Premier ministre : sans majorité absolue à l'Assemblée nationale, le casse-tête de Matignon

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Matignon
par Soizic BONVARLET, le Lundi 8 juillet 2024 à 01:05, mis à jour le Lundi 8 juillet 2024 à 01:07

Qui sera nommé à Matignon après les élections législatives ? Alors que le Nouveau Front populaire est la principale force politique de l'Assemblée nationale, mais loin de la majorité absolue, dans un Palais-Bourbon partagé en trois blocs, l'équation pour trouver le successeur de Gabriel Attal risque de s'avérer compliquée. Qui revendique Matignon ? Que dit la Constitution ? Que peut faire Emmanuel Macron ?

Alors que le Nouveau Front populaire est arrivé en tête des trois principaux blocs qui concouraient au second tour des élections législatives, la question du gouvernement à venir est désormais posée. Si la gauche revendique la victoire et se dit prête gouverner, elle devra dans cette hypothèse et à défaut de majorité absolue composer avec les autres forces politiques présentes à l'Assemblée nationale. Un autre scénario pourrait consister en une coalition entre différentes forces politiques en faisant fi des alliances électorales initiales, avec un bloc central qui pourrait jouer de sa capacité à rassembler une partie de la droite et une partie de la gauche, de façon durable ou texte par texte. 

Pour l'heure, l'actuel Premier ministre Gabriel Attal a indiqué qu'il remettrait la démission de son gouvernement au président de la République dès lundi matin. Il a toutefois précisé qu'il assumerait "bien évidemment" ses fonctions "aussi longtemps que le devoir l'exigera".

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Le choix du Premier ministre, une prérogative présidentielle, orientée par le résultat des urnes

L'article 8 de la Constitution dispose que "le Président de la République nomme le Premier ministre". Il s'agit donc d'une prérogative exclusivement présidentielle, qui n'est pas soumise noir sur blanc à un délai particulier, ni à une obligation stricte en matière de choix. Lorsque lui-même ne dispose par d'une majorité, absolue ou relative, le chef de l’Etat, afin d'éviter le blocage institutionnel, se voit néanmoins contraint de nommer un chef de gouvernement issu de la majorité élue, sous peine de le voir immédiatement renversé par une motion de censure.

A l'issue du second tour des élections législatives, l'équation s'annonce d'autant plus compliquée, que si le Nouveau Front populaire a obtenu le plus grand nombre de députés, il est cependant loin de la majorité absolue, dans une Assemblée divisée en trois blocs. Cohabitation, coalition, gouvernement technique ? La question va sans nul doute occuper les prochains jours et peut-être plus encore... 

"Le Nouveau Front populaire doit prendre en main cette nouvelle page de l'histoire", a déclaré dimanche soir le premier secrétaire et député du Parti socialiste, Olivier Faure, évoquant "une seule boussole, celle du programme". Des propos en ligne avec ceux de Jean-Luc Mélenchon, qui a appelé à ce que la "volonté du peuple" soit "strictement acceptée". "Le Président a le devoir d'appeler le Nouveau Front populaire à gouverner", pour appliquer "son programme, rien que son programme, tout son programme", a aussi martelé le fondateur de La France insoumise.

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"Nous sommes candidats à gouverner", a également affirmé Sarah Legrain (La France insoumise) sur le plateau de LCP. "Il y a un gouvernement qui peut être formé, c'est celui du Nouveau Front populaire, il y a un programme qui est sur la table, c'est celui du Nouveau Front populaire", a fait valoir la députée.

La possibilité d'un statu quo pour les semaines à venir ?

Aucune des deux principales oppositions à Emmanuel Macron n'ayant obtenu de majorité absolue, le scénario de la cohabitation n'est cependant pas le seul qui s'offre au président de la République. Ce dernier peut ainsi expérimenter ce qui serait une innovation pour la Vème République, à savoir un gouvernement de coalition ou à défaut, un gouvernement technique, qui gérerait les affaires courantes en octroyant de fait davantage de pouvoir à l'Assemblée nationale. 

Le président de la République pourrait alors opter pour un Premier ministre suffisamment consensuel pour ne heurter aucune des forces politiques, par nature diverses, appelées à s'entendre pour légiférer. En essayant de trouver une figure qui surplombe les partis, n'apparaissant pas rédhibitoire pour l'un et l'autre pan de l'échiquier politique.

Dans l'attente éventuelle de l'une ou l'autre de ces solutions, Gabriel Attal pourrait être amené à rester un certain temps à Matignon, faisant de lui un Premier ministre de transition qui assurerait notamment une forme de stabilité et de continuité, peut-être le temps de l'été et des Jeux olympiques, en attendant que la situation politique du pays se clarifie.