Au sein d'une Assemblée nationale dont le poids s'est accentué face à l'exécutif en l'absence de majorité, les réactions ont fusé après la nomination de François Bayrou à Matignon, ce vendredi 13 décembre. Alors que La France insoumise a déjà annoncé qu'elle déposera une motion de censure, les autres groupes d'opposition alternent entre vives critiques d'Emmanuel Macron et volonté de juger le nouveau Premier ministre au regard de ses actes, tandis que l'ex-majorité présidentielle affiche son soutien à François Bayrou.
Sans véritable majorité depuis les élections législatives de l'an dernier, l'avenir du nouveau Premier ministre, François Bayrou, se jouera largement à l'Assemblée nationale. Michel Barnier l'a expérimenté lors du vote de la censure qui a mis fin à son bail à Matignon. Un écueil que son successeur tentera d'éviter. Dès l'annonce de sa nomination, de nombreux députés et plusieurs figures du Palais-Bourbon ont réagi à l'arrivée de François Bayrou à Matignon.
"Tous mes vœux de succès à François Bayrou, nommé Premier ministre. (...) À vous de fédérer les énergies et aux députés de dépasser les clivages pour agir au service de la Nation. L’Assemblée nationale est prête !", a ainsi écrit sur X (ex-Twitter), la présidente de l'Assemblée, Yaël Braun-Pivet.
Réaction diamétralement opposée de Manuel Bompard (La France insoumise) qui a dénoncé "un nouveau bras d'honneur à la démocratie". Et la présidente du groupe LFI d'annoncer d'emblée le dépôt d'une motion de censure : "Deux choix clairs s'offrent au pays : la continuité des politiques de malheur avec François Bayrou ou la rupture. Deux choix s'offriront aux députés : le soutien au sauvetage de Macron ou la censure".
"François Bayrou, nommé dans une ambiance de vaudeville. C’est pathétique", a quant à elle estimé Cyrielle Chatelain sur X . La présidente du groupe "Ecologiste et social" qui, au contraire des insoumis, a participé aux consultations organisées à l’Élysée en début de semaine, estime aujourd'hui qu'"Emmanuel Macron s’entête et nous enfonce un peu plus dans la crise politique et institutionnelle".
"Pathétique", un qualificatif cinglant dont a également fait usage Arthur Delaporte (Socialistes). "Une matinée lunaire, après 9 jours d'un chaos organisé par Emmanuel Macron pour nommer un Premier ministre dans sa parfaite continuité. C'est aussi pathétique que révoltant", a estimé le député. Dans un communiqué, le Parti socialiste, qui a défendu ces derniers jours l'idée d'un accord de non-censure, demande au nouveau Premier ministre de renoncer à l'usage du 49.3 et à être reçu "dans les meilleurs délais". À ce stade, le PS ne s'inscrit pas dans la volonté de censurer d'emblée le futur gouvernement tout en demeurant "dans l'opposition au Parlement".
Toujours du côté du Nouveau Front populaire, le groupe "Gauche démocrate et républicaine", présidé par le communiste André Chassaigne, a lui aussi dénoncé le choix fait par le chef de l'Etat : "Refus acharné d'un changement de cap. Mépris immuable pour son peuple. E. Macron s'enferre dans son déni de la réalité. Il portera seul la responsabilité du chaos politique et social".
Marine Le Pen a également réagi sur X à l'annonce de l'arrivée de François Bayrou à Matignon, sans exprimer ni volonté de censure a priori, ni soutien au nouveau Premier ministre, mais déjà une exigence. "Soucieux de l’impérieuse nécessité de protéger les Français, nous lui demandons d’entreprendre ce que son prédécesseur n’a pas voulu faire : entendre et écouter les oppositions pour construire un budget raisonnable et réfléchi", a indiqué la présidente du groupe "Rassemblement national" à l'Assemblée. "Toute autre politique qui ne serait que le prolongement du macronisme, rejeté par deux fois dans les urnes, ne pourrait mener qu’à l’impasse et à l’échec", a-t-elle aussi estimé.
Faisant part de son "respect pour la personne de François Bayrou, le président du groupe "Union des droites pour la République", Eric Ciotti, allié du RN au Palais-Bourbon, a indiqué lui aussi que le successeur de Michel Barnier "ne fera pas l’objet d’une censure à priori".
Logiquement, le groupe "Les Démocrates", émanation à l'Assemblée du MoDem, a salué la nomination de celui qui a porté trois fois les couleurs du centre à l'élection présidentielle. "Par sa volonté constante de dépasser les clivages partisans, son esprit de responsabilité, les valeurs qu'il incarne, par son expérience, François Bayrou est en capacité de conduire un gouvernement au service de l'intérêt général, dans les circonstances graves que traverse le pays", peut-on lire dans un communiqué du groupe présidé par Marc Fesneau.
Le chef de file des députés du parti présidentiel, Gabriel Attal, qui est également à la tête de Renaissance depuis le week-end dernier, a lui aussi affiché le soutien de ses troupes à François Bayrou, appui décisif d'Emmanuel Macron en 2017 : "Je sais qu’il a les qualités pour défendre l’intérêt général et construire l’indispensable stabilité que les Français attendent. Nous partageons ces objectifs et nous nous tiendrons à ses côtés", a écrit sur X l'ancien Premier ministre.