JO d'hiver 2030 : Les 5 points clés du texte qui arrive à l'Assemblée

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La Clusaz Wikimedia
La Clusaz, station dans laquelle se tiendront les épreuves de ski de fond (© Wikimedia)
par Raphaël Marchal, le Lundi 15 décembre 2025 à 08:37

Les députés examinent le projet de loi relatif à l'organisation des Jeux olympiques et paralympiques (JOP) d'hiver Alpes françaises 2030. Sécurité, urbanisme, environnement... LCP revient sur les principaux axes du texte, qui doit permettre le bon déroulement des Jeux.

Six ans après ceux de l'été 2024 à Paris, les Jeux olympiques et paralympiques (JOP) seront de nouveau organisés en France en 2030, cette fois en version hivernale, dans les Alpes. Afin de préparer l'organisation de l'évènement, exercice complexe, le gouvernement a présenté un projet de loi dédié, à l'instar de celui qui avait été porté pour les Jeux parisiens.

Au programme : diverses dérogations temporaires en matière environnementale, de logement, d'urbanisme, ou encore de santé et de travail, ainsi qu'un volet sécurité. LCP fait le point sur les enjeux de ce texte, déjà adopté au Sénat en première lecture au début de l'été.

1. Une gouvernance en crise ?

L'examen du texte dans l'hémicycle de l'Assemblée intervient quelques jours après la démission de la directrice des opérations du Comité d'organisation des JOP 2030 (Cojop), Anne Murac, cinq mois seulement après son arrivée, sur fond de tensions. Anne Murac était notamment chargée de superviser la "carte des sites", qui distribue les compétitions des différentes disciplines à chacun des pôles concernés (Savoie, Haute-Savoie, Nice et Briançon).

Une tâche décisive, avec plusieurs inconnues : réintégration de Val d'Isère pour les épreuves de ski alpin, localisation des Jeux paralympiques, sélection du site à l'étranger qui accueillera le patinage de vitesse... Sans compter le choix des disciplines additionnelles qui intégreront cette édition. Cette carte doit être finalisée d'ici à juin 2026.

Plusieurs problèmes ont émergé ces derniers temps. La semaine dernière, le Conseil départemental de Savoie, par la voix de son président Hervé Gaymard, a annoncé la suspension de sa participation aux réunions de préparation, refusant notamment d'être "une variable d’ajustement budgétaire". "Le département de la Savoie n’a pas été consulté sur l’opportunité de cette candidature, ni sur la carte des sites, dont la première mouture officielle n’est pas satisfaisante", a écrit l'élu dans une lettre dévoilée par Le Dauphiné libéré.

Ces secousses s'ajoutent à des procédures en cours pour dénoncer l'absence "de participation du public au processus décisionnel" devant un organe de contrôle onusien à Genève, ainsi que devant plusieurs tribunaux administratifs français.

2. De nombreuses dérogations

Afin de s'assurer de la réalisation des différents chantiers, de la livraison des équipements, de l'accueil des délégations, des employés, des bénévoles et des touristes, le projet de loi présenté par le gouvernement prévoit de nombreuses dérogations ou adaptations du cadre légal 

Absence d’autorisation d’urbanisme pour les équipements temporaires, accélération des procédures d’expropriation et des enquêtes publiques, création de voies olympiques réservées, occupation temporaire de terrains privés, rôle renforcé du préfet, constructions non comptabilisées dans le cadre du zéro artificialisation nette des sols, développement des transports publics, assouplissement des conditions de recours aux marchés publics... Autant de dispositions dont l'objectif affiché est de favoriser l'organisation des Jeux. 

Les règles en matière de santé et de travail sont aussi adaptées. Le projet de loi permet ainsi la création de polycliniques dans chaque village olympique, pour accueillir les sportifs et les personnes accréditées. Il autorise les médecins étrangers des délégations à exercer leur profession sur le territoire national. Par ailleurs, le texte introduit une dérogation exceptionnelle au repos dominical. Certains commerces, situés dans les communes qui accueilleront les compétitions sportives ou dans les communes voisines, pourront ouvrir le dimanche entre le 1er janvier et le 31 mars 2030. Les salariés devront être volontaires.

3. Un volet sécuritaire contesté à gauche

Le projet de loi comporte aussi des mesures destinées à renforcer le dispositif de sécurité. Au point, selon certains parlementaires de gauche, de prévoir des mesures disproportionnées comme la création d'une mesure d'interdiction de paraître dans les grands évènements à l'encontre des personnes qui constituent une "menace d’une particulière gravité pour la sécurité publique", y compris lorsqu'elles n'ont pas été condamnées. Une mesure qui peut-être assortie d'une obligation de pointage dans un commissariat ou une brigade de gendarmerie.

En outre, le texte reconduit pour deux ans supplémentaires, jusqu'à fin 2027, l'expérimentation de la vidéosurveillance algorithmique, qui avait été mise en place pour les JOP de Paris. Et ce malgré un bilan en demi-teinte, selon un rapport parlementaire paru en mars dernier. L'expérimentation de la vidéosurveillance algorithmique s'était éteinte le 31 mars 2025, malgré une première tentative de la prolonger, censurée par le Conseil constitutionnel en avril.

4. Des craintes environnementales

La cascade de dérogations prévues par le texte inquiètent les organisations environnementales, alors même que les acteurs de la montagne affrontent déjà les conséquences du dérèglement climatique, qui menace le modèle des sports d'hiver. Mercredi 10 décembre, des militants du "Collectif citoyen JOP 2030" ont interpellé plusieurs députés aux alentours de l'Assemblée nationale, notamment pour les sensibiliser à l'impact de l'évènement.

Les organisateurs estiment l'empreinte carbone de l'évènement entre "689 000 tonnes et 804 000 tonnes de CO₂", tout en assurant de leur volonté de limiter au maximum l'impact sur l'environnement. Notamment via la réutilisation dans 93 % des cas d'infrastructures déjà existantes. Et selon la commission du futur hôte, l'organisation des JO permettrait d'accélérer l'objectif de neutralité carbone fixé pour 2037 par les Domaines skiables de France.

Au Sénat, a été adopté un amendement du président du groupe écologiste, Guillaume Gontard, afin d'imposer au Cojop la réalisation d’une estimation environnementale complète, dans un délai de deux ans après la publication de la présente loi. Ainsi que d’un bilan environnemental complet dans un délai de 18 mois après la cérémonie de clôture des Jeux. Ce bilan devra notamment détailler les impacts de l'évènement sur la biodiversité et sur la ressource en eau.

5. Un coût incertain

Combien va coûter l'édition hivernale des Jeux olympiques et paralympiques de 2030 ? En octobre dernier, le Cojop a approuvé un budget pluriannuel de 2,132 milliards d'euros. Le financement des Jeux repose sur un équilibre classique entre fonds publics et privés. Toutefois, une incertitude demeure sur la facture finale.

Au point que les sénateurs ont décidé de supprimer l'article 5 du projet de loi, qui prévoit que les régions Auvergne-Rhône-Alpes et Provence-Alpes-Côte d'Azur apportent une garantie financière partielle en cas de déficit du Cojop. L'article a toutefois été rétabli par les députés en commission, les régions ayant depuis renouvelé leur souhait de pouvoir se porter garantes dans le pacte des financeurs. Selon les organisateurs, qui s'appuient sur une étude l'agence Utopies, les retombées économiques pour la France contribueraient au PIB à hauteur de "4,1 milliards d'euros", avec une valeur ajoutée nette de "1,2 milliard d'euros".