Le président des députés socialistes, Boris Vallaud, a adressé ce vendredi 20 juin un courrier à la présidente de l'Assemblée nationale, Yaël Braun-Pivet, pour lui demander que soit examinée, lors de la prochaine réunion du Bureau de l'institution, l'utilisation des délégations de vote. Evoquant des "situations d'abus", il vise sans le nommer le groupe du Rassemblement national.
Après l'examen de la proposition de loi de programmation énergétique, qui fera l'objet d'un vote solennel mardi prochain, le groupe "Socialistes" a adressé un courrier à la présidente de l'Assemblée nationale, Yaël Braun-Pivet. Dans cette lettre, datée du vendredi 20 juin, consultée par LCP, le chef de file des députés PS, Boris Vallaud, s'interroge sur l'utilisation des délégations de vote par un autre groupe du Palais-Bourbon, en l'occurrence le Rassemblement national qui n'est toutefois jamais nommément cité dans la lettre.
"Mon groupe a constaté ces derniers jours, des situations d’abus provenant essentiellement d’un seul et même groupe. Ce groupe disposait ainsi de pas moins de dix-sept délégations de vote pour la 3e séance du mercredi 18 juin, soit près de 14% de ses effectifs et à nouveau de seize délégations pour les séances du jeudi 19 juin, un nombre égal au total des délégations des dix autres groupes réunis", peut-on lire, dénonçant un éventuel "contournement frauduleux de nos règles, affectant la sincérité des débats".
Boris Vallaud demande donc à ce que le sujet des délégations de vote soit mis "à l’ordre du jour de la prochaine réunion du Bureau". Et ajoute : "Au moment où le Comité d'alerte sur l'évolution des dépenses d'assurance maladie rend un rapport préoccupant sur la situation de ces dépenses, les parlementaires doivent être exemplaires, a fortiori lorsqu'ils prétendent se faire les procureurs de la fraude sociale."
Déjà, jeudi 19 juin, lors des discussions sur la loi sur l'énergie dans l'hémicycle, les délégations de vote avaient provoqué un vif échange après l'adoption d'un amendement prévoyant un moratoire sur l'éolien et le photovoltaïque. Dominique Potier (Socialistes) avait fait un rappel au règlement et annoncé le courrier à venir. "Depuis hier, un septième du groupe RN a délégation pour des raisons sanitaires. Soit c'est un problème épidémiologique et il faut saisir l'autorité, soit c'est un problème de fraude sociale et c'est un scandale, soit c'est un problème démocratique", avait-il déclaré.
Dans la foulée, Matthias Tavel (La France insoumise) avait cité le cas de Laure Lavalette (Rassemblement national), "qui a une délégation et qui tient une réunion publique tout à l'heure dans sa circonscription". "Il y a peut-être une incohérence qui mériterait d'être regardée", avait-il ajouté. Sur X, Laure Lavalette avait donné sa version des faits, évoquant "l'état de santé de [sa] fille handicapée".
Dans l'hémicycle jeudi, Jean-Philippe Tanguy (RN) avait pris la parole pour répondre à ces "complots qui n'existent pas". "Il y en a qui ont la défaite amère, on peut le respecter. Il y en a d'autres qui ont la défaite ignoble, immonde, odieuse, sans limite", a-t-il lancé à l'adresse des socialistes, en les accusant de "naufrage politique".
Qu'est-ce qu'une délégation de vote ?
Selon l'article 62 du règlement de l'Assemblée nationale, le droit de vote des députés "peut être délégué" pour les scrutins publics. "La délégation de vote est toujours personnelle, rédigée au nom d’un seul député nommément désigné" et "lorsque la durée de la délégation n'est pas précisée, elle expire de plein droit à l'issue d'un délai de huit jours francs à compter de sa réception".
Elle est autorisée "dans les conditions fixées par l’ordonnance n° 58‑1066 du 7 novembre 1958", notamment pour "maladie, accident ou événement familial grave empêchant le parlementaire de se déplacer", "mission temporaire confiée par le gouvernement", ou encore "participation aux travaux des assemblées internationales en vertu d'une désignation faite par l'Assemblée nationale ou le Sénat".