Budget 2024 : Les débats sur la mission "Sécurités" interrompus par le gong

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Gendarmes à Paris Flickr 31/10/2023
Budget 2024 : Les crédits alloués à la sécurité ont été adoptés (© Flickr / Rog01)
par Raphaël Marchal, le Mercredi 1 novembre 2023 à 10:20

Les députés ont débattu, mardi 31 octobre, des crédits relatifs à la sécurité, prévu par le projet de loi de finances pour 2024. Les crédits du ministère de l'Intérieur en la matière prévoient notamment la création de près de 2 200 postes supplémentaires. L'examen du texte a été interrompu peu après minuit, heure de levée la séance. 

Un budget en hausse de plus d'un milliard d'euros pour la police et la gendarmerie l'année prochaine. Les députés ont abordé dans l'hémicycle, mardi 31 octobre en fin de journée, les crédits alloués à la mission "Sécurités", dans le cadre de l'examen du volet "dépenses" du projet de loi de finances (PLF) pour 2024. Le texte prévoit une enveloppe totale de 24,2 milliards d'euros, en hausse de 4,76 % par rapport à 2023 où elle était portée à 23,1 milliards d'euros.

Cette hausse, dont la trajectoire a été fixée précédemment par la loi d'orientation et de programmation du ministère de l'Intérieur (Lopmi), doit notamment permettre de répondre à une promesse présidentielle : le recrutement de 8 500 policiers et gendarmes sur 5 ans et le doublement de la présence des forces de l'ordre sur le terrain d'ici à dix ans. Les engagements contenus au sein de la Lopmi s'illustrent cette année avec le recrutement provisionné de 2 184 équivalent temps plein (ETP). "La présence accrue des bleus sur le terrain n'est pas un slogan ou un vœu pieux, mais c'est dorénavant une réalité", a salué le rapporteur spécial de la commission des lois, Thomas Rudigoz (Renaissance).

Les recrutements serviront également à la création progressive des 238 nouvelles brigades de gendarmerie annoncées par Emmanuel Macron. Par ailleurs, ont rappelé plusieurs élus au cours de la séance, l'année 2024 sera marquée par l'organisation des Jeux olympiques et paralympiques de Paris, qui représentera un défi sécuritaire certain. Quatre nouvelles unités de CRS seront créées, et des moyens techniques dédiés sont prévus.

Si la délinquance du quotidien reste la "priorité" de l'exécutif, le budget consacre des moyens pour faire face aux "nouveaux enjeux" de la sécurité. Il prévoit notamment des mesures destinées au traitement des violences intrafamiliales et à la prise en charge des victimes, qu'il s'agisse de formation ou d'effectifs dédiés. Un effort particulier a également été pensé concernant le maintien de l'ordre et la lutte contre la cybercriminalité.

Les débats ont été interrompus peu après minuit, alors qu'il restait de très nombreux amendements à examiner. La suite de l'examen des crédits du ministère de l'Intérieur est prévue pour le week-end des 18 et 19 novembre. Mais le gouvernement devrait recourir au 49.3 sur la partie "dépenses" du PLF d'ici là, ce qui veut dire que les députés ne termineront vraisemblablement pas l'examen des crédits de la mission "Sécurités" du ministère de l'Intérieur. 

La difficulté de recrutement mise en lumière

Tout en saluant la hausse de crédits et l'ambition de recrutement de l'exécutif, certains députés d'opposition ont insisté sur les difficultés de recrutement qui touchent police et gendarmerie, comme c'est le cas de nombreux services publics. Jean-Paul Lecoq (Gauche démocrate et républicaine) et Éric Pauget (Les Républicains) ont ainsi évoqué cette problématique, le parlementaire de droite pointant la "sous-consommation chronique des crédits de personnels due aux difficultés de recrutement et de fidélisation" des personnels.

Elisa Martin (La France insoumise) a pour sa part questionné la pertinence de ces recrutements supplémentaires. "Plus de présence sur le terrain, mais sans formation, sans école de police, sans enquêteurs supplémentaires, à quoi ça sert ?", a interrogé la députée.

Une grosse enveloppe pour la sécurité civile

Dans l'hémicycle, les députés ont adopté plusieurs amendements. Le principal d'entre eux ayant trait à la sécurité civile, afin de tirer les conclusions de "l'annus horribilis" qu'a représenté l'été 2022 en termes de feux de forêt : le gouvernement a proposé une hausse des crédits à hauteur de 215 millions d'euros en autorisations d'engagement et 146 millions d'euros en crédits de paiement. Cette somme ne comprend pas l'exonération du malus écologique pour les véhicules des sapeurs-pompiers, sur lequel le gouvernement s'est réengagé.

Cette enveloppe supplémentaire doit permettre de répondre aux annonces du président de la République, concernant le renouvellement de la flotte aérienne de lutte contre les feux de forêts, la revalorisation du remboursement des colonnes de renfort des services départementaux d'incendie et de secours (Sdis), le renforcement des moyens capacitaires des Sdis ainsi que la création d'une quatrième unité d’intervention et d’instruction de la sécurité civile.

Le projet de budget prévoyait d'ores et déjà de moderniser la flotte d'hélicoptères et les bases de la sécurité civile, mais également de renouveler la flotte des Canadairs avec une première commande de quatre aéronefs, dont deux financés par l'Union européenne.

Débats houleux en fin de séance

Alors que l'examen des crédits de la mission "Sécurités" s'est déroulé dans un calme notable, une altercation a éclaté à la toute fin de la séance dans la nuit de mardi à mercredi. Les députés venaient seulement d'aborder les amendements propres à la police et à la gendarmerie. Elisa Martin (LFI) a défendu l'augmentation du budget réservé à l'action sociale au sein de la police, afin de lutter le fléau des suicides qui touche l'institution. Une proposition vécue comme une insulte par la rapporteure Nadia Hai (Renaissance). "Venant d'un groupe parlementaire qui dit que la police tue, je pense que ce serait risible si ce n'était pas aussi grave", a-t-elle vivement réagi.

"La vérité, c'est que vous n'aimez pas l'ordre, vous voulez désarmer les policiers, vous traitez les syndicats de factieux, et quand on oppose policiers et délinquants, vous n'êtes pas loin de partir du principe que c'est le délinquant qui a raison", a renchéri le ministre de l'Intérieur, Gérald Darmanin. "Vous ne ferez pas croire aux policiers que vous les aimez ; ils ont très bien compris que vous ne les respectiez pas."