Loi Duplomb : ces députés qui ont vu leur permanence parlementaire dégradée

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A Toulouse, devant le local des Ecologistes le 23 juillet 2025.
A Toulouse, devant le local des Ecologistes le 23 juillet 2025.
par Anne-Charlotte Dusseaulx, le Jeudi 24 juillet 2025 à 17:57, mis à jour le Vendredi 25 juillet 2025 à 12:04

Ces derniers jours, plusieurs permanences parlementaires ont été dégradées. La Coordination rurale et les Jeunes agriculteurs ont mené des actions contre les locaux de plusieurs députés qui se sont opposés à la loi Duplomb, à l'image des écologistes Delphine Batho et Nicolas Thierry. A l'opposé, des élus ayant voté en faveur de la loi, qui réintroduit sous conditions l'acétamipride, ont également reçu des menaces. Plusieurs plaintes ont été déposées.

La loi Duplomb votée au Parlement, dont la pétition demandant son abrogation approche les deux millions de signatures, n'en finit plus de générer des tensions. Ce jeudi 24 juillet, après de nouvelles dégradations de permanences parlementaires, le préfet de Gironde, Etienne Guyot, a dénoncé, dans un communiqué, des "actes d'intimidation inacceptables" et "apporté tout son soutien aux représentants de la Nation". La veille au soir, les locaux du député écologiste Nicolas Thierry et de sa collègue insoumise Mathilde Feld, respectivement situés à Bordeaux et à Cadillac, avaient été "visés par des tags et des jets d'oeufs", précise-t-il. Une enquête a été ouverte.

Revendiquant l'action, la Coordination rurale a indiqué sur X vouloir s'en prendre aux "utopies déconnectées qui ignorent la réalité des viticulteurs", et donc aux parlementaires qui ont voté contre la proposition de loi "visant à lever les contraintes à l'exercice du métier d'agriculteur" au Parlement. 

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"Une plainte est déposée", a réagi auprès de LCP le député Nicolas Thierry. "Ce syndicat choisit l'intimidation et le vandalisme, piétine les règles démocratiques et agit dans une impunité inquiétante", poursuit l'élu, qui avait déjà été la cible de la Coordination rurale en mai. Il ajoute, estimant que cette dernière "se trompe de combat et de méthode" et "ne rend pas service à l'agriculture française" : "Leur action ne vise pas un mur mais les presque deux millions de citoyennes et citoyens qui ont soutenu la pétition contre la loi Duplomb."

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Les écologistes dénoncent "le silence du gouvernement"

Mais Nicolas Thierry et Mathilde Feld ne sont pas les premiers à connaître ce sort depuis l'ouverture du débat sur la loi Duplomb. Ces derniers jours, les permanences parlementaires des écologistes Delphine Batho dans les Deux-Sèvres et de Jean-Louis Roumégas dans l'Hérault ont également été visés par la Coordination rurale ou les Jeunes agriculteurs. "C'est peine et paille perdues !", a ironisé l'ancienne ministre de l'Ecologie (2012-2013), membre de Génération écologie, sur son compte Bluesky, photos des dégradations et lien vers la pétition à l'appui.

"Les auteurs de ce vandalisme minable sont complètement à côté de la plaque. Je continuerai à défendre le consommateur qui veut manger sainement et les paysans qui ont droit à un revenu décent", a renchéri Jean-Louis Roumégas, refusant de "rentrer dans le jeu d'une supposée opposition entre écologistes et agriculteurs". 

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Des locaux du parti Les Ecologistes, auquel ils appartiennent, ont également été dégradés ces derniers jours, à Toulouse, à Limoges ou encore à Blois. Sur les tags, plusieurs références aux récents propos de la députée écologiste Sandrine Rousseau qui, sur le site d'actualité Le Média, avait dit n'en avoir "rien à péter" de la rentabilité des agriculteurs.

Des propos "qui visaient les profits de l'agro-industrie", a réaffirmé le parti Les Ecologistes dans un communiqué publié mercredi soir. Par la voix de ses porte-parole nationaux Eric Piolle et Amina Niakaté, le mouvement "dénonce avec la plus grande fermeté les dégradations des permanences écologistes et les menaces inacceptables dont sont victimes nos militants et élus", ainsi que "le silence du gouvernement face à ces violences". "Contre la loi Duplomb, nous restons plus déterminés que jamais", a écrit la secrétaire nationale Marine Tondelier sur X. 

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"Nous appelons le gouvernement à sortir de son silence complice et à mettre un terme à ces manœuvres d'intimidation", indique aussi le groupe parlementaire de La France insoumise dans un communiqué publié vendredi 25 juillet. 

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Lui n'est pas député écologiste, mais avait aussi voté contre le texte controversé. Le député Ensemble pour la République Jean-Marie Fiévet, a également vu la rue devant sa permanence de Bressuire, dans les Deux-Sèvres, recouverte d'inscriptions, comme "Trop, c'est trop, la loi Duplomb simplifie la vie des agriculteurs". L'action a été revendiquée par les Jeunes agriculteurs. 

"Cela doit cesser", a réagi la présidente de l'Assemblée

Lundi 21 juillet, le ministre de la Justice, Gérald Darmanin, avait dénoncé des "menaces inacceptables" et appelé les procureurs de la République à faire preuve d'une "grande fermeté" face à ces violences. Le même jour, le ministère de l'Intérieur recensait "neuf atteintes" aux parlementaires. "La plupart des faits sont des dégradations de permanences, des rassemblements devant les permanences ou des outrages sur les réseaux sociaux", et "certains de ces faits relèvent de contestations d’agriculteurs", indiquait la place Beauvau, qui précisait que cela concernait à la fois "des parlementaires ayant voté pour [la loi Duplomb] et des parlementaires ayant voté contre".

En effet, plusieurs députés qui ont apporté leur soutien à la proposition de loi ont également fait l'objet de menaces. "Voici les députées et députés qui ont voté pour la loi Duplomb le vivant les jugera", pouvait-on lire le 18 juillet à côté de photos placardées sur la façade de la permanence de la députée MoDem du Puy-de-Dôme, Delphine Lingemann, qui a porté plainte contre X. L'action a été revendiquée par Extinction Rebellion : "Chaque parlementaire devra assumer son vote en faveur d'un texte dangereux pour la santé et déconnecté des préoccupations de la majorité des paysans." 

D'autres députés dénoncent les courriers ou les messages reçus sur les réseaux sociaux. C'est le cas de Liliana Tanguy (Ensemble pour la République, Finistère), d'Aurélien Pradié (non-inscrit, Lot), de Guillaume Lepers (Droite républicaine, Lot-et-Garonne) ou encore de Loïc Kervan (Horizons, Cher). "On m'écrit et on me souhaite d'avoir le cancer", a expliqué ce dernier sur BFMTV le 21 juillet. "Je n'ai jamais vu ça depuis le début de mon mandat. C'est des centaines et des centaines de mails d'insultes", a également déploré Guillaume Lepers sur TF1

Face à la multiplication de ces violences, la présidente de l'Assemblée nationale, Yaël Braun-Pivet, a réagi sur X, les condamnant "fermement". "Cela doit cesser", écrit-elle, ajoutant : "On ne menace pas, on n'intimide pas : on respecte et on débat."

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