Budget 2026 : Avant les annonces de François Bayrou, quelles pistes d'économies pour redresser les finances publiques ?

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François Bayrou à l'Assemblée nationale
par Anne-Charlotte Dusseaulx, le Mardi 15 juillet 2025 à 00:20, mis à jour le Mardi 15 juillet 2025 à 00:27

Le Premier ministre, François Bayrou, tiendra une conférence de presse, ce mardi 15 juillet à 16h, au cours de laquelle il annoncera ses orientations budgétaires pour l'année prochaine, avec comme objectif de réaliser 40 milliards d'économies. Plusieurs pistes ont été évoquées ces dernières semaines, Matignon gardant cependant le secret sur les arbitrages qui seront dévoilés aujourd'hui. 

Pour François Bayrou, il est désormais l'heure de passer de la théorie à la pratique. Des mots sur la nécessité de redresser les finances publiques aux mesures pour y parvenir. Un sujet qui fait partie de "l'Himalaya de difficultés" qu'il avait évoqué lors de sa nomination à Matignon. C'est ce mardi 15 juillet que le Premier ministre va dévoiler ses orientations budgétaires pour l'année prochaine. Objectif : trouver 40 milliards d'économies dans le cadre du budget 2026, qui sera débattu à l'automne au Parlement.

Si le rendez-vous de la mi-juillet a été fixé de longue date, rien n'a filtré sur les intentions du chef du gouvernement qui a donné peu d'indices sur le chemin qu'il entend emprunter, alors même qu'Emmanuel Macron vient d'annoncer des efforts financiers supplémentaires en matière de Défense. Pour en savoir davantage, il faudra donc attendre 16h : les journalistes ont été conviés à Matignon, pour une "communication du gouvernement"

Quel périmètre pour "l'année blanche" ?

En vue des derniers arbitrages, François Bayrou a réuni samedi matin, durant presque quatre heures, les ministres concernés, dont Eric Lombard (Economie et Finances), Amélie de Montchalin (Comptes publics) et Catherine Vautrin (Travail et Santé). Le Premier ministre "a pris toutes les demandes, toutes les considérations de chacun des ministres, toutes les hypothèses données par les différents partis politiques, (...) et il est en train de faire l'assemblage final avec son équipe rapprochée", déclarait vendredi la porte-parole du gouvernement, Sophie Primas, lors du compte-rendu du Conseil des ministres. 

Parmi les principales mesures évoquées ces dernières semaines, celle de "l'année blanche" semble être l'une des pistes privilégiées par le gouvernement. Elle consiste à reconduire à l'identique certaines dépenses entre 2025 et 2026, sans augmentation et sans les indexer sur l'inflation. Reste la question de son périmètre : le gel du barème de l'impôt sur le revenu - alors que l'exécutif répète ne pas vouloir augmenter les impôts -, des prestations sociales, des pensions de retraites ? "Avec un budget des seuls coups partis, en gelant tout le reste, ça ne fait pas à mon sens la moitié du chemin", soit moins de 20 milliards, calculait la semaine dernière un conseiller gouvernemental. 

D'après la commission des finances du Sénat, le gel entre 2025 et 2026 des dépenses de l'Etat sur ses missions budgétaires (hormis la Défense, la contribution au budget de l'Union européenne et la charge de la dette) pourrait rapporter 10 milliards d'euros. Pour l'Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE) et l'Institut des politiques publiques (IPP), une "année blanche" pourrait permettre d'économiser entre 5,7 et 6 milliards d'euros. Sur 2026, l'OFCE calcule en particulier qu'un gel du barème de l'impôt sur le revenu pourrait rapporter 1,2 milliard d'euros, avec une hypothèse d'inflation à 1,1%.

Sur les retraites, le gouvernement dispose de plusieurs hypothèses, soit augmenter le taux maximal de la contribution sociale généralisée (CSG), soit les désindexer - toutes ou une partie - de l'inflation. Cette sous-indexation des pensions avait été évoquée lors du conclave sur les retraites. Elle rapporterait 3,7 milliards d'euros, selon les chiffres de l'OFCE. C'est aussi l'hypothèse retenue par le comité de suivi des retraites. 

