Les huit commissions permanentes de l'Assemblée nationale doivent désigner, jeudi 30 juin, leurs présidents respectifs. La commission des finances, qui revient à un groupe d'opposition, est l'objet de toutes les convoitises. Explications.
C'est une question qui n'a longtemps passionné que les spécialistes de la vie parlementaire, mais qui est désormais au centre de la vie politique : qui prendra la tête de la commission des finances ? Ce jeudi 30 juin, les députés des huit commissions permanentes de l'Assemblée nationale vont élire, à partir de 10h30, leurs présidents.
Les commissions permanentes participent à l'élaboration des lois : elles examinent les textes avant leur arrivée dans l'hémicycle et peuvent auditionner des ministres ou des personnalités extérieures à l'Assemblée nationale. Les commissions sont dirigées par un président, élu lors d'un scrutin à bulletin secret. Il est désigné à la majorité absolue ou, à défaut, à la majorité relative lors d'un troisième tour de scrutin. En cas d'égalité, c'est le plus âgé des candidats qui l'emporte.
Le président a plusieurs fonctions : il organise le déroulement des travaux, distribue la parole, s'assure que les amendements présentés par les députés ne sont pas irrecevables... Dans l'hémicycle, il a le droit de s'exprimer quand il le souhaite. Il participe également à la conférence des présidents.
Selon le règlement de l'Assemblée nationale, les différents groupes politiques "disposent [dans les commissions] d'un nombre de sièges proportionnel à leur importance numérique" dans la composition de l'Assemblée. C'est donc la majorité qui choisit dans la plupart des cas le nom des présidents de commission. Par exemple, lors de la précédente législature, les députés de La République en marche, prédominants dans la commission des lois (33 députés sur 71), avaient élu Yaël Braun-Pivet.
Ces règles ne s'appliquent pas à la commission des finances : le règlement de l'Assemblée nationale prévoit depuis la présidence de Nicolas Sarkozy que seul un député "appartenant à un groupe s'étant déclaré d'opposition" peut la présider. Lors de la précédente législature, c'est Eric Woerth, alors député Les Républicains, qui occupait ce poste sensible. Cette fois, le député de l'Oise siégera au sein du groupe majoritaire : il ne pourra pas être candidat à sa réélection.
La commission des finances de l'Assemblée nationale a un rôle particulier : c'est à elle que revient la mission de contrôler le Budget de l'Etat. Le président de la commission des finances peut, de plus, se faire communiquer les dossiers fiscaux d'entreprises ou de particuliers : en 2009, rappelle Le Parisien, le socialiste Didier Migaud avait ainsi eu accès à la liste des contribuables français détenant un compte en Suisse. Le président peut aussi se prononcer sur la recevabilité financière des propositions de loi ou des amendements déposés par les députés.
L'usage veut que ce soit la première force d'opposition qui obtienne la présidence de la commission des finances. Le Rassemblement national et ses 90 députés revendiquent ce statut : "La commission des finances nous revient", a estimé lundi Marine Le Pen. Le nouveau député RN Jean-Philippe Tanguy pourrait se porter candidat.
La Nouvelle union populaire écologique et sociale (Nupes), qui met en avant les quelque 142 députés de sa coalition estime, elle aussi, que le poste lui revient. Les Insoumis Aurélie Trouvé et Eric Coquerel pourraient se présenter, alors que l'ancienne présidente des députés socialistes, Valérie Rabault, est également pressentie par son groupe. Le député LFI Adrien Quatennens a d'ailleurs évoqué la possibilité de faire "tourner" le poste au sein de la Nupes.
Qui du RN ou de la Nupes l'emportera ? Traditionnellement, la majorité s'abstient lors du vote : si tel est le cas, le poste devrait échoir à la Nupes, dont les membres seront les plus nombreux à participer au scrutin. C'est en tout cas ce qu'estime le député et premier secrétaire du PS Olivier Faure : "La Nupes est la coalition la plus importante", écrit-il sur Twitter.
Mais rien n'est certain à ce stade. Car dans la configuration actuelle de l'Assemblée nationale, l'élection à la tête de la commission des finances dépendra aussi de l'attitude de la majorité et des Républicains. L'issue du scrutin s'annonce donc particulièrement incertaine. Verdict jeudi 30 juin, en fin de matinée.
Les commissions permanentes
Les commissions ont un rôle essentiel dans le travail législatif : c'est en leur sein que les députés examinent la loi et commencent à l'amender, avant son passage dans l'hémicycle de l'Assemblée nationale. Les discussions y sont traditionnellement plus techniques - et (un peu) moins politiques - qu'en séance publique. C'est aussi en commission que des personnalités extérieures à l'Assemblée nationale et les ministres sont auditionnés par les députés.
Un député ne peut être membre que d'une seule des huit commissions suivantes :
- La commission des affaires culturelles et de l'éducation,
- la commission des affaires économiques,
- la commission des affaires étrangères,
- la commission des affaires sociales,
- la commission de la défense nationale et des forces armées,
- la commission du développement durable et de l'aménagement du territoire,
- la commission des finances,
- la commission des lois.
Un député qui n'appartient pas à une commission peut assister à une de ses réunions et y prendre la parole, sans toutefois avoir le droit de vote au sein de celle-ci.