pertinence d'un alourdissement de la taxe sur les GAFAM, le ministre de l'Economie et des Finances, Roland Lescure, a appellé les députés à ne pas avoir la main trop lourde. En cause : les menaces de réprésailles de l'administration Trump, qui pourrait voir d'un mauvais œil l'aggravation de la fiscalité des géants américains du numérique, Google, Amazon, Facebook, Apple et Microsoft. Encore ce week-end, le président américain a annoncé une hausse unilatérale de 10% des droits de douane sur le Canada après la diffusion d'une... publicité qui lui avait déplu, a rappellé le ministre aux députés.

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En commission, la semaine dernière, les élus avaient voté pour un amendement multipliant par cinq le taux de la taxe sur les services numériques, le faisant passer de 3 à 15 %, en adoptant un amendement de Jean-René Cazeneuve (Ensemble pour la République). "Si on introduit une taxe disproportionnée, on aura des représailles disproportionnées", a mis en garde Roland Lescure, opposé à une telle hausse. Message reçu par plusieurs députés du bloc central et de la droite dans l'hémicycle, qui ont décidé de retirer leurs amendements les plus sévères à l'encontre des GAFAM.

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C'est le cas de Jean-René Cazeneuve (EPR), qui a substitué à sa proposition initiale une version de son amendement revue à la baisse visant finalement à multiplier par deux cette taxe, en portant son taux à 6 %. "Je ne suis pas là pour rouvrir une guerre commerciale entre la France et les Etats-Unis", a-t-il expliqué. Et c'est finalement son amendement qui a été adopté. Celui-ci ne touche pas uniquement le taux de la taxe, mais relève également le seuil de taxation au niveau mondial de 750 millions à 2 milliards d'euros, afin de cibler plus précisément les firmes américaines.

La taxe sur les services numériques porte sur les activités des géants du numérique telles que la publicité ciblée en ligne, la vente de données personnelles à des fins publicitaires, ou encore les activités de plateformes d'intermédiation. Mise en place en 2019, son rendement devrait être d'environ 800 millions d'euros en 2025.

La gauche dénonce "une reculade"

Plusieurs députés de gauche ont manifesté leur indignation après cette hausse moins ambitieuse que celle votée en commission. "En quelques jours nous voyons une reculade de Jean-René Cazeneuve, sous la menace de potentielles représailles au niveau américain", a regretté Claire Lejeune (La France insoumise). "La peur des représailles, c'est précisément ce qui a justifié l'accord honteux entre Madame von der Leyen et Donald Trump", a tempêté Emmanuel Maurel (Gauche démocrate et républicaine), en référence à l'accord commercial conclu entre la présidente de la Commission européenne et le Président américain.

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"Je suis extrêmement gênée de voir le nombre de députés qui retirent leur amendement, sous caution de pression faite par des instances étrangères. (...) Cela veut dire qu'on ne peut plus légiférer sous les menaces de Trump", s'est indignée la présidente du groupe Ecologiste et social, Cyrielle Chatelain. Inversement, les députés de droite ont décidé de s'opposer à l'ensemble des amendements visant à taxer plus lourdement les GAFAM. "On veut préserver les filières vins et spiritueux, qui sont nos fleurons", a notamment justifié Valérie Bazin-Malgras (Droite républicaine), craignant une aggravation des droits de douane américains sur ces productions.

Pour que cette hausse de la taxe sur les géants du numérique entre en vigueur, elle devra figurer dans la version finale du budget pour l'année prochaine. 

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