La question de la taxation des plus riches est également revenue dans le débat public ces derniers jours, sachant que le Premier ministre insiste depuis des semaines sur le fait que tous les Français seront bel et bien concernés par l'effort à venir. Selon le Journal du dimanche, la contribution différentielle sur les très hauts revenus, mise en œuvre dans le budget 2025, "va réapparaître sous une forme un peu différente" pour un rendement attendu de 2 milliards d'euros. "On nous avait promis une taxation sur les hauts patrimoines, on ne la voit toujours pas venir", s'agaçait le député socialiste Philippe Brun dans La Tribune dimanche ce week-end. 

Un coup de rabot sur les niches fiscales ?

Invité de LCI jeudi dernier, François Bayrou a dit "ne pas croire que ce soit par l'impôt qu'on résout des problèmes de cet ordre", mais qu'il pourrait y avoir, dans le budget, "ici ou là des efforts particuliers". Un coup de rabot pourrait être donné sur plusieurs niches fiscales, à commencer par le crédit d'impôt lié à l'emploi d'un salarié à domicile (Cisap), dont le panier d'activités éligibles se verrait réduit. La question du crédit impôt recherche (CIR), qui coûte environ 7 milliards d'euros chaque année aux finances publiques, reste pour l'heure en discussion. Quid aussi des dons aux associations et de leur réduction fiscale ?

Pour tenir l'équation, le Premier ministre l'a affirmé à de nombreuses reprises : l'essentiel des économies doit passer par une baisse de la dépense publique. Parmi les pistes a envisager, le Sénat a estimé que réformer le fonctionnement de "l'archipel" des opérateurs et des agences de l'Etat permettrait d'économiser 540 millions d'euros sur plusieurs années. Mais le gouvernement voit plus grand, visant 2 à 3 milliards d'euros d'économies. Certaines agences pourraient être fusionnées et certaines missions amputées. Par ailleurs, les collectivités territoriales seront à nouveau mises à contribution.

Autre piste : "un travail de rationalisation" sur les aides publiques aux entreprises, selon la ministre Sophie Primas. Ces aides étaient de 211 milliards d'euros en 2023, d'après le rapport d'une commission d'enquête sénatoriale publié la semaine dernière, qui propose notamment "d'imposer le remboursement total" d'une aide si l'entreprise délocalise dans les deux ans le site ou l'activité ayant justifié l'aide.  

Qu'annoncera François Bayrou concernant les dépenses de santé ? Auditionnée il y a quelques jours par la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale, la Caisse nationale d'assurance maladie proposait notamment d'économiser 3,9 milliards d'euros en 2026 en améliorant la pertinence des soins, en luttant contre les fraudes, en régulant les prix, en renforçant la prévention, ou encore en réformant les indemnités journalières. "Certaines dépenses sociales devront être contrôlées" et le modèle social "reconfiguré", a déclaré jeudi sur LCI François Bayrou, alors qu'une grande conférence sociale est envisagée à la rentrée pour réfléchir au financement de la protection sociale. Au cœur des discussions : les arrêts maladie, les jours de carence, le déremboursement de certains médicaments, le dispositif d'affection de longue durée (ALD)…

Le gouvernement réfléchit également un nouveau durcissement des règles de l'assurance chômage, déjà prévu avant la dissolution de l'Assemblée nationale en 2024. "On devrait atterrir pas très loin de la précédente copie de Gabriel Attal, d'il y a un an, peut-être en plus dur. Mais ce n’est pas une réforme qui apporte des gains immédiats", indique un conseiller gouvernemental dans Le Parisien. A voir, d'ici là, quelles cases cochera François Bayrou, ce mardi 15 juillet, et comment le Premier ministre poursuivra son ascension himalayenne.