L'Assemblée nationale a commencé, lundi 10 février, l'examen de la proposition de loi sénatoriale relative au "renforcement de la sûreté dans les transports". Le texte propose notamment de renforcer les prérogatives des agents de sécurité de la RATP et de la SNCF.
Pour ses défenseurs, il s'agit d'un texte "pragmatique" et "indispensable", tandis que pour ses opposants, c'est un texte qui risque de porter atteinte à des "droits fondamentaux". L'Assemblée nationale a entamé, lundi 10 février au soir, l'examen de la proposition de loi d'origine sénatoriale relative au "renforcement de la sûreté dans les transports". Le texte octroie notamment de nouvelles prérogatives aux agents de sécurité de la SNCF et de la RATP.
"Quand une femme renonce à prendre le RER le soir par peur, c'est une forme d'assignation à résidence inacceptable", a déclaré en ouverture des débats Philippe Tabarot. L'actuel ministre chargé des Transports a d'autant plus facilement défendu ce texte qu'il en est l'auteur : c'est lui qui a déposé la proposition de loi au Sénat en décembre 2023, lorsqu'il était sénateur des Alpes-Maritimes.
Cette proposition de loi présente des mesures pragmatiques pour améliorer la sûreté dans nos transports publics. Guillaume Gouffier Valente
La proposition de loi entend donner davantage de pouvoirs aux agents des services internes de sécurité des opérateurs de transports, comme la sûreté ferroviaire de la SNCF (Suge) ou le groupe de protection et de sécurité des réseaux (GPSR) de la RATP. "Un agent peut constater une infraction dans une gare mais se trouve impuissant dès que le contrevenant en franchit les murs" vers l'extérieur, a notamment souligné Philippe Tabarot.
Le texte propose de faciliter les palpations effectuées par ces agents, leur donne un "droit de poursuite" hors des gares et permet à certains agents d'Ile-de-France mobilités de consulter la vidéosurveillance. Il crée aussi une nouvelle interdiction d'entrée en gare, qui s'appliquerait aux personnes refusant une palpation, une inspection des bagages ou qui troublent l'ordre public.
En commission, les députés ont en outre adopté un amendement issu des rangs d'Ensemble pour la République, qui permet aux agents de la RATP et de la SNCF de récolter directement l'amende forfaitaire due pour certains délits comme la pénétration dans une zone interdite au public, la vente à la sauvette, ou encore l'entrave à la circulation des trains. Cette compétence est pour l'instant réservée aux seuls policiers.
Autres mesures présentes dans la proposition de loi : la création d'un délit d'incivilités d'habitude, la création d'un délit de bus et trainsurfing (qui consiste à s'accrocher à un bus ou à monter sur un métro), et le renforcement des sanctions pour abandon de bagage. Enfin, l'usage des caméras-piétons par les agents serait pérennisé et serait expérimenté par les conducteurs de bus.
Ces mesures ont été vivement dénoncées par Elisa Martin (La France insoumise), qui a critiqué "l'obsession de la surveillance généralisée" des défenseurs du texte. La députée a mis en cause des "risques manifestes de porter atteinte à de nombreux droits et libertés fondamentaux" et estimé que la proposition de loi participe à la "banalisation de l'extrême droite".
Elisa Martin a également provoqué de vives réactions en affirmant que le ministre de l'Intérieur, Bruno Retailleau, "reprend souvent à son compte des idées pétainistes" Une prise de parole jugée "inadmissible" par le ministre chargé des Transports, Philippe Tabarot et qui a entraîné une demande de sanction de la part des députés du Rassemblement national.
Regrettant l'absence d'étude d'impact et d'avis du Conseil d'Etat, Elsa Faucillon (Gauche démocrate et républicaine) a considéré que la proposition de loi "fragilise le principe de souveraineté étatique en matière de sécurité qui repose sur le monopole de la violence légitime, détenu par l'Etat". De la même façon, Sandra Regol (Ecologiste et social) a regretté une "dérive des moyens de l'Etat vers le privé", tandis que Roger Vicot (Socialistes) a dénoncé les "imprécisions volontaires" de la proposition de loi.
Le Rassemblement national, par la voix de Bryan Masson, a au contraire défendu le texte, jugeant toutefois qu'une partie de celui-ci se "s'écrasera sur le mur du syndicat de la magistrature ou le laxisme de la justice". Et son collègue Pascal Jenft (RN) de plaiser pour "un changement de cap plus profond" et "un renforcement général de notre système judiciaire". En séance, la proposition de loi a aussi reçu le soutien de Vincent Caure (Ensemble pour la République), de Ian Boucard (Droite républicaine), de Jean Moulliere (Horizons), ou encore de Sophie Ricourt Vaginay (Union des droites pour la République).
Tout en soutenant le texte, Philippe Latombe (Les Démocrates) a, quant à lui, "émis des réserves" sur certains de ses articles, comme la prolongation de l'expérimentation du traitement algorithmique des images de vidéosurveillance.
L'examen de la proposition de loi reprendra ce mardi 11 février après la séance de Questions au gouvernement